La contraception permettrait de dissimuler les possibles agressions sexuelles commises par des agents de recrutement. © Getty Images/iStockphoto

Sri Lanka : Interdiction de grossesse pour les femmes qui veulent travailler à l’étranger

Stagiaire Le Vif

Au Sri Lanka, les femmes de ménage qui migrent au Moyen-Orient pour travailler sont forcées par leur agence de prendre des contraceptifs avant de partir, révèle The Guardian.

« Garanti sans grossesse« , telle est la formule qu’employaient six recruteurs désormais licenciés lorsqu’ils proposaient les services de leurs employées sri-lankaises – des femmes de ménage – à leurs clients étrangers. Un service « garanti trois mois » selon The Guardian.

Pour s’en assurer, les agents de recrutement obligent les femmes à prendre des contraceptifs avant de partir dans le Golfe. L’un de ces agents, un employé du Gulf Jobs à Colombo (capitale du Sri Lanka), a déclaré au journal anglais: «  Les femmes envoyées en mission doivent subir un contrôle médical réalisé par le gouvernement et sur lequel les agences n’ont aucun recours. Mais une fois le test médical effectué, rien ne les empêche de donner des contraceptifs« .

Seul soutien familial

Ces femmes n’ont souvent pas d’autre choix que d’obéir : elles ont besoin de ce travail pour soutenir leur famille dévastée par les conflits. La longue guerre civile a en effet coûté la vie à des dizaines de milliers de maris, de pères et de frères, et a causé de graves blessures à d’innombrables autres combattants. Les femmes sont souvent le dernier espoir de leur famille.

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Au cours de son enquête, The Guardian a constaté que de nombreuses agences de recrutement fournissent du Depo-Provera, un contraceptif injectable et qui a duré d’action de trois mois. Pour Rahini Bhaskaran, coordinatrice de Migrants Network, une organisation de défense des droits des migrants, les femmes étaient si désespérées d’obtenir un travail qu’elles se sont mises à répondre aux exigences des recruteurs sans se poser de question : « La plupart des femmes ne savent pas à quoi servent les injections« , a-t-elle précisé dans le journal anglais. « On ne leur dit rien à ce sujet« .

Le contraceptif pour cacher les violences sexuelles

La coordinatrice est persuadée que les recruteurs ont deux objectifs lorsqu’ils obligent leurs employées à se faire « stériliser » pour une durée de trois mois. Outre d’offrir la garantie aux employeurs du Golfe que les travailleuses ne tomberont pas enceintes, la contraception permettrait aussi de dissimuler les possibles agressions sexuelles commises par des agents de recrutement : « Certaines femmes pensent qu’il est nécessaire d’avoir des relations sexuelles pour aller à l’étranger. Les agents amadouent ces femmes, en leur promettant même parfois le mariage, avant d’abuser d’elles » .

« Elles sont traitées comme des marchandises »

Selon Swairee Rupasinghe, coordinatrice des migrations de main d’oeuvre à l’Organisation internationale du travail au Sri-Lanka, interdire une grossesse chez les femmes de ménage serait surtout lié à un impératif économique. «  Les agences de recrutement rendent la contraception obligatoire, c’est parce que si l’une de leurs employées était enceinte, ce seraient à elles de supporter le coût du rapatriement de la femme « , a-t-elle déclaré.

« Les femmes de ménage qui migrent dans le Golfe sont traitées comme des marchandises par leurs agences et leurs employeurs, dans la mesure où leur corps et leurs choix ne leur appartiennent plus. Quand elles entrent sur le marché de l’emploi, c’est ce jeu de pouvoir qui permet à l’exploitation et à l’abus de prospérer« , a notamment expliqué Rothna Begum, chercheuse en droits des femmes à l’organisme Human Rights Watch.

Chavagne Mailys

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