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Une nouvelle forme de djihadisme en Occident ?

Gérald Papy
Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Le séjour à Bruxelles de Mohamed Merah le démontrerait : l’émergence du « terrorisme individualisé » résulte aussi d’une radicalisation forgée en Europe. L’analyse du spécialiste Mathieu Guidère.

Les attentats de Toulouse (Mohammed Merah, 7 morts, mars 2012), de Boston (Tamerlan et Djokhar Tsarnaev, 3 morts, avril 2013) et de Londres (Michael Adebolajo et Michael Adebowale, 1 mort, 22 mai 2013) inaugurent-ils une nouvelle forme de djihadisme en Occident ? Un « terrorisme individualisé de l’intérieur » plus dangereux car plus difficile à prévenir par les services de renseignements ? Les informations divulguées par Le Parisien-Aujourd’hui sur le séjour de Mohammed Merah à Bruxelles démontrent qu’aucun pays européen n’est à l’abri, pas davantage la Belgique. Spécialiste de l’islamisme radical, Mathieu Guidère, auteur de Les nouveaux terroristes (éd. Autrement), explique les dangers de ce « djihad du pauvre » .

Levif.be : Vous parlez d’un terrorisme situé entre celui des organisations et celui des « loups solitaires ». Les auteurs des attentats de Toulouse, Boston ou Londres ne bénéficiaient-ils tout de même pas d’une forme de soutien d’une organisation ? Mathieu Guidère : Il y a un mouvement d’individualisation du terrorisme. Les auteurs s’inscrivent moins dans des organisations de type Al-Qaeda ou dans des réseaux étendus. Ils ne font même pas partie de cellules qui seraient très facilement repérables. La plupart du temps, ils s’auto-radicalisent sur Internet ou par une réflexion personnelle. Au stade de la planification, en général, des complicités existent : ils peuvent être aidés à acquérir des explosifs et des armes, à repérer les lieux, à acheter des téléphones…Mais dans la phase d’exécution, la plus sensible, les auteurs se résument à l’expression la plus réduite.

La lutte contre ces mouvements en est d’autant plus difficile ?

Il est très difficile de suivre ce type d’individus et de les arrêter avant le passage à l’acte. Les services de renseignements et de sécurité n’ont pas encore fait la révolution qui leur permettrait de prévenir ces actions. Il faut plus d’intelligence, plus de renseignement culturel pour détecter les signaux faibles qui permettent de reconnaître le basculement dans la radicalisation. A chaque fois, les services de renseignement ont perçu quelque chose. Mais comme ce quelque chose ne rentrait pas dans leurs grilles d’analyse et comme les services concernés ne disposaient pas d’assez de compétences linguistiques, culturelles et idéologiques, les individus ont été relâchés.

Vous épinglez dans votre livre un phénomène de mimétisme (copycat). A cette aune, y a-t-il des raisons de redouter une succession d’actes comme ceux de Toulouse et de Londres ailleurs en Europe dans les prochains mois ?

Oui, le phénomène mimétique caractérise cette nouvelle tendance du terrorisme à tel point que l’organisation Al-Qaeda en a fait le titre de son magazine en anglais, Inspire. L’idée est de créer une émulation entre terroristes mais pour le pire et cette logique peut effectivement contaminer les autres pays européens au cours des prochains mois ou années, notamment en raison de la globalisation de l’information.

Lire l’intégralité de l’interview de Mathieu Guidère dans Le Vif/L’Express de cette semaine.

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