Les négociations budgétaires éclaboussent les rives du Mékong

(Belga) Quels projets maintenir pour une coopération au développement frappée elle aussi par les restrictions budgétaires? A Vientiane, sur les rives du Mékong où le ministre Paul Magnette se trouvait lundi et mardi pour le sommet Asie-Europe, des ONG et organes officiels attendent eux aussi l’issue du conclave budgétaire.

En Asie du sud-est, Oxfam ne voudrait pas subir de la Belgique les mêmes coupes budgétaires de 30% que le gouvernement néerlandais a décidées récemment, témoigne Dominique Van der Borght, directeur régional de cette plate-forme d’ONG luttant contre la pauvreté. Le Laos, qui a fait les frais en 2003 de la réduction à 18 des pays privilégiés par la coopération belge au développement pour des raisons d’efficacité et d’histoire, ne bénéficie plus d’aides bilatérales, mais la Belgique y reste présente à travers les ONG internationales et certains organes multilatéraux régionaux. Ce petit pays communiste, parmi les plus pauvres du monde, est aussi celui qui détient le triste record de concentrer le plus grand nombre de sous-munitions non explosées, restes de la guerre du Vietnam voisin dans les années 60 et 70. Handicap International compte donc toujours sur l’aide de la Belgique pour « dépolluer » les terrains minés qui font encore une centaine de victimes – pour la moitié des enfants – par an. « La Belgique, qui fut le premier pays au monde à interdire les sous-munitions en 2006, est aussi le 4e Etat au monde pour l’aide aux victimes et la lutte contre les sous-munitions », rappelle Violaine Fourile, cheffe de mission à Vientiane. La tâche reste ardue: plus de 20 millions de dollars sont recherchés pour « dépolluer » les terrains bombardés le long de la « Piste Hô Chi Minh », cet ensemble de routes et sentiers employés pendant la guerre du Vietnam. Le Laos, dont l’économie est en forte croissance, a aussi vu exploser le nombre de ses victimes de la route (905 par an, plus 12.000 blessés, +50% en 6 ans). Eric Remacle, un ancien de la Coopération belge au développement, travaille désormais pour Handicap International sur cette problématique, en collaboration notamment avec l’Instituut voor mobiliteit de Hasselt. Ces projets, pour lesquels la Belgique est en pointe, pourraient échapper aux restrictions budgétaires. « Nous n’avons pas encore reçu d’annonce », relève Violaine Anne Rouve-Khiev, cheffe du programme « dépollution » de H.I. à Vientiane. Si elle reconnaît que la crise en Europe a réduit certains budgets de la coopération, pour d’autres très sensibles, ce n’est pas le cas. Mais d’autres pressent le gouvernement belge de trancher. Hans Guttman est le directeur du secrétariat de la Mekong River Commission (MRC), un organe international chargé de promouvoir et coordonner la gestion et les ressources du bassin du Mékong (Vietnam, Laos, Cambodge, Thaïlande). La thématique est d’importance, dans une région où la plupart des populations vivent de la rivière sans trop de règles supranationales, et où les gouvernements s’affrontent, comme sur ce projet approuvé lundi d’un immense barrage hydroélectrique au Laos, dénoncé par le Vietnam et le Cambodge pour ses conséquences sur la pêche et l’environnement, mais réclamé par la Thaïlande vers laquelle ira 95% de l’électricité produite. Hans Guttman attend la réponse de la Belgique pour le nouveau programme de navigation qu’il doit lancer en 2013. L’apport belge est certes relatif (13 millions d’euros depuis 1995), mais des restrictions de plusieurs pays auraient des répercussions sur le travail du MRC, a fait valoir M. Guttman. « Il faut attendre le résultat des négociations (à Bruxelles), ce sera peut-être difficile d’aider au même niveau », a déjà prévenu le cabinet du ministre Magnette, l’assurant toutefois du maintien d’une certaine aide. (BPE)

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