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Thaïlande: l’ex-Premier ministre inculpé pour meurtre lors des émeutes de 2010

L’ancien premier ministre Abhisit Vejjajiva a été inculpé, ce jeudi, pour la mort d’un civil lors des manifestations de 2010, tandis que 24 leaders du mouvement des « chemises rouges » sont accusés de « terrorisme ».

L’ancien Premier ministre thaïlandais Abhisit Vejjajiva a été inculpé pour meurtre jeudi pour sa responsabilité dans la mort d’un civil abattu par l’armée lors des manifestations de 2010, un dossier symbole de la fracture politique qui menace constamment d’embraser le royaume.

Cette crise, la plus grave qu’ait connue la Thaïlande moderne, avait fait quelque 90 morts et 1900 blessés. Jusqu’à 100 000 « chemises rouges », fidèles à l’ancien chef du gouvernement en exil Thaksin Shinawatra, avaient occupé le centre de Bangkok pendant deux mois au printemps 2010 pour réclamer la démission d’Abhisit avant d’être délogés par l’armée. Abhisit est poursuivi avec son vice-Premier ministre, Suthep Thaugsuban. Mais « tous deux nient les accusations retenues à leur encontre », a indiqué Thavorn Senniem, figure du Parti démocrate auquel ils appartiennent. Premiers dirigeants de l’époque inquiétés dans ce dossier, ils sont passibles, en théorie, de la peine capitale.

Abhisit et son plus proche collaborateur sont poursuivis en lien avec le décès de Phan Kamkong, chauffeur de taxi. Il avait été touché en mai 2010 par des tirs « provenant d’armes de personnels militaires », avait estimé une cour criminelle en septembre. Le ou les soldats responsables n’ont pas été identifiés. Abhisit assure ne rien avoir à se reprocher. « Je pense que beaucoup de gens comprennent les efforts que j’ai faits pour éviter les pertes. A ce moment-là, il était du devoir du gouvernement de restaurer l’ordre, » a-t-il récemment expliqué.

Procès de 24 leaders pro-Thaksin

Il a aussi indiqué préférer une condamnation que de « négocier » avec le gouvernement. Une référence au projet de la majorité de faire voter une amnistie des violences politiques depuis 2005, qui profiterait à Thaksin Shinawatra. Le héros des « rouges » et frère de l’actuelle Première ministre Yingluck Shinawatra vit en effet à Dubaï pour échapper à une condamnation à deux ans de prison et à des poursuites pour « terrorisme ».

Par ailleurs, le procès pour « terrorisme » de 24 leaders « rouges », dont cinq députés du parti pro-Thaksin désormais au pouvoir qui devait s’ouvrir ce jeudi a été reporté à vendredi. Le royaume reste profondément divisé entre les pro-Thaksin, renversé par un coup d’Etat militaire en 2006, et ceux qui le voient comme un danger pour la monarchie. Une fracture à l’origine des manifestations de masse, qui ont fait et défait plusieurs gouvernements ces dernières années, et derrière lesquelles s’affrontent d’un côté, les masses rurales et populaires du nord et du nord-ouest du pays, pro-Thaksin, et de l’autre, les élites de la capitale, qui le haïssent. Les deux camps s’affrontent ainsi par procédures interposées, selon le politologue Thitinan Pongsudhirak. Il qualifie cette inculpation de « progrès » pour le pays: « C’est la première fois que des dirigeants sont tenus pour responsables de la mort de manifestants ».

LeVif.be avec L’Express

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