N’oubliez pas les drones, s’il vous plaît

Le nouvel incident entre Israël et ses voisins devrait rappeler à tous les stratèges, dirigeants politiques et élus du peuple que l’avenir de notre défense et de notre sécurité sera bientôt bouleversé par une arme nouvelle, dont on parle trop peu, y compris dans la nouvelle loi de programmation militaire, par ailleurs très bienvenue : le drone. Survolés par un drone venu d’une base iranienne en Syrie, les Israéliens ont réagi en détruisant le camion d’où il était parti, ce qui a entraîné un jeu de représailles et de contre-représailles aux dimensions inédites. Ce fut même, d’une certaine façon, le premier affrontement direct entre Israël et l’Iran. Cet incident devrait nous conduire, nous aussi, à réaliser l’importance des drones dans les batailles de demain. Pour le moment, on les voit comme des jouets ou des moyens d’observation.

Aujourd’hui, on continue à préparer la guerre d’avant : massive, totale, dissuasive

Certes, on sait aussi que les Américains et les Français utilisent de petits avions sans pilote comme moyens de frappe ciblée. Mais bientôt, très bientôt, la donne va changer. Non seulement le drone est l’avenir de l’avion de combat, mais on verra apparaître des drones minuscules, de la taille d’un ballon de football ou même d’une balle de tennis, capables de reconnaître une cible humaine à partir d’une photographie et de venir la détruire dans n’importe quel lieu. Un peu plus tard, on pourra embarquer des centaines, voire des milliers, de tels drones dans un camion ou un avion et les larguer en escadrille au milieu d’une foule, d’une armée en marche ou d’une réunion politique.

Aujourd’hui pourtant, on continue pour l’essentiel à préparer la guerre d’avant : massive, totale, dissuasive. Et on continue à tout faire pour en protéger les soldats par des exosquelettes, ou en les remplaçant par des robots. Sans voir assez que l’économie de la guerre se modifie comme celle de la paix : elle devient intelligente, sur mesure et miniaturisée.

Jusqu’à présent, personne ne sait arrêter un drone ; et a fortiori des milliers. Aucune technologie n’y prépare. Les Américains eux-mêmes, les premiers en ce domaine, semblent démunis, désemparés, devant de tels dangers. Comme le sont les Chinois, les Israéliens, les Iraniens et quelques autres, qui y consacrent beaucoup de moyens.

Imagine-t-on des chasseurs, des meurtriers, des fous, des terroristes disposant de tels moyens ? Les imagine-t-on en vente libre aux Etats-Unis, comme le sont d’autres armes ? Imagine-t-on les ravages qu’ils peuvent produire ? Pour m’y être essayé dans un roman sur le sujet (1), à paraître dans quelques semaines, et après avoir consulté quelques-uns des meilleurs experts du monde, je peux affirmer qu’on aurait grand tort de ne pas consacrer beaucoup plus de moyens à la recherche et au développement de ces technologies et aux contre-mesures, en particulier à l’intelligence artificielle, dont tout dépend.

Il ne faudrait pas manquer cette évolution stratégique et technologique, dont, accessoirement, les conséquences civiles seront formidablement importantes, comme le montre déjà ce que fait le Rwanda (où des drones servent à livrer des médicaments dans des zones reculées) et ce que préparent les grandes firmes de commerce à distance.

Cela pourrait être un des premiers, sinon le premier, programmes de la future agence de coopération industrielle militaire franco-allemande, et plus largement européenne, si espérée, si attendue.

(1) Meurtres, en toute intelligence, Fayard, mars 2018.

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