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Ypres, les tyrans et la RDC au coeur du discours de Di Rupo à l’ONU

Le Vif

Le Premier ministre belge Elio Di Rupo a réaffirmé jeudi une constante de la politique étrangère de la Belgique, son attachement viscéral au multilatéralisme pour résoudre les défis et les crises auxquels le monde doit faire face, tout en appelant le monde à imposer un veto « aux tyrans et à leurs crimes », comme en Syrie.

« Personne ne peut seul arrêter une famine, personne ne peut seul stopper un tyran. La paix est une responsabilité collective. C’est pourquoi il n’y a pas d’autre voie que le multilatéralisme pour améliorer les conditions de l’humanité », a-t-il déclaré en soirée devant la 68ème Assemblée générale des Nations Unies. »C’est ce qui motive l’engagement politique, financier et parfois militaire de la Belgique, 15ème contributeur financier des Nations Unies », a souligné M. Di Rupo.

« Mon pays estime que nous avons également, parmi nos responsabilités, la ‘responsabilité de protéger' », a-t-il dit en référence au concept de responsabilité de protéger (R2p) adopté par l’ensemble des Etats membres de l’ONU en 2005. « C’est-à-dire de prévenir et combattre ces crimes particulièrement odieux que sont les génocides, les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les épurations ethniques », a expliqué le chef du gouvernement à la tribune de l’ONU.

Il a assuré que la Belgique soutenait « pleinement » l’action des Nations Unies et annoncé que Bruxelles accueillerait en 2014 (les 31 mars et 1er avril, ndlr) une conférence internationale sur la prévention des génocides.

Plus largement, M. Di Rupo a appelé la communauté internationale à mettre un veto « aux tyrans et à leurs crimes », dans une allusion limpide à la Syrie, en proie depuis deux ans et demi à une guerre civile qui a fait plus de 110.000 morts, avec un recours aux armes chimiques. « C’est dans mon pays, à Ypres, en Belgique, lors de la première Guerre mondiale, que les armes chimiques ont été utilisées pour la première fois dans un conflit », a-t-il rappelé. « Près de 100 ans après, c’est cette même souffrance qui frappe aujourd’hui des milliers de Syriens », a-t-il ajouté en référence aux attaques à l’arme chimique commises le 21 août dans la banlieue de Damas et généralement attribuées au régime du président Bachar al-Assad. « Et ce malgré le protocole international de 1925, qui interdit toute utilisation d’armes chimiques », a regretté le Premier ministre. »D’Ypres à Damas, l’histoire du monde est une histoire commune », a-t-il dit, sans jamais citer le nom du président syrien.

« S’il faut mettre un veto, c’est un veto aux tyrans et à leurs crimes », a poursuivi M. Di Rupo dans une allusion aux mois de blocage au sein du Conseil de sécurité de l’ONU où la Russie et la Chine se sont opposées à toute intervention internationale en Syrie. »Il y a un an, j’évoquais les 30.000 morts syriens. Il y en a aujourd’hui 120.000″, a-t-il déploré.

Evoquant la situation dans la région des Grands Lacs, où la Belgique joue un rôle important depuis un siècle, M. Di Rupo a réclamé la fin des ingérences étrangères en République démocratique du Congo (RDC). Il a aussi appelé le gouvernement de Kinshasa à « rétablir l’Etat de droit » sur l’ensemble de son territoire et à réformer son armée et sa police. »L’intégrité territoriale de la RDC doit être respectée. Toute ingérence extérieure doit cesser », a-t-il lancé, sans citer aucun pays. Le Rwanda – et dans une moindre mesure l’Ouganda – est accusé par l’ONU et par Kinshasa de soutenir une énième rébellion dans l’est congolais, le Mouvement du 23 mars (M23), qui occupe encore une zone de 700 km2 dans la province du Nord-Kivu.

La population du nord-est du Congo est, depuis des années, soumise aux massacres, aux viols multiples, au recrutement forcé de soldats – y compris d’enfants -, aux pillages, aux déplacements forcés…, a souligné M. Di Rupo. Il a toutefois salué les tentatives récentes de la communauté internationale pour ramener la paix en RDC. « Les efforts du secrétaire général (de l’ONU, Ban Ki-moon) et du Conseil de sécurité pour renforcer le mandat de la Monusco (la Mission de l’ONU pour la stabilisation de la RDC) donnent des premiers résultats. La brigade d’intervention (de 3.000 Casques bleus dotés d’un mandat offensif) joue un rôle actif pour protéger les populations »,

a dit le Premier ministre.

Il a noté que l’accord-cadre d’Addis Abeba – signé le 24 février dernier par onze pays de la région pour tenter de pacifier l’est du Congo – « offre une réelle perspective de stabilisation de la région toute entière ».M. Di Rupo s’est enfin montré favorable à la mise en place d’un cadre multilatéral pour assurer la protection des données qui circulent sur internet, rejoignant un appel lancé par la présidente brésilienne Dilma Rousseff, courroucée par l’ampleur des programmes d’écoutes et d’espionnage informatique américains.

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