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Trump est-il un roi fou ?

Muriel Lefevre

Les agissements de Donald Trump rappellent ceux d’un roi fou. Et comme le précise Slate « lorsqu’on commence à douter de la stabilité mentale d’un monarque, l’histoire ne se finit pas bien pour lui. »

L’entourage de Trump a tout de celui d’une monarchie héréditaire avec des niveaux de pouvoirs informels qui siphonnent ceux plus officiels des institutions de Washington. Loin de la révolution annoncée lors de la campagne présidentielle, on se trouve aujourd’hui face à un pouvoir chaotique qui se contredit jusqu’à atteindre une certaine paralysie. Au point que les voix qui disent que le président pourrait ne pas avoir toute sa tête se font de moins en moins discrètes. Et ceci, comme le rappelle Slate dans son intéressante analyse, n’est jamais le gage d’un règne sans nuages.

La preuve par l’histoire de ces monarques qui après les fastes ont connu une fin sans glorioles

Les exemples ne manquent pas dans l’histoire des monarchies européennes. Suite à une consanguinité certaine – vu qu’ils devaient se marier avec des personnes du même rang, le choix était, il est vrai, limité – la folie n’était certes pas la règle, mais pas non plus une exception. On estime que rien que dans l’Allemagne du XVIe siècle pas moins de 30 nobles régnants furent destitués ou mis sous tutelle médicale pour cette raison.

Ce n’est qu’à partir du XIXe que l’on va clarifier et largement utiliser le terme de démence. Auparavant on parlait de mélancolie ou de déraison. Et certains furent plus démonstratifs que d’autres. Comme Don Julius Caesar d’Austria qui en 1609 « torturera sa maîtresse à mort et déambulera des jours entiers baignant dans son sang et sa cervelle ». Quelqu’un finira par l’étrangler. On soupçonne que ce soit sur ordre de son père. Il y a aussi le duc Albert Frédéric de Prusse qui dormait tout habillé par peur d’être enlevé dans son sommeil par les Turcs. Ou encore l’empereur d’Autriche dans les années 1840, Ferdinand Ier, dont les déficiences mentales étaient connues de tous et qui était capable de crise d’humeur pour des broutilles. Devant le soulèvement populaire, on le somma d’abdiquer.

Il y eut aussi de nombreux cas dans l’histoire de ce qu’on appellerait aujourd’hui dépression. La plupart du temps, on se contentait de garder la façade en se reposant en coulisse sur une personne capable de régner.

Dans les monarchies de droit divin, c’est Dieu qui a mis ce roi sur le trône et un simple mortel ne peut décider qu’il en fut autrement. Du coup, pour y remédier, on laissait le roi défaillant sur le trône et on nommait simplement un régent pour diriger. Un exemple fut le cas du roi George III au début du XIXe siècle. Celui-ci parlait aux arbres et aux fantômes. Son fils assuma la régence avant d’être intronisé roi après la mort de son père. Sauf que ce dernier n’était pas non plus un parangon d’équilibre mental puisqu’il était alcoolique, opiomane et pour le moins extravagant. Son frère finit par lui succéder, mais ce n’était guère mieux puisqu’il soliloquait en rue et tenait des discours sans queue ni tête en société. Il hérita même du surnom enviable de Billy l’imbécile. Néanmoins, malgré cette brochette de gagnants, la monarchie britannique va survivre à cette période grâce aux régents. Une survie qu’elle doit probablement aussi au fait que déjà à l’époque elle n’avait plus beaucoup de pouvoir.

Pouvoir et fin brutale

En réalité, plus les pouvoirs du monarque sont élevés, plus il y a des chances qu’on l’éjecte brutalement. Révolution, meurtre, emprisonnement, mise au couvent,… Les techniques n’ont pas manqué à travers les âges. Ce qui change dans le cas de Trump, c’est qu’il existe aujourd’hui des systèmes constitutionnels qui permettent qu’on ne doive pas en arriver à ce genre d’extrémité. Par exemple : le 25e amendement de la constitution américaine prévoit la destitution d’un président s’il est dans « l’incapacité d’exercer les pouvoirs et de remplir les devoirs de sa charge ». Il s’applique aussi à la déficience mentale. A ceci près que la procédure de l’impeachment est longue et hasardeuse. De quoi refroidir l’enthousiasme de certains républicains.

D’autant plus que Trump n’est peut-être pas fou. Il pourrait tout simplement être incapable de suivre les règles politiques classiques fait encore remarquer Slate. Le président oublie en faisant cela que ces mêmes règles ne sont pas sans fondements. Par exemple, elles sont là « pour éviter le népotisme (la nomination de membres de sa famille à des postes officiels), endiguer la corruption (tirer un profit personnel de ses fonctions publiques) ou pour garantir un degré raisonnable de cohérence et de responsabilité dans la formulation et l’annonce des projets politiques. » dit encore Slate.

Diriger en ignorant ses règles est souvent un aller simple vers une catastrophe annoncée. En poursuivant dans cette voie, il risque de se retrouver de plus en plus isolé et par conséquent menacé.

Reste alors l’option d’une régence officieuse qui a fait ses preuves dans l’histoire. Si le mode actuel de fonctionnement de la Maison-Blanche est celui d’une monarchie avec des niveaux de pouvoirs informels, cela permettrait à des conseillers alliés à sa famille de l’écarter du pouvoir ou du moins de le neutraliser.

Et certains de se demander si ce mouvement ne serait pas déjà en branle conclut Slate.

L’analyse en entier et les anecdotes historiques sont à lire ici.

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