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Syrie: « La grande bataille pour la libération de Raqa a commencé »

La force arabo-kurde soutenue par les Etats-Unis a lancé dimanche une grande offensive pour reprendre Raqa, « capitale » du groupe Etat islamique en Syrie, accroissant la pression sur les jihadistes déjà acculés à Mossoul en Irak.

Distantes de près de 400 km, Mossoul et Raqa sont les deux dernières grandes villes contrôlées par l’EI, qui a perdu une grande partie des territoires conquis en 2014 en Syrie et en Irak.

« La grande bataille pour la libération de Raqa et de sa province a commencé », a annoncé la porte-parole de l’offensive Jihan Cheikh Ahmad, à Aïn Issa, une localité située à une cinquantaine de km au nord de Raqa.

« La bataille ne sera pas facile (…) mais il faut (…)entraver la capacité du groupe à mener des attaques terroristes contre les Etats-Unis, nos alliés et nos partenaires », a déclaré le secrétaire à la Défense américain Ashton Carter.

Baptisée « Colère de l’Euphrate », l’offensive a débuté samedi soir sous la houlette des Forces démocratiques syriennes (FDS), alliance anti-EI dominée par les Kurdes, mais qui comprend aussi des combattants arabes.

Depuis, cette force s’est emparée de 10 villages et de plusieurs hameaux, a indiqué à l’AFP en fin d’après-midi Mme Ahmad, jointe par téléphone de Beyrouth.

Le correspondant de l’AFP présent à la conférence de presse a vu des dizaines de combattants se diriger à bord de véhicules vers le front. Aïn Issa est la position des FDS la plus proche de Raqa.

Sur une colline désertique à un kilomètre d’Aïn Issa, il a pu voir au moins un soldat portant un écusson américain sur son casque avec des combattants des FDS, près d’un véhicule tout terrain transportant du matériel militaire.

« Raqa sera libérée grâce à ses enfants (…) arabes, kurdes et turkmènes, des héros combattant sous la bannière des FDS, avec la participation active des Unités de protection du peuple kurde (YPG) et des Unités de protection de la femme (YPJ), en coordination avec la coalition internationale », a déclaré la porte-parole de l’offensive.

‘Nous vaincrons’

Ces combattants veulent libérer Raqa « des forces du terrorisme mondial et obscurantiste », a-t-elle ajouté.

« Nous vaincrons comme à Kobané, Tall Abyad, Hassaké, al-Hol, Chaddadé et Minbej », a renchéri Mme Ahmad, en référence aux villes perdues par l’EI en Syrie au cours des derniers mois.

Elle a précisé à l’AFP que les FDS ont avancé de 10 km à partir de deux axes partant du nord de Raqa depuis les localités d’Aïn Issa et de Suluk.

A Raqa, où les jihadistes sont implantés au sein de la population, l’EI défendra son bastion car il sait que sa perte signifie sa fin en Syrie », a prévenu Talal Sello, porte-parole des FDS basé à Hassaké (nord-est).

Le groupe a fait exploser une voiture piégée conduite par un kamikaze près de Suluk, affirmant avoir fait 14 morts parmi les combattants des FDS. L’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH) a fait état de blessés mais pas de morts selon un bilan provisoire.

L’opération de reconquête se déroulera en « deux étapes: libérer la province de Raqa pour isoler la ville, puis contrôler la ville », selon M. Sello.

La coalition menée par les Américains « a fourni une première livraison d’arsenal et d’équipements, dont des armes anti-char », a précisé M. Sello. Tandis que « près de 50 conseillers et experts américains sont présents dans le centre d’opérations », selon une source au sein du commandement des FDS.

D’après des responsables américains, les FDS sont formés de 30.000 combattants, deux-tiers kurdes et le reste arabe.

Forte résistance à Mossoul

Les FDS ont été promus par Washington comme un allié clé dans la lutte contre l’EI, mais cette alliance est compliquée par l’opposition féroce aux YPG des Turcs, allié des Américains au sein de l’Otan.

M. Sello a affirmé que les FDS se sont mises d’accord avec les Etats-Unis sur le fait « qu’il n’y aura aucun rôle turc ou des rebelles qui leur sont alliés dans l’offensive » de Raqa.

En août, le président turc Recep Tayyip Erdogan avait indiqué que l’opération lancée par son armée pour chasser de la frontière syro-turque l’EI mais aussi les combattants kurdes, allait s’étendre à Raqa, située à une centaine de km de la frontière turque.

Dans ce contexte, « la question (de la reprise de Raqa) est loin d’être réglée. Qui appuie qui? Qui fait quoi? Tout cela n’est pas très clair », a commenté une source sécuritaire en France, un pays qui fait partie de la coalition.

Ankara veut également jouer un rôle dans la bataille de Mossoul, qui entre lundi dans sa quatrième semaine.

Les forces d’élite irakiennes combattent rue après rue les jihadistes dans les quartiers est de la ville, où « la résistance est très forte », a déclaré à l’AFP le lieutenant-général des forces d’élite (CTS) irakiennes, Abdelghani al-Assadi.

D’autres unités se rapprochent de la ville par le nord et le sud.

Ces combats poussent un nombre croissant de civils à fuir, alors que les organisations humanitaires redoutent le déplacement massif de plus d’un million de personnes prises au piège à Mossoul.

« Nous avons marché plusieurs kilomètres, avec seulement les vêtements que nous avions sur nous, et nous avons agité des drapeaux blancs tout au long du chemin », raconte Abou Sara, un habitant de Mossoul de 34 ans.

Avec 1,5 million d’habitants, la deuxième ville d’Irak est beaucoup plus importante que Raqa, qui comptait avant le début du conflit en 2011 environ 240.000 habitants et après la guerre. De nombreux jihadistes étrangers et leurs familles s’y sont installés.

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