Gérald Papy

Trump qui divise, Trump qui unit ?

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un ne devait pas décevoir l’espoir qu’il nourrit de marquer sa présidence d’un succès de politique étrangère. La rencontre s’est donc avérée « fantastique » et la relation qu’il a nouée avec son homologue s’annonce « formidable ».

Une fois n’est pas coutume, Donald Trump s’est montré très prévisible.  » Son  » sommet avec Au-delà des amabilités convenues, la dimension historique de la confron- tation n’est pas cette fois-ci galvaudée. On peut saluer le mérite qu’a eu le président américain de comprendre l’extrême importance que revêtait pour l’héritier de la dynastie Kim une reconnaissance politique au plus haut niveau. La rencontre de Singapour n’est pas une garantie de dénucléarisation de la péninsule coréenne. Mais à tout le moins constitue-t-elle un tournant et une promesse de changement.

Le chemin vers une solution négociée sera long et nécessitera des concessions de part et d’autre. Le potentat de Pyongyang nourrit la hantise de subir le sort du Libyen Mouammar Kadhafi que le renoncement aux armes de destruction massive n’a pas préservé d’un renversement orchestré par ceux-là mêmes qui l’avaient réhabilité. Kim Jong-un ne voudra donc rien céder sans contrepartie lui permettant de sauvegarder durablement son régime.

Sept démocraties ridiculisées par sept non-démocraties : sinistre présage pour les droits de l’homme

Cette perspective inquiète paradoxalement plus les alliés de Washington que ceux de Pyongyang, Chine en tête. Jusqu’à quelles concessions Donald Trump est-il prêt à consentir pour forger ce précieux sésame à un prix Nobel de la paix ? Sud- Coréens et Japonais redoutent d’en subir in fine le préjudice en perdant, avec le retrait des troupes américaines, les garanties de sécurité que l’hyperpuissance mondiale leur assurait. Il ne fait donc pas bon être l’allié des Etats-Unis au temps de Donald Trump. Les Européens en témoignent, eux qui ont jugé  » déprimante  » la volte-face de leur partenaire du G7 se désolidarisant du communiqué final du sommet de Québec et qui subissent les désagréments de la guerre des taxes contre leurs produits et de la sortie de l’accord sur le nucléaire iranien.

L’attitude du locataire de la Maison-Blanche irrite donc aujourd’hui d’Ottawa à Londres, de Mexico à Tokyo et jusqu’à Paris où le président Macron doit bien se résoudre à l’inanité de sa stratégie de la câlinothérapie à l’égard de son ami Donald. Elle ravit en revanche Vladimir Poutine qui a beau jeu de se gausser du  » babillage  » des pays du G7 et Xi Jinping qui se délecte déjà de récolter les dividendes de l’accord sur la Corée du Nord. Quand le président américain se perdait en invectives contre le  » faible  » Justin Trudeau qu’il avait pourtant crédité d’un 10/10 quelques heures plus tôt, les huit pays membres de l’Organisation de Shanghaï (1) affichaient leur insolente unité à Pékin. Sept démocraties ridiculisées par sept non-démocraties (l’Inde faisant l’exception), voilà un tableau qui traduit sinistrement la tendance contemporaine à l’illibéralisme, auquel l’Europe n’échappe pas, et qui annonce un basculement de l’ordre mondial qui ne servira pas les valeurs des droits de l’homme. L’histoire jugera la responsabilité du 45e président des Etats-Unis dans ce délitement du monde.

(1) Chine, Russie, Kazakhstan, Kirghizistan, Tadjikistan, Ouzbékistan, Pakistan, Inde.

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