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Venezuela: 36 morts en un mois, les manifestations continuent

Le Vif

L’opposition vénézuélienne doit de nouveau manifester contre le président socialiste Nicolas Maduro, malgré une flambée de violence qui a fait 36 morts depuis le début de la mobilisation il y a un peu plus d’un mois.

Un jeune homme de 22 ans est décédé dans la matinée après avoir été blessé la veille lors de violences à Valencia, ville du nord du pays secouée par des attaques contre une centaine de commerces et de vifs affrontements entre opposants et forces de l’ordre.

Des pillages ont été signalés dans d’autres endroits, poussant de nombreux Vénézuéliens à s’approvisionner en essence et en vivres par précaution.

A Caracas, une manifestation d’étudiants est prévue pour la deuxième journée consécutive. Ils tenteront de rejoindre le ministère de l’Intérieur, dans le centre, pour dénoncer la « répression brutale » dont l’opposition dit être victime lors des mobilisations.

Dans ce pays en proie à une profonde crise politique et économique, les anti-Maduro défilent presque tous les jours pour exiger le départ du chef de l’Etat avant la fin de son mandat en décembre 2018.

Jeudi des heurts ont éclaté entre les étudiants et la police. La manifestation a tourné à la bataille rangée entre les forces de l’ordre, qui ont utilisé du gaz lacrymogène, et certains opposants. Ces derniers ont répliqué avec des cocktails Molotov et des pierres.

Opposition

Déterminée à ne pas relâcher la pression, l’opposition a annoncé une marche des femmes pour samedi. Vêtues de blanc, elles tenteront, elles aussi, de rejoindre le ministère de l’Intérieur. « Nous irons face au responsable de la répression. L’ennemi, ce n’est pas nous, l’ennemi se trouve à Miraflores », le palais présidentiel, a lancé Lilian Tintori, l’épouse du leader d’opposition Leopoldo Lopez, emprisonné depuis 2014.

Cette vague de manifestations, dont le bilan est le plus lourd depuis celle de 2014 (43 morts officiellement), survient alors que le pays pétrolier a sombré avec la chute des cours du brut. Ruiné, le Venezuela souffre d’une grave pénurie d’aliments et de médicaments ainsi que d’une inflation galopante, attendue à 720% fin 2017 par le FMI.

Lassés, sept Vénézuéliens sur dix souhaitent le départ immédiat de M. Maduro, élu en 2013, selon un sondage Venebarometro.

Pour l’analyste Luis Vicente Leon, le bras de fer engagé entre le gouvernement socialiste, qui contrôle la quasi-totalité des institutions hormis le Parlement, et l’opposition de centre droit est une « bataille entre la majorité (populaire, ndlr) et la force (du pouvoir, ndlr). La majorité finit avec plus de blessés mais la force avec une blessure morale, profonde et irrémédiable ».

La guerre ou la paix

L’opposition a pour principal objectif d’obtenir des élections anticipées. Nicolas Maduro s’y refuse et sa dernière initiative a été de présenter mercredi un décret convoquant une assemblée nationale constituante chargée de réformer le texte de 1999.

Le chef de l’Etat dit vouloir ainsi « réconcilier » le pays. Ses adversaires y voient plutôt une manoeuvre pour repousser les élections et s’accrocher coûte que coûte au pouvoir.

« Nous n’avons pas le choix », a plaidé vendredi Elias Jaua, à la tête d’une commission présidentielle chargée de préparer cette assemblée constituante. Il faut « convoquer le peuple et qu’il décide du destin de la patrie: la guerre ou la paix, la cohabitation ou la négation ».

M. Maduro promet de « renforcer » la Constitution adoptée à l’initiative de son mentor, l’ex-président décédé Hugo Chavez (1999-2013) en approfondissant la révolution socialiste prônée par celui-ci et en s’appuyant sur une assemblée « populaire » et non « d’élites et de partis ».

Selon lui, la moitié des 500 membres de cette assemblée constituante seront désignés par des secteurs sociaux (syndicats, retraités, minorités sexuelles…), les autres seront élus selon un découpage par circonscription municipale. Plusieurs analystes redoutent qu’il place ainsi nombre de ses partisans.

« Il y a une élite qui méconnaît cette force populaire, révolutionnaire qu’est le chavisme. Qu’il soit bien clair pour eux (…) que nous n’allons pas permettre cela, nous n’allons pas permettre qu’ici s’installe un régime fasciste », a mis en garde M. Jaua, qui a invité l’opposition à une réunion lundi.

Certains dirigeants de l’opposition ont déjà fait savoir qu’ils n’iraient pas, continuant de dénoncer un « coup d’Etat » du clan présidentiel depuis que la Cour suprême s’était arrogé brièvement fin mars les pouvoirs du Parlement, l’étincelle ayant déclenché la vague de manifestations

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