Un vrai plan Marshall pour l’Afrique

Les gens de ma génération ont tous en tête la phrase célèbre de Michel Rocard, ancien premier ministre de François Mitterrand qui, non tronquée, donnait ceci : « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde mais on doit y prendre notre part.  »

Elle résume le défi auquel est confrontée l’Union européenne. Car combien sont-ils qui songent à fuir le continent noir et rejoindre l’Europe : dix millions, cent millions ? Sur toutes les ondes, c’est un peu le grand bluff. De distingués démographes nous conseillent, pour éviter les noyades, d’ouvrir les frontières voire de les transporter à nos frais. La commission européenne a abandonné l’idée de couler les bateaux des passeurs. François Fillon songea un moment à les installer sur les plages libyennes dans des tentes. C’était avant que l’Etat islamique n’y rôde.

Mais ensuite ? Tant qu’on n’a pas réglé les problèmes en amont, rien n’arrêtera ce que certains appellent déjà une colonisation à l’envers.

La seule solution, même si elle n’est pas simple, pour stopper ces hordes de miséreux est de développer en Afrique et au Moyen-Orient dans son ensemble un capitalisme social de type européen qui maintienne les populations et les cerveaux sur place. Au menu : prospérité et état de droit.

Quant au premier terme de l’équation, c’est un véritable Plan Marshall qu’il faut à ces deux entités géographiques. Pas le petit plan wallon qu’on doit à Elio Di Rupo mais le vrai, celui qui permit à l’Europe d’après-guerre de renouer avec son niveau de vie d’antan.

C’est ambitieux mais pas impossible

Rappelons que ce programme de redressement économique fut lancé par le général Georges Marshall le 5 juin 1947 à l’Université Harvard. Il fut signé par le président Truman en avril 1948. Sur une période assez courte 1948-1951, il consista en une aide de 13 milliards de dollars (soit environ 250 milliards d’aujourd’hui), en partie en provenance de dons.

En gros, 16 pays européens importaient des produits américains en fonction de leurs besoins et envoyaient la facture aux Etats-Unis en prélevant au passage des droits de douane.

Ce type de projet relève du win-win puisque qu’il dope dans le même temps l’économie du donateur. C’est ainsi que les USA évitèrent grâce au plan Marshall la récession qui faisait suite à la fin des hostilités avec l’Allemagne et le Japon.

Certes, l’aide au développement du continent noir existe déjà : aides d’Etat à Etat, renégociation des dettes publiques, mécénat (45 milliards de dollars de la Fondation Bill Gates…), aide d’urgence et ponctuelle, nombre invraisemblable d’ONG, envois d’argent par les Européens d’origine africaine, etc. Mais ces efforts sont éparpillés et partiellement spoliés par les nomenklatura locales. Ils provoquent bien souvent, à défaut de créer un vrai secteur privé, une dépendance aux aides internationales, peu propice à l’autonomie et la créativité.

Un plan Marshall aurait l’avantage d’apporter un puissant bol d’oxygène d’un seul coup afin de créer une sorte de choc de croissance. L’Europe d’après-guerre avait vu son PIB croître de 30% en 3 ans. Ce baxter serait complémentaire aux investissements privés, américains, européens et chinois existants, qui ont tout de même hissé ces dernières années la croissance économique africaine à 5% l’an, soit bien plus que la croissance européenne.

Bien sûr, l’Afrique est un continent de contraste : le Nigéria et l’Algérie sont richissimes en matières premières et misérables en revenu par habitant, l’Afrique du Sud est plus développée que l’ensemble de ses voisins et certains pays – Somalie,… – n’ont plus qu’une existence théorique. Un plan de redressement tous azimuts devrait en tenir compte. Idem pour le Grand-Moyen Orient : aucune commune mesure entre la Jordanie et le Liban, dépourvues de toute richesse naturelle et les pétromonarchies, plus riches que les pays européens.

Ce qui nous conduit au deuxième terme de l’équation, l’Etat de droit. Certains proposent, d’Afrique même, une mise sous administration onusienne de la fonction publique de certains états. Rien à voir avec du néocolonialisme car cette tutelle serait transitoire, le temps que certains pays se stabilisent.

Car l’Europe de 1950, sous baxter américain, disposait d’une main d’oeuvre hautement qualifiée, d’université, qui font défaut à beaucoup de pays africains, et surtout d’une période de paix qui allait durer plus d’un demi-siècle.

A n’en pas douter, le bonheur de la majorité des Africains et Proche-Orientaux ne réside pas en Europe mais dans leur propre pays à développer leur économie, leur art, leur littérature, leur éducation et… leur indépendance. La raison d’être profonde de l’être humain n’est pas d’émigrer. Il ne le fait que contraint… Endiguons cette fuite des cerveaux qui risque de plomber définitivement le devenir de ces pays !

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