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Tireur de Paris: un solitaire déterminé avec des délires paranoïaques

Le Vif

Au fil de l’enquête, le profil du tireur de Paris se dessine. Les experts psychiatriques, s’ils appellent à la prudence, optent pour « la fuite en avant d’un homme désespéré ».

Qu’y a-t-il dans la tête du tireur de Paris? Au fil de sa traque, le profil du suspect s’affine. Selon l’appel à témoins lancé par la brigade criminelle et les photos diffusées, il s’agit d’un homme au physique banal. De type européen, il est âgé de 35 – 45 ans et mesure entre 1m70 et 1m80. Ses cheveux, ras, sont couleur poivre et sel. Quid de sa personnalité?

Le profil psychologique de l’homme recherché se dessine petit à petit. « Il a été filmé pendant une demi-heure assis sur un banc, donc on voit une personne qui n’est pas encore décidée à passer à l’acte, estimait ce matin au micro de France Info Jean-Louis Fiamenghi, ex-patron du RAID. Puis il entre à BFM et il passe à l’acte. Il a une espèce de malaise, une bouffée qui va le projeter vers l’action qu’il est en train de planifier. Et le fait qu’il agisse avec sang-froid, il ne bouscule pas la vieille personne à BFM, le fait qu’il parte en courant… font qu’on commence à avoir une personnalité précise » de l’homme recherché.

« Ce qui est inquiétant, c’est qu’il y a un temps d’hésitation, de balancement puis un temps de menace et un temps d’exécution, ce qui montre clairement la détermination du suspect », ajoute pour l’AFP Daniel Zagury. L’expert-psychiatre considère que ce comportement solitaire fait penser à « une sorte de fuite en avant d’un homme désespéré ». Cet homme « déterminé » ne connaît pas « de frein au passage à l’acte », surenchérit le commandant Christophe Caupenne, un ex-du Raid, sur FTVi.

L’ambivalence du suspect recherché

Cet individu a « un comportement beaucoup plus rationnel qu’il n’en a l’air, notamment au vu du choix méticuleux des cibles », poursuit Alain Bauer, professeur de criminologie au Conservatoire National des Arts et Métiers, sollicité par l’AFP. Pour autant, nuance le spécialiste, son mode opératoire est « perturbé » car « il semble avoir des difficultés avec le passage à l’acte ou la maîtrise de son armement ». « Il ne tire pas au hasard et ne tire pas toujours », a-t-il rappelé.

Le criminologue Jean-Pierre Bouchard a décrit sur BFM « quelqu’un qui arrive [à BFM] avec une grande détermination » mais qui semble rapidement « perdu ». « Cela pourrait être la projection d’un esprit qui lui-même n’est pas très clair ». Le Pr Michel Bénézech, criminologue et psychiatre, conseiller scientifique pour la police nationale contacté par L’Express, souligne la même ambivalence. Côté pile, une apparente organisation. Il change de tenue entre deux attaques, manie habillement son fusil et parvient, jusqu’à présent, à échapper aux policiers malgré l’important dispositif mis en place pour le retrouver. Côté face, une relative maladresse. « Il se balade avec un fusil, agit à visage découvert et publiquement », note le Pr Bénézech, selon lequel « il prend des risques considérables ».

« Il va recommencer si la police ne l’empêche pas avant »

Dans quel but? « Il n’a rien à gagner si ce n’est de devenir célèbre, ce qui est déjà le cas, désormais », note le Pr Bénézech. Selon l’expert psychiatrique, le tireur est peut-être entré dans une phase de « délire paranoïaque », guidé par des « idées de persécution, voire mystiques ». A-t-il pu subir des préjudices personnels de la part des institutions – médias et banque – visées? « Pas sûr, à moins qu’il ne soit dans une virée politico-mystique très particulière. » Le grand capital et la presse de gauche, visés à dessein? « Il n’y a aucun contexte revendicatif », a martelé lundi le procureur de la République de Paris François Molins lors d’une conférence de presse au palais de Justice.

Toujours en cavale, le tireur peut à nouveau passer à l’acte. « Il est aujourd’hui frustré car son arme s’est enrayée une fois », analyse de son côté la criminologue Lygia Négrier-Dormont, pour Le Figaro. Il a tiré en l’air et (…) le photographe sur lequel il a ouvert le feu est toujours en vie. Selon moi, il va recommencer si la police ne l’empêche pas avant. »
Par Julie Saulnier

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