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Thaïlande: qui sont les manifestants qui veulent la chute du gouvernement?

Le Vif

La pression monte sur le gouvernement tandis que les manifestations se multiplient en Thaïlande. Qui sont ces opposants? Que veulent-ils et quelles sont les suites possibles? Eléments de réponse.

Les manifestants demandant la chute du gouvernement thaïlandais sont unis par leur haine de l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra, frère de la Première ministre Yingluck, chassé par un coup d’Etat en 2006.

Que veulent-ils?

Mobilisés depuis des semaines par le Parti démocrate, principal parti d’opposition, ils réclament la fin du « système Thaksin », en référence à Thaksin Shinawatra, Premier ministre chassé du pouvoir par un coup d’Etat en 2006, accusé de continuer à contrôler la politique depuis son exil, avec sa soeur Yingluck à la tête du gouvernement.

Un projet de loi d’amnistie, taillé sur mesure pour permettre le retour de Thaksin selon les manifestants, a mis le feu aux poudres fin octobre. Mais depuis, malgré le rejet de la loi par le Sénat, les manifestants voient plus large, réclamant la chute du gouvernement, sans que leur stratégie sur l’après-chute soit claire.

Quelles sont les forces en présence?

La Thaïlande est divisée depuis des années entre deux tendances, souvent résumées à « chemises rouges » contre « chemises jaunes ».
Les « chemises rouges », partisans du parti au pouvoir Puea Thai, réunissent masses rurales et urbaines défavorisées du nord et du nord-est du pays, fidèles à Thaksin. Plusieurs milliers de « rouges » sont rassemblés depuis dimanche dans un stade de Bangkok en soutien au gouvernement. Les manifestations des « chemises jaunes » ont été un élément clef du coup d’Etat contre Thaksin en 2006 et elles ont également aidé à chasser du pouvoir deux chefs de gouvernement pro-Thaksin en 2008.

L’organisation n’est plus vraiment active, même si on retrouve certains de ses membres dans les actuelles manifestations. Ils sont traditionnellement alliés au Parti démocrate, rassemblant les élites de Bangkok gravitant autour du palais royal. Le principal meneur des manifestants est Suthep Thaugsuban, figure du Parti démocrate. Un mandat d’arrêt a été émis contre lui pour l’occupation d’un ministère. Le Parti démocrate ne se met pas en avant en tant que force organisatrice, et Suthep a récemment démissionné du parti pour éviter des poursuites contre sa formation. Le chef du parti, Abhisit Vejjajiva, fait néanmoins des apparitions sur la scène du Monument de la Démocratie, base arrière où campent les manifestants.

Ceux-ci sont d’horizons différents. On y croise des cadres bangkokiens qui viennent manifester après leur journée de travail mais aussi des cultivateurs de caoutchouc du sud de la Thaïlande convoyés en bus et nourris par les organisateurs. Des groupes disparates se joignent aux manifestations, comme les ultra-royalistes de l’Armée du peuple pour renverser le régime Thaksin ou le Réseau des étudiants et citoyens pour la Thaïlande.

Quelles possibles suites?

1. L’expulsion des manifestants des ministères et la répression des manifestations par les forces de l’ordre. Un scénario que les autorités cherchent à éviter.
2. La descente dans la rue des « chemises rouges » pour en découdre avec leurs opposants.
3. L’appel à des élections anticipées par la Première ministre, la motion de censure examinée mardi au Parlement n’ayant pas de chance d’aboutir (le parti au pouvoir étant majoritaire). Yingluck ne peut cependant pas dissoudre l’assemblée avant la fin du débat sur la motion, prévu jeudi.
4. Un coup d’Etat militaire, comme en 2006. Un scénario qui n’a rien d’exceptionnel dans un pays qui a connu 18 coups d’Etat ou tentatives depuis 1932, date où la Thaïlande est devenue une monarchie constitutionnelle. Pour l’heure, l’armée n’a pas donné de signe en ce sens.
5. Une décision de la Cour constitutionnelle, comme en 2008, quand elle avait dissout le parti du Premier ministre Somchai Wongsawat, beau-frère de Thaksin, en un « coup judiciaire » qui avait permis aux Démocrates de prendre le pouvoir.
6. L’essoufflement du mouvement de protestation à l’approche de l’anniversaire du roi, le 5 décembre. Après des semaines de mobilisation, l’opposition serait victime de sa stratégie de l’usure.
7. Le roi Bhumibol est intervenu lors de crises dans les années 1970 et 1990. Mais le monarque de 85 ans ne s’exprime plus que rarement en public.

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