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Syrie : à Alep les civils vivent « des atrocités inimaginables »

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

Plus de quatre ans après le début de la crise en Syrie, une résolution du conflit semble de moins en moins à portée de mains. Toutes les parties continuent de commettre de sérieuses violations du droit international. La population civile reste la première victime de ces violences, relate Amnesty International dans un rapport publié mardi.

L’ONG a tenté d’en savoir plus sur les souffrances endurées par la population d’Alep, particulièrement touchée par le conflit. Elle s’est penchée sur les violations commises par les groupes armés gouvernementaux et non étatiques dans la ville et sa banlieue depuis janvier 2014.

Pour rédiger son rapport, Amnesty a interrogé 78 résidents d’Alep (anciens et actuels) et 29 professionnels travaillants dans ou sur la ville. Elle a également analysé de nombreuses photos et vidéos.

Les conclusions de ce rapport sont sans équivoque : « les habitants d’Alep souffrent d’inimaginables atrocités ». Le gouvernement syrien et les différents groupes armés commettent également des crimes de guerre. Dans certains cas, les actions du gouvernement constituent même des crimes contre l’humanité, dénonce l’ONG.

Des attaques systématiques des civils

Les zones civiles contrôlées par l’opposition ont été bombardées sans distinction, selon Amnesty. Des maisons, des hôpitaux, des écoles, des marchés bondés et des lieux de culte ont été détruits par des attaques aériennes lancées par les forces gouvernementales.

L’armée de Bachar Al-Assad a utilisé des « bombes-baril ». Il s’agit de tonneaux remplis de pétrole ou de bombonnes gaz, chargés d’explosifs et de fragments métalliques pour accroitre leur effet létal. Ces bombes auraient tué au moins 3124 civils et 35 combattants à Alep entre janvier 2014 et mars 2015. Le régime continue de nier l’utilisation de ces explosifs, comme l’a affirmé Bachar Al-Assad dans sa récente interview à France 2.

Selon le rapport d’Amnesty, ces campagnes de bombardement du gouvernement prenaient délibérément les civils pour cibles, ce qui constitue un crime de guerre. Mais une telle attaque systématique de la population civile, lorsqu’elle est effectuée dans le cadre de la politique du gouvernement comme cela semble avoir été le cas à Alep, constituerait également un crime contre l’humanité.

Des attaques « à l’aveugle » dans les quartiers résidentiels

Amnesty et d’autres groupes d’observation ont également documenté les attaques des groupes d’opposition sur les quartiers résidentiels dans les zones d’Alep tenues par le gouvernement. Il apparait que des armes imprécises, telles que des mortiers, ont été utilisées dans ces quartiers, alors que « ces armes ne devraient jamais être utilisées dans des zones à forte concentration de civils ». « Compte tenu de la nature de ces armes, nombre de ces attaques sont susceptibles de constituer des attaques à l’aveugle », dénonce Amnesty qui parle, dans ce cas également, de crimes de guerre.

L’ONG a également dénombré, depuis janvier 2014, des détentions arbitraires, des disparitions forcées, des cas de torture et d’autres mauvais traitements sur des civils par le gouvernement à Alep. Elle relève également des milliers de cas similaires à travers la Syrie depuis 2011. De nombreux groupes non étatiques ont également procédé à des enlèvements et des prises d’otage et d’autres types de mauvais traitements.

Des conditions de vie épouvantables

En plus de subir ces graves violences, les habitants d’Alep vivent dans des conditions épouvantables. Les résidents des zones contrôlées par le gouvernement et celles contrôlées par l’opposition sont privés d’eau et d’électricité. Ils manquent également de nourriture, de médicaments et de gaz pour chauffer les habitations.

Si les bombardements du gouvernement ont quelque peu diminué entre septembre 2014 et mars 2015, ils ont repris depuis et continuent de se produire quotidiennement. Amnesty International appelle donc à cesser les bombardements dans les deux camps sur les zones civiles, ainsi qu’à mettre fin aux enlèvements et à la torture. L’ONG réclame également un accès sans entrave à l’aide humanitaire à Alep, mais également sur tout le territoire syrien.

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