« L’évacuation des déchets nucléaires de Fleurus n’a pas été anticipée »

(Belga) La société canadienne Nordion n’a jamais évacué ses résidus radioactifs consécutifs à la production d’yttrium 90 à partir de strontium 90, entamée en 2000 sur le site nucléaire de Fleurus. Une enquête de Paris-Match révèle des échanges de mails, des courriers, des réunions, à partir de 2010, sur cette question entre l’entreprise et les autorités compétentes (Bel V, AFCN, Ondraf). Aucune solution concrète n’avait alors été avancée.

Informé dès 2010 par courrier de la présence de déchets de strontium/yttrium sur le site de Fleurus, l’Organisme National des Déchets Radioactifs et des matières Fissiles enrichies (Ondraf) répond à plusieurs reprises à la société Nordion, déjà en juin 2010, que ce type de déchets a une radioactivité tellement élevée qu’il ne sait pas comment le prendre en charge, ni évaluer le coût de son traitement. Interrogé à ce sujet par Paris-Match, un porte-parole répond qu’il ignore ces échanges de courrier, ne connaissant pas l’historique de l’affaire. Le 15 juillet 2010, Nordion-Canada annonce une lourde restructuration et son départ imminent de Fleurus. Les conventions signées en 1990, au moment de la reprise des activités de l’IRE (Institut des radioéléments) par Nordion, ne prévoyaient pas ce type de déchets. « Et l’on s’interroge sur les exigences des autorités de contrôle nucléaire belges (en l’occurrence l’AFCN) qui ont autorisé le démarrage de ce train fou avançant dans le brouillard, au travers d’une autorisation d’exploitation », note le magazine. « L’évacuation n’avait pas été anticipée, tant sur le plan technique que financier », confirme un ex-collaborateur de Nordion. « Il y avait un marché à prendre. On a produit. Et comme on n’avait pas de solution pour évacuer, on a commencé à stocker. Il faut bien constater que pendant dix ans où cette chaîne a fonctionné, on n’a jamais fait partir ces déchets… », constate un autre ancien employé. « Les autorités de contrôle ont sans cesse augmenté leur degré d’exigence et Nordion s’est rendu compte fort tard du coût financier que l’évacuation de ce stock accumulé depuis dix ans allait engendrer », constate un ancien employé de Nordion. « Il est évident qu’en s’ajoutant aux importantes pertes que subissait sa filiale de Fleurus, cet élément ‘coût des déchets de strontium’ a accru la volonté des Canadiens de partir de Belgique. Finalement, ils ont réussi à le faire en laissant tout ce passif à charge du repreneur américain, Best Medical, qui a rapidement fait faillite sans régler le problème. » (VIRGINIE LEFOUR)

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire