Thierry Bellefroid

« Trump, Macron, De Wever et l’art de la guerre »

Quel dommage que vous soyez mort il y a un peu plus de vingt-cinq siècles ! Enfin, quel dommage pour vous, je veux dire. Quand je vois ce qu’ont pu gagner en une conférence d’anciens présidents ou généraux – de Bill Clinton à Colin Powell en passant par Mikhaïl Gorbatchev -, je me dis qu’un type comme vous aurait gagné à vivre sous une ère plus propice au capitalisme.

Dans votre monde, vous aviez les honneurs. Ici, vous auriez en plus l’argent du beurre et peut-être même les attributs de la crémière. C’est cela, être un précurseur : ne le sont que ceux qui sont nés trop tôt.

Pour ce qui vous concerne, on sait désormais que vous n’avez pas tout inventé dans l’art de la guerre, puisque les fouilles archéologiques ont mis au jour les travaux d’au moins deux autres stratèges chinois très proches de votre pensée. L’un, Wu Zixu, était sans doute votre mentor, un siècle plus tôt. Et l’autre, Sun Bin, était peut-être votre héritier spirituel, un siècle plus tard. Mais c’est votre nom que l’histoire a retenu. Il faut dire que chaque jour qui passe prouve à quel point votre enseignement était juste.

Prenez Donald Trump, par exemple. Bon, à vue de nez, il n’a pas le profil d’un chef de guerre. Voilà un type qui ne tiendrait pas une minute sur un champ de bataille. Mais quand on a un bras armé pour exécuter ses décisions, point n’est besoin d’être entraîné au corps-à-corps. D’ailleurs, les plus grands chefs de guerre n’avaient pas des physiques d’Apollon. Dans son combat stratégique contre la Corée du Nord, Trump prouve en tout cas, semaine après semaine, qu’il applique scrupuleusement votre enseignement. Au chapitre 3 de L’Art de la guerre, n’écrivez-vous pas :  » Le mieux, à la guerre, consiste à attaquer les plans de l’ennemi, ensuite ses alliances ; ensuite ses troupes ; en dernier ses villes.  » Mais votre influence sur le règne très guerrier de l’actuel président américain ne me semble pas que militaire, cher Sun Tzu.  » Dites aux gens ordinaires ce qu’ils veulent entendre « , écrivez-vous également. Il n’y a pas de doute : Trump vous a lu. Ou ses conseillers. Ou sa femme. Ou son fils. Encore que son fils, Don Junior, préfère le russe au chinois.

Mais Donald n’est pas le seul à pouvoir revendiquer votre pensée. Plus près de chez nous, un autre président est allé la confronter à vos descendants. Oui, c’est en Chine qu’Emmanuel Macron a voulu éprouver votre formule :  » Qui connaît son ennemi comme il se connaît en cent combats ne sera point défait. Qui se connaît mais ne connaît pas l’ennemi sera victorieux une fois sur deux. Qui ne connaît ni son ennemi ni lui-même est toujours en danger.  »

Et plus près encore, il y a votre plus fervent disciple, l’historien de l’hôtel de ville d’Anvers. Lui, il a tout lu, dans l’ordre et dans le désordre. C’est sûr. Bart est un expert en matière d’art de la guerre. Attaquez son secrétaire d’Etat préféré. Observez sa réaction. Et prenez une leçon !  » Ne laissez pas vos ennemis s’unir  » est l’une de ses phrases préférées. Mais celle qui résume le mieux sa stratégie est :  » Soumettre l’ennemi par la force n’est pas le summum de l’art de la guerre. Le summum de cet art est de soumettre l’ennemi sans verser une seule goutte de sang.  »

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