L'émissaire de l'ONU Staffan de Mistura © Reuters

Syrie: les discussions ouvrent à Genève

Le Vif

L’enjeu est énorme et les espoirs ténus: des pourparlers sous l’égide de l’ONU ont débuté vendredi à Genève pour tenter de mettre un terme à la tragédie syrienne.

Les négociations ont démarré en fin d’après-midi par une rencontre entre l’émissaire spécial de l’ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, et une délégation du régime de Damas menée par l’ambassadeur de Syrie à l’ONU, Bachar al-Jaafari.

La délégation syrienne d’une quinzaine de membres et les représentants de l’ONU se sont réunis autour d’une grande table rectangulaire, MM. de Mistura et Jaafari se faisant face. Aucune déclaration n’a été faite avant le début de la rencontre.

Un coup d’envoi modeste, sans cérémonie ni discours, pour ce dialogue, arraché au forceps sous pression de la communauté internationale et prévu pour durer six mois.

Les grandes puissances espèrent que les Syriens parviendront à mettre un terme à une guerre qui a fait plus de 260.000 morts et des millions de réfugiés et déplacés depuis mars 2011.

Selon la feuille de route, fixée dans une résolution de l’ONU en décembre, les Syriens doivent se mettre d’accord sur un organe de transition chargé d’organiser des élections à l’horizon mi-2017.

Selon le Programme alimentaire mondial (PAM), 18 zones sont assiégées en Syrie, et plus de 4,6 millions de personnes ont peu ou pas accès à l’aide humanitaire.

L’opposition syrienne finalement présente

L’opposition syrienne, réunie depuis quatre jours à Ryad, a finalement décidé vendredi soir de participer aux pourparlers de paix, a affirmé un haut responsable de l’opposition.

Il a précisé que le Haut comité des négociations (HCN), une large coalition d’opposants politiques et de groupes armés syriens formée en décembre en Arabie saoudite en perspective des discussions de Genève, enverrait « environ 30 à 35 personnes » aux pourparlers. . Le HCN avait refusé d’entamer les négociations tant que les bombardements de civils et le siège de localités se poursuivraient.

La délégation de l’opposition se rendra à Genève mais elle ne négociera pas, a souligné le HCN dans un tweet. « Le HCN confirme qu’il va à Genève pour participer aux discussions avec l’ONU, et non pas pour des négociations », affirme l’opposition sur Twitter.

Le chef de la délégation du HCN, Assaad al-Zoabi, a pour sa part expliqué sur la chaîne Sky News Arabia basée à Abou Dhabi, que l’opposition a décidé de participer aux pourparlers de Genève après avoir reçu des garanties notamment des Etats-Unis et de l’Arabie saoudite sur l’application des mesures humanitaires prévues par la résolution 2254 du Conseil de sécurité de l’ONU.Cette résolution stipule notamment un arrêt des bombardements des zones civiles et un accès aux localités assiégées.

La délégation devrait être à Genève samedi soir ou dimanche matin, a-t-il ajouté.

‘Même combat’

Le sort du président Bachar al-Assad, sur lequel ont achoppé de précédentes négociations, est la question la plus épineuse à plus long terme, l’opposition souhaitant son départ dès la formation de l’autorité de transition, ce que le régime et ses alliés russes et iraniens refusent.

Quelques dizaines de manifestants s’étaient réunis vendredi après-midi devant le siège de l’ONU à Genève pour scander: « al-Assad, Al-Qaïda, mêmes méthodes, même combat ». « Assad n’est pas la solution au terrorisme, il en est la cause », ont-ils ajouté.

Les puissances occidentales, qui ont longtemps réclamé le départ du président syrien accusé d’être le boucher de son propre peuple, ont infléchi leur discours face à la percée du groupe Etat islamique (EI) considéré comme la menace principale.

Une coalition menée par les Etats-Unis mène des raids aériens sur les positions de l’organisation jihadiste en Irak et en Syrie. Vendredi, les Pays-Bas ont annoncé qu’ils allaient aussi frapper en Syrie.

Rohani sceptique

L’ONU a prévu des discussions indirectes, les parties étant dans des salles séparées, des émissaires faisant la navette entre les deux.

Mais même si le HCN se décidait à jouer le jeu, il resterait à préciser son rôle par rapport à celui d’autres opposants, invités à titre individuel par l’ONU et qui se disent déterminés à participer au dialogue au même titre que le groupe de Ryad.

La question de la représentation des Kurdes reste également en suspens. Le PYD, principal parti kurde, n’a pas été invité aux pourparlers, au grand dam de Moscou.

Considéré par la Turquie comme une émanation du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), l’ennemi numéro 1 d’Ankara, le PYD syrien est en pointe sur le terrain contre les jihadistes de l’EI, mais il est soupçonné par l’opposition syrienne de complaisance envers le régime de Damas.

Pour toutes ces raisons, l’Iran, acteur majeur du conflit syrien, engagé aux côtés du régime de Damas, a douté d’une issue politique rapide.

« Cela m’étonnerait que (les négociations) aboutissent très tôt, parce qu’en Syrie il y a des groupes qui font la guerre au gouvernement central mais aussi entre eux. Il y a des ingérences dans les affaires intérieures de la Syrie », a déclaré le président iranien Hassan Rohani à plusieurs médias français.

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