Union européenne made in China

Quel symbole ! Parmi les nombreuses décisions prises cette nuit par les 17 chefs d’Etat de l’eurozone, celle qui laissera sans doute le plus de trace est la création d’un fonds spécial auquel contribueront les pays émergents comme la Chine et la Russie. Une nouvelle ère s’ouvre…

La nuit aura été rude pour les gouvernants européens. Mais ils sont parvenus à se mettre d’accord sur des points cruciaux pour éviter le chaos que tous prédisaient en cas de blocage. Premiers sur la balle, les marchés asiatiques semblaient d’ailleurs souffler, en ce début de matinée. En effet, la dette grecque (350 milliards d’euros) sera considérablement réduite. Apres à convaincre, les banques ont accepté, sous la pression particulière de la chancelière allemande Angela Merkel, de renoncer à la moitié de leurs créances grecques, soit 100 milliards d’euros.

La négociation fut musclée, mais la contagion à d’autres pays de la zone euro semble, pour l’instant, jugulée. La dette d’Athènes sera ramenée de 160 à 120 % du PIB d’ici à 2020. Pour autant que les promesses se concrétisent, cela devrait permettre de rassurer les investisseurs. Reste à voir si la recapitalisation des banques mises en difficulté par la dette grecque sera suffisante : les pays de la zone euro se sont accordés sur le montant de 106 milliards, alors que les marchés et même le FMI l’estimaient à 200 milliards.

Autre point essentiel : les 17 ont également convenu de démultiplier la puissance de feu du Fonds de secours aux pays défaillants (FESF). L’enveloppe actuelle de 440 milliards d’euros sera portée à environ 1 000 milliards. Mais surtout, les Européens y ont ajouté un fonds spécial adossé au FMI, auquel contribueront des pays étrangers à l’UE, principalement les pays émergents. A savoir : la Norvège, qui avait déjà montré son intérêt, le Japon, la Russie, le Brésil et… la République populaire de Chine qui sera sans doute le principal bailleur de ce nouveau fonds. En clair : la zone euro ne compte plus sur ses propres moyens pour sortir du marasme. Elle a ouvert une porte (à long terme) vers l’extérieur. Reste à définir les montants et les modalités.

Rendez-vous à Pékin

Le président français Nicolas Sarkozy devrait rencontrer dès ce jeudi son homologue chinois Hu Jintao pour évoquer le sujet. Et le directeur général du FESF, l’Allemand Klaus Regling, est attendu à Pékin dès vendredi. Ainsi directement sponsorisée par la Chine dont elle est le premier partenaire commercial, l’Europe ne sera plus tout à fait la même. Elle va se rapprocher de la situation des Etats-Unis dont les bons du Trésor sont détenus à hauteur de 2 000 milliards de dollars par les Chinois. Par ailleurs, le coup de pouce de Pékin est loin d’être désintéressé. Cette semaine, le vice-ministre des Affaires étrangères, Fu Ying, a déjà prévenu que les pays européens devront réserver un meilleur accueil aux investissements de son pays et des autres émergents…

Désormais, pour l’eurozone, l’étape suivante consiste, plus que jamais, à créer des eurobonds qui permettraient de mutualiser les dettes publiques nationales. Une proposition visant à réserver dans un premier temps ces euro-obligations aux six pays les plus solides de la zone a été évoquée la semaine dernière par la Commission européenne. Celle-ci doit prochainement présenter un rapport sur la faisabilité de la mesure. On sait que cela entraînerait une plus grande intégration budgétaire et fiscale européenne. L’Allemagne n’y est pas prête : pour Angela Merkel, ce serait une « erreur absolue ». Le sujet n’a en tout cas pas été évoqué au sommet de cette nuit.

Th.D.

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