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Syrie: appel à « cesser de parler et à agir »

Alors que Damas nie tout crime contre l’humanité, les bombardements redoublent à Homs. Le ministère syrien des Affaires étrangères a « catégoriquement » rejeté les accusations de « crimes contre l’humanité » lancées à l’ONU, au moment où la répression s’intensifiait sur le terrain, tuant 18 civils à travers le pays.

Dans la ville rebelle de Homs, le régime a lancé son assaut le plus violent sur la « capitale de la révolution » dans le centre du pays, pilonnée sans répit depuis des jours, faisant six morts, selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Damas a accusé le Haut commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme d’être « manipulé par certains pays qui veulent nuire à la Syrie et qui ignorent les crimes terroristes commis par les groupes armés », rejetant « catégoriquement » rejeté ses accusations de crimes contre l’humanité.

« La Syrie rejette catégoriquement le communiqué du Haut commissariat de l’ONU qui contient de nouvelles allégations concernant la Syrie », a indiqué le ministère syrien dans une lettre à l’ONU.

Lundi, la Haut commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Navi Pillay, avait estimé que « la nature et l’étendue des exactions perpétrées par les forces syriennes indiquent que des crimes contre l’humanité ont vraisemblablement été commis ». Elle a dénoncé « une campagne large et systématique d’agression contre les civils » avec « l’aval ou la complicité des autorités au plus haut niveau », devant l’Assemblée générale de l’ONU.

Mardi, au total 23 personnes, dont 18 civils et cinq soldats de l’armée régulière, ont été tuées en Syrie par les forces du régime ou lors de combats entre déserteurs et militaires, a rapporté l’OSDH.

A Homs, troisième ville du pays où plus de 300 personnes ont péri depuis le 4 février dans une « attaque sans discernement contre des zones civiles » selon l’ONU, le temps presse et la crise humanitaire est de plus en plus intenable. « La situation est tragique », a affirmé à l’AFP Hadi Abdallah, militant du « Conseil de la révolution de Homs », indiquant que les gens sont « entassés dans les abris » et « les morts enterrés depuis une semaine dans les jardins car même les cimetières et les tombes sont visés ».

Devant le Parlement européen, un jeune opposant syrien a appelé les Occidentaux à « cesser de parler et à agir » pour Homs, où, selon lui, les troupes du régime « prennent en joue n’importe qui » dans les quartiers insurgés. « Les soldats kidnappent femmes et enfants, violent des femmes et les tuent. Il s’agit de crimes contre l’humanité (…) Il n’y a que cinq médecins pour soigner les blessés », a déclaré Danny Abdul Dayem, surnommé « la voix de Homs » pour ses vidéos et ses témoignages télévisés en direct.

Face à l’aggravation de la crise, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a annoncé mardi que Paris allait créer un fonds d’urgence humanitaire pour la Syrie doté d’un montant d’un million d’euros, après une rencontre avec des ONG impliquées dans ce pays.

Les condamnations se succèdent sans qu’une véritable issue ne pointe à l’horizon après onze mois de contestation populaire réprimée dans le sang, au prix de plus de 6.000 morts, selon des militants. La chancelière allemande Angela Merkel a évoqué de nouvelles sanctions européennes contre Damas, affirmant que l’Union européenne soutenait la « position ferme » de la Ligue arabe.

Profondément divisée sur la Syrie, la communauté internationale étudie la proposition d’une force de paix avancée dimanche par la Ligue arabe. Après avoir mis en garde contre toute action « à caractère militaire », la France a annoncé vouloir étudier avec ses partenaires de l’ONU « toutes les options mises sur la table par la Ligue arabe », y compris celle d’envoyer des Casques bleus en Syrie, selon la diplomatie française.

Moscou a exigé un cessez-le-feu et Washington souligné qu’en l’absence de paix, une telle initiative était compliquée. La Russie et la Chine bloquent au Conseil de sécurité de l’ONU toute résolution condamnant la répression en Syrie. Un émissaire chinois Li Huaxin a rencontré mardi le secrétaire général de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, a annoncé Pékin assurant ne protéger « aucune partie, y compris le gouvernement » à Damas.

Burhan Ghalioun, chef du Conseil national syrien (CNS), principale instance de l’opposition, a vu dans les récentes décisions de la Ligue arabe « les premiers pas » vers la chute du régime. Le CNS doit se réunir mercredi à Doha pour désigner un nouveau président ou prolonger dans ses fonctions M. Ghalioun, a indiqué à l’AFP la porte-parole Basma Kodmani.

La Ligue arabe avait annoncé, outre l’idée d’une force conjointe avec l’ONU, son soutien politique et matériel à l’opposition. Arabes et Occidentaux doivent lancer cette semaine une nouvelle tentative pour faire condamner Damas, cette fois à l’Assemblée générale de l’ONU –organe consultatif où le veto n’existe pas. Moscou et Pékin devraient une fois encore s’opposer à ce projet, préparé par l’Arabie saoudite et le Qatar, très similaire au texte bloqué par leur double veto le 4 février.

LeVif.be, avec Belga.

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