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Un monde meilleur d’ici 15 ans ?

Les dirigeants de la planète devaient adopter vendredi un ambitieux programme promettant un monde meilleur d’ici 15 ans dans tous les domaines (éducation, pauvreté, santé, environnement), au coût incalculable et sans garantie de succès.

A l’ouverture d’un sommet qui doit réunir plus de 150 chefs d’Etat et de gouvernement au siège de l’ONU à New York, ils doivent se fixer 17 Objectifs de développement durable à réaliser d’ici fin 2030, déclinés en 169 « cibles ». Le pape François a auparavant donné le ton en prononçant aux Nations unies un discours mettant l’accent sur l’environnement, l’éducation et la lutte contre l’exclusion. L’objectif numéro un est « d’éliminer la pauvreté sous toutes ses formes »: 836 millions de personnes vivent avec moins de 1,25 dollar par jour, essentiellement en Afrique subsaharienne et en Asie. Il faudra aussi assurer l’accès de tous à l’éducation et à la santé, lutter contre les inégalités, promouvoir les femmes ou la bonne gouvernance. Les pays ont en outre promis de lutter contre le réchauffement de la planète, à quelques semaines d’une conférence climatique à Paris en décembre. Cette liste a été négociée pendant trois ans par les gouvernements avec la participation des ONG et du secteur privé.

Ce chantier pharaonique fait suite aux Objectifs du Millénaire pour le développement (MDG), qui portaient sur la période 2000-2015. Mais il est beaucoup plus ambitieux (trop, disent les sceptiques) que les huit MDG, centrés sur la pauvreté et la santé dans les pays en développement. Le nouveau plan d’action s’appliquera aussi aux pays développés et s’étendra à des domaines politiquement sensibles comme la bonne gouvernance, l’égalité hommes-femmes ou la lutte contre la corruption. Les principales difficultés seront de le financer, de s’assurer que les gouvernements le respectent et de faire que « personne ne soit laissé de côté » dans la course au développement. S’ajouteront à ces défis la forte croissance démographique attendue d’ici 2030 en Afrique subsaharienne, l’urbanisation à outrance ou le vieillissement de la population qui alourdit les comptes sociaux. Et comme le rappelait l’ambassadrice américaine à l’ONU Samantha Power, « une guerre civile dans un pays en développement peut ramener l’économie de ce pays trente ans en arrière ».

Chaque pays restera libre d’appliquer ou non les objectifs et choisira les moyens de le faire. Des indicateurs permettront d’évaluer les progrès accomplis. Il faudra selon les experts trouver entre 3.500 et 5.000 milliards de dollars par an, voire davantage, sur 15 ans. C’est plus que le PIB de la France, du Royaume uni ou de l’Allemagne. Or, l’aide publique au développement accordées par les pays riches aux plus pauvres est en baisse pour cause de crise économique. L’ONU table donc sur une meilleure collecte de l’impôt dans chaque pays et sur la lutte contre la corruption. Elle compte surtout beaucoup (trop, disent à nouveau les sceptiques) sur les investisseurs privés. Il n’est pas sûr que ceux-ci verront dans chaque objectif une promesse de gain et préfereront toujours le bien commun au profit immédiat. Les résultats du précédent plan de développement durable de l’ONU (2000-2015) sont mitigés.

L’extrême pauvreté et la mortalité infantile ont chuté de moitié par rapport à 1990, des maladies comme le paludisme sont en net recul et 92% de la population des pays en développement ont désormais accès à la téléphonie mobile (contre 10% en 2000). Mais l’environnement a souffert de la croissance accélérée en Chine ou en Inde et les inégalités se sont creusées, l’Afrique subsaharienne et l’Asie du sud restant à la traine. Une personne sur quatre est mal nourrie en Afrique subsaharienne (alors qu’on gaspille 1,3 milliards de tonnes de nourriture chaque année dans le monde) et 57 millions d’enfants ne sont pas scolarisés. Deux milliards et demi de terriens n’ont pas accès à des toilettes et 1,3 milliard ne sont pas encore reliés à un réseau moderne d’électricité.

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