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Iran : Salman Rushdie héros d’un jeu vidéo

Alors que Téhéran accueille une exposition sur les jeux en ligne, une polémique éclate sur l’un d’entre eux mettant en scène la fatwa lancée contre l’écrivain britannique Salman Rushdie.

Le 26 juillet 2012 marquera l’ouverture du salon pour jeux en ligne International Computer Game Expo, à Téhéran. La controverse au coeur de l’événement est le jeu The Stressful Life of Salman Rushdie and Implementation of his Verdict, élaboré par l’association islamique des étudiants, une organisation soutenue par le gouvernement et qui a annoncé cette semaine avoir terminé les phases initiales de la production.

Depuis le 14 février 1989, Salman Rushdie est la cible d’une fatwa édictée par l’ayatollah Khomeini (mort quelques mois plus tard), pour avoir écrit le roman Les versets sataniques, jugé insultant et blasphématoire envers l’islam. Le but de ce jeu vidéo est de transmettre la teneur de son « péché » à la génération suivante.

La deuxième édition de l’International Computer Games Expo est censée « présenter la culture, les valeurs et l’identité islamique de l’Iran », selon la chaîne de télévision de l’État en anglais, PressTV.

Le quotidien britannique The Guardian rapporte qu’il y a trois ans, l’association des étudiants et la fondation nationale iranienne pour les jeux vidéo avaient invité les étudiants à travers tout le pays de proposer des scénarii pour le jeu et que les trois arrivés en tête seraient développés. On ne sait pas encore grand-chose au sujet de ce jeu, mais son titre laisse entrevoir que les joueurs devront appliquer l’appel au meurtre de l’écrivain, lancé par l’ayatollah Khomeini.

Cette création douteuse survient alors que depuis quelques années, l’Iran dénonce « une guerre feutrée et culturelle » dont il serait la victime via des chaînes de télé par satellite illégales, des romans occidentaux, les films hollywoodiens et les jeux vidéo. Coupes de cheveux et mode occidentale seraient également mises à l’index comme faisant partie de « l’invasion culturelle ». La riposte iranienne se joue donc dans le cyberespace. Mohammad-Taqi Fakhrian de l’association des étudiants estime que la production de jeux vidéo était une manière de combattre cette guerre culturelle dont l’Iran serait victime. « Nous avons pensé devoir trouver un moyen de sensibiliser la troisième et la quatrième génération à la fatwa contre Salman Rushdie et l’importance que cela revêt, » a-t-il déclaré à l’agence de presse iranienne Mehr.

D’autres jeux développés par des Iraniens mettent en scène un commando iranien cherchant à abattre des pirates dans le Golfe d’Aden, la libération de savants nucléaires enlevés par les Américains ou encore une autre fatwa visant un rappeur iranien pour propos apostats. Pour autant, les jeux iraniens savent aussi être plus inspirés comme The Age of Heroes, inspiré de Shâh Nâmeh, poème épique du Xème siècle, un classique de la littérature perse et oeuvre du poète Ferdowsi.

Si ce salon est consacré aux jeux vidéo, il faut tout de même rappeler qu’en 1989, la fatwa lancée contre Salman Rushdie avait causé une interruption des relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et l’Iran pendant plusieurs années. De plus, la fatwa a été non seulement maintenue mais réitérée par l’actuel guide spirituel iranien, Ali Khamenei, très contesté lors du soulèvement contre le dernier scrutin présidentiel iranien de 2009.

Alexandre Huillet

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