Les héros BD de jadis ont toujours la cote. © sdp

le royaume des morts

La bande dessinée, pourtant en quête de nouveaux modèles, n’a jamais autant exploité son passé : ses stars d’aujourd’hui sont, encore, toujours et avant tout, celles d’hier.

Une gigantesque nécropole, la bande dessinée ? L’année 2017 n’aura en tout cas fait que confirmer la tendance lourde, dans tous les sens du terme, dans laquelle se complaisent les grandes maisons d’édition depuis quelques années : l’exploitation, parfois à outrance, de leurs personnages les plus forts, et donc souvent aussi, les plus vieux. Ainsi, le hit-parade des ventes ressemble-t-il de semaine en semaine à ceux des années 1950 ou 1960 : on n’a évidemment pas pu échapper à la déferlante Astérix, mais on y retrouve aussi des séries comme Thorgal, Spirou, Gaston, Blake & Mortimer, Alix, Lefranc, Batman, Largo Winch, Corto Maltese, Mickey et Lucky Luke. Sur ce même créneau d’exploitation de leurs marques fortes, chacun déploie sa propre stratégie de reprise : mimétique pour Astérix ou Blake & Mortimer, décalée pour Lucky Luke ou Mickey et foutraque pour Spirou, Gaston ou Le Marsupilami qui, chez Dupuis, changent de visages et de graphisme presque toutes les semaines ! Une stratégie d’occupation de terrain qui n’aime rien mieux que les anniversaires pour y aller sans gêne : grâce ou à cause des 60 ans de la création de Gaston, on a ainsi vu apparaître cette année une multitude de produits aussi dérivés que moyennement intéressants (entre le calendrier, les inventions, les intégrales, les hors-séries et les rééditions, il y a de quoi se perdre mais surtout dépenser), ainsi que des albums hommages à Gaston et au Marsupilami( » La galerie des gaffes  » pour l’un,  » Des histoires courtes par…  » pour l’autre) réalisés par… des dizaines d’auteurs différents. Toutes ces stratégies purement marketing mettent en évidence deux problèmes : les éditeurs de bande dessinée ont non seulement bien du mal à se renouveler et à sortir de leurs valeurs sûres pour imposer de nouveaux univers originaux, mais ils nient par là même une nouvelle réalité du marché : selon une récente étude GSK, les ventes de BD franco-belges dites  » patrimoniales  » reculent de près de 20 % sur l’année, alors que les mangas et, surtout, les comics s’affichent à la hausse. Signe que le lectorat se renouvelle, mais n’a qu’un goût modéré pour les vieilles choses, même reliftées…

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