© Dino

Turquie: des purges aux motifs « abusifs et discriminatoires »

Les autorités turques procèdent, depuis la tentative de coup d’Etat militaire de juillet 2016, à une vague de licenciements dans le secteur public, dont de nombreux sont basés sur des motivations « abusives et discriminatoires », et contre lesquels les travailleurs lésés n’ont aucune possibilité de recours efficace, s’inquiète l’ONG Amnesty International dans un rapport publié lundi.

Sous couvert de lutte contre le terrorisme, et dans le cadre de l’état d’urgence instauré après le coup d’Etat manqué (puis prolongé à plusieurs reprises), Ankara parvient en fait à marginaliser des dizaines de milliers de personnes, privées de moyens de subsistance.

Selon des témoignages recueillis par l’organisation, il suffit d’avoir été signalé par quelqu’un comme partisan de Fethullah Gülen pour se voir banni de la fonction publique, sans possibilité de se défendre. Parmi les plus de 100.000 employés concernés, on retrouve notamment des médecins, des policiers, des enseignants, des universitaires et des soldats. A la suite de leur licenciement, ces personnes doivent, en majorité, vivre de leurs économies ou s’appuyer sur leurs proches. « De nombreux fonctionnaires licenciés se voient interdire de travailler à titre privé dans des professions réglementées par l’État, comme le droit et l’enseignement. De même, des policiers et des militaires limogés se voient interdire par décret de trouver des emplois analogues dans le secteur privé », explique Amnesty International. La possibilité de se tourner vers un emploi à l’étranger leur est aussi retirée, car les autorités « annulent » les passeports des fonctionnaires renvoyés, qui se retrouvent coincés, sans moyen de subsistance.

Parallèlement, les autorités se montrent pourtant incapables de présenter des critères clairs ou des preuves individualisées de délits pour justifier ces limogeages, note Amnesty International. « Aucune des personnes interrogées par Amnesty International n’a obtenu d’explication, hormis l’accusation collective d’entretenir des liens avec des organisations terroristes ». Une commission censée évaluer les cas de recours « n’est toujours pas opérationnelle », et ne présente de toute manière « ni l’indépendance ni les compétences requises » pour être efficace, observe l’ONG, qui a mené 61 entretiens dans différentes villes turques.

Fethullah Gülen, qui vit en exil aux Etats-Unis, est un ex-allié de Recep Tayyip Erdogan, désormais accusé par le président turc d’avoit notamment fomenté la révolte militaire de juillet dernier.

Contenu partenaire