Alexandre Galopin, gouverneur de la Générale, était le symbole de la politique du "moindre mal". © SDP

Le 28 février 1944, le gouverneur Alexandre Galopin était assassiné

Ce n’est pas la première fois qu’un homme est tué. Tout au long du conflit, en Belgique comme ailleurs, les bataillons de SS sèment la mort. Avec brutalité, la police nazie torture les communistes, persécute les Juifs et traque les francs-maçons. Mais cette fois, la victime est illustre. Ce 28 février 1944, les SS viennent d’abattre l’homme le plus puissant de la Belgique occupée.

L’histoire d’Alexandre Galopin, né en 1879, est celle d’un surdoué. Après des études d’ingénieur civil à l’université de Liège, le jeune homme poursuit sa formation à l’étranger. A l’aube du XXe siècle, il est engagé à la Fabrique nationale d’armes de guerre. Placé à la direction du  » laboratoire central « , il donne à ce service  » R&D  » un essor considérable. En 1923, il est recruté par les services centraux de la Société générale de Belgique, principal actionnaire de la firme liégeoise. L’ascension n’est pas terminée : en 1935, Galopin est nommé gouverneur de la Générale. Il accède ainsi à la tête de la plus grande puissance financière du pays.

Le 15 mai 1940, alors que le territoire est envahi par les troupes allemandes, les ministres Paul-Henri Spaak et Camille Gutt convoquent les vedettes du patronat national. Le désordre qui règne dans le pays ne permet qu’à trois d’entre elles de répondre à l’appel. C’est le cas d’Alexandre Galopin. Les ministres leur demandent d’assurer la direction morale du pays.  » Messieurs, nous vous confions la Belgique « , résume Spaak, dans une formule devenue historique.

Tout naturellement, le gouverneur de la Générale prend la direction de ce qui deviendra le  » comité Galopin « . Et formule en quelques mots ce qu’on appellera la  » doctrine Galopin « . L’idée est simple : l’occupation ne doit pas empêcher l’activité économique. Partout, les sociétés sont encouragées à produire. Afin, notamment, d’éviter la déportation des travailleurs. Quelques balises sont toutefois posées. Ainsi, il est par exemple interdit de produire des armes.

Symbole de la politique du  » moindre mal « , Galopin devient une personnalité clé. Présent dans toutes les négociations, il a une influence immense.  » Discret, efficace, sûr, disposant de moyens considérables « , relève André de Staercke, chef de cabinet du Premier ministre Pierlot, en 1942. L’homme, pour autant, ne fait pas l’unanimité. Sa grande indépendance agace ; sa politique questionne. De plus en plus, et de divers côtés, Galopin se voit contesté.

Mais ce sont surtout les nazis que Galopin dérange. Le 28 février à l’aube, des SS assassinent le gouverneur à son domicile.  » Avec son caractère froid et prudent, ce n’est pas le genre d’homme qui devait provoquer les assassins « , commente l’ancien Premier ministre Georges Theunis, deux jours après les faits. A Londres, mal pris, le gouvernement se tait. Avec le recul, la mémoire de l’industriel sera davantage saluée. Celle d’un homme qui, placé dans des circonstances impossibles, tenta d’adopter la meilleure attitude possible. Ou, en tout cas, la moins mauvaise.

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