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Sotchi: enjeux divers

Sotchi, ses Jeux, son paysage, ses athlètes. Ça, c’est pour le côté pile. Côté face, il y a les menaces, les polémiques, les railleries et le gigantisme. Depuis son arrivée au pouvoir, Vladimir Poutine s’efforce de rendre à la Russie son lustre d’antan. Les JO 2014 ou la Coupe du Monde 2018 doivent être des vitrines pour le pays. Mais dans un contexte géopolitique tendu, les détracteurs tirent à tout va.

Si une zone de contestation, la « protest zone », a été installée par l’organisation russe à 18 kilomètres du village olympique, ce n’est pas par hasard. Les motifs de mécontentement sont nombreux.

Le Budget

Ces 22ièmes Jeux Olympiques d’hiver auraient coûté 37 milliards d’euros. C’est qu’à Sotchi, il a tout fallu construire. La station balnéaire n’était pas une station de ski. Mais ce chiffre interpelle tout de même, en comparaison avec les précédentes éditions. En 2010, Vancouver avait investi 1,4 milliard, Turin en avait dépensé 3,4 milliards en 2006.

De nombreuses accusations de corruption ont alors fait surface. Le 8 janvier, un membre du CIO, Gian-Franco Kasper déclarait à la télévision suisse « qu’un tiers du budget des JO aurait été détourné en pots-de-vin et commissions occultes. » Un tiers, c’est également le chiffre qu’annonce un entrepreneur du bâtiment, Valeri Morozov, qui a participé à une partie de la construction avant de se réfugier à Londres.

En 2013, c’était l’opposant politique Boris Nemstov, un ancien ministre, qui remettait deux rapports. «  Les Jeux olympiques sont un projet personnel pour Poutine et il est clair que ceux qui ont volé l’argent sont ceux qui sont proches de ce même Poutine« , disait-il en substance.

Si cette proportion de 30% est exacte, cela représenterait le PIB de la Jamaïque ou du Sénégal.

La menace terroriste

Le régime russe n’a pas que des alliés dans sa région. Dans les républiques russes du Caucase du Nord, prospère un mouvement islamiste radical. À quelques kilomètres seulement de Sotchi.

La figure de proue de ce mouvement, Dokou Oumarov, a prévenu : il usera « de tous les moyens » pour entraver la bonne marche des JO.
Fin décembre, deux attentats ont été perpétrés en Russie, à quelques centaines de kilomètres de là.

Les droits des homosexuels

Mercredi, 19 villes dans le monde ont été le théâtre de manifestations contre les lois homophobes promues en juin dernier en Russie. Il s’agit là de l’un des points de contestations majeurs de ces jeux. Une tache de cambouis tenace sur le smoking -blanc comme neige, évidemment- que la Russie tente de vendre à Sotchi.

Cette grogne ne se limite pas aux mouvements gay et lesbiens dans le monde. De nombreux athlètes ont pris des positions fermes ces dernières années, menaçant de boycott ou affichant ostensiblement leur mépris pour ces lois. Une pétition a circulé chez les sportifs.

Une kyrielle de chefs d’État ont également pris leur distance avec ces Jeux. À l’heure où 17 pays et 18 États américains ont adopté le mariage gay, la loi stigmantisant les homosexuels adoptée par le gouvernement de Vladimir Poutine passe mal. Obama ou Hollande, chefs d’États représentés par de nombreux athlètes lors de ces Jeux, ne se rendront en tout cas pas à Sotchi.

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-Moon a invité publiquement le monde à s’élever « contre les attaques sur les lesbiennes et les gays« , lors d’une intervention durant la session du CIO à l’aube de l’ouverture des Jeux.

Le conflit en Ukraine

S’il n’a pas de rapport direct avec les Jeux, le conflit qui oppose pro-Européens et pro-régime en Ukraine ne rapproche certainement pas l’Europe et la Russie.
En pleine bataille stratégique entre l’Union européenne et la Russie autour de l’Ukraine, de nombreux dirigeants auront sans doute à coeur de ne pas s’exposer de trop au côté de Vladimir Poutine.

Les travaux

Rien n’aura été épargné aux habitants à Sotchi. Coupures d’électricité, embouteillages sur l’unique route qui longe la mer, glissements de terrain et travaux anarchiques ont rythmé le quotidien de la station.

Faits dans la hâte, les aménagements ont parfois été mal pensés et de nombreuses dalles de béton recouvrent désormais des bandes de plage.
Cerise sur le gâteau, les infrastructures ne sont pas encore tout à fait prêtes. Les premiers journalistes sur place se servent de Twitter depuis quelques jours pour mettre en avant les problèmes dans les hôtels. Eau non potable, tringle de rideau qui tombe, … Tout devient sujet à une petite pique.

La position de la Belgique

Il n’y aura pas de représentants belges pour encourager nos 7 athlètes lors de la cérémonie d’ouverture. Mais il ne s’agit pas là d’un boycott officiel. Les écologistes avaient déposé une résolution demandant au gouvernement fédéral de ne pas assister à la cérémonie d’ouverture des Jeux, mais la majorité a rejeté le texte.


Bien sûr, il se passera de très belles choses sur les pistes de Sotchi et l’esprit olympique devrait être présent durant la compétition. Mais la charte olympique ambitionne de « mettre le sport au service du développement harmonieux de l’humanité en vue de promouvoir une société pacifique, soucieuse de préserver la dignité humaine. » Vu sous cet angle, il n’y aura pas grand monde pour aller remettre une médaille à Vladimir Poutine.

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