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Snowden doit quitter Moscou, en attente de l’asile politique en Equateur

Le Vif

L’ex-consultant de la CIA Edward Snowden accusé d’espionnage par Washington devait partir lundi de Moscou pour La Havane et sans doute poursuivre sa route vers l’Equateur où il a demandé l’asile politique, en dépit des pressions américaines pour son extradition.

Tandis que le ministre équatorien des Affaires étrangères a confirmé lundi matin que Quito « étudiait » la demande du jeune Américain, jugeant que le dossier relevait de « la liberté d’expression », Washington a pressé Moscou de l’expulser pour qu’il réponde des charges contre lui, invoquant la coopération entre les deux pays.

« Compte tenu de cette coopération (…) nous espérons que le gouvernement russe va étudier toutes les options possibles pour expulser M. Snowden vers les Etats-Unis afin qu’il réponde devant la justice des charges pesant contre lui », a déclaré le porte-parole de la Sécurité nationale, Mme Caitlin Hayden.

Inculpé notamment d’espionnage, Edward Snowden encourt 30 ans de réclusion aux Etats-Unis. Ceux-ci ont annulé son passeport pour l’empêcher de voyager, mais une source policière russe citée par l’agence de presse Interfax avait toutefois estimé dimanche que l’Equateur pouvait lui délivrer le cas échéant un document de substitution.

Selon une « source informée » citée par l’agence russe Interfax, la Russie ne dispose pas de motifs pour arrêter et extrader Snowden qui a publié des informations explosives sur la surveillance électronique américaine.

« Edward Snowden n’a pas commis de crime sur le territoire russe. Les services de sécurité russes n’ont pas été chargés par Interpol de l’arrêter. Il n’y a donc pas de motif pour arrêter ce passager en transit », a déclaré cette source.

L’expert militaire Pavel Felgenhauer, interrogé par l’AFP, a souligné que la Russie n’avait pas d’accord d’extradition avec les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie équatorienne, Ricardo Patino, a de son côté estimé qu’avec cette affaire, il y allait « de la liberté d’expression et de la sécurité des citoyens dans le monde ».

Snowden est arrivé dimanche à Moscou en provenance de Hong Kong, d’où il avait publié ses informations et où il était réfugié depuis le 20 mai après avoir quitté son domicile de Hawaï.

Enregistré sur un vol de la compagnie Aeroflot en provenance de la Région administrative spéciale, il n’a toutefois pas été vu au point de contrôle des passeports du terminal F de l’aéroport Moscou-Cheremetievo.

Il semblait se trouver dans la nuit de dimanche à lundi dans la zone de transit de l’aéroport, où il y a un hôtel. Cependant, des journalistes de l’AFP sur place ne l’ont pas vu non plus.

Dans la soirée, le site WikiLeaks fondé par Julian Assange a annoncé que M. Snowden était « en route pour la République d’Equateur par un chemin sûr afin d’obtenir l’asile ».

Le nom de Snowden et celui de Sarah Harrison, une collaboratrice de WikiLeaks qui l’avait déjà accompagné sur le vol Hong Kong-Moscou, figurent parmi les passagers du vol Aeroflot décollant lundi à 14H05 (10H05 GMT) à destination de Cuba, selon une liste de la compagnie dont l’AFP a eu connaissance.

Selon une source proche du dossier, l’avion doit traverser une zone aérienne contrôlée par le centre de contrôle de New York, ce qui pourrait permettre aux Etats-Unis de contraindre l’avion à atterrir sur leur territoire.

L’Equateur a précédemment accordé l’asile à Julian Assange, lui-même recherché par les Etats-Unis pour avoir publié en 2010 des centaines de milliers de documents diplomatiques confidentiels.

M. Assange, réfugié depuis un an à l’ambassade de l’Equateur à Londres pour échapper à une extradition, a apporté un soutien appuyé à Edward Snowden.

La justice américaine a indiqué de son côté qu’elle mènerait « la coopération policière adéquate » avec les pays où M. Snowden pourrait se rendre. « La chasse est lancée », a déclaré sur la chaîne CBS Dianne Feinstein, présidente de la commission du Renseignement du Sénat américain.

Le département américain de la Justice s’est dit déçu de la décision de Hong Kong de laisser partir le jeune homme, la jugeant « particulièrement troublante ».

Les autorités de Hong Kong ont expliqué ne disposer d’aucune arme juridique pour retenir Edward Snowden, faute d’avoir reçu des autorités américaines les documents d’incrimination nécessaires.

Un député hongkongais ayant été le conseil de Snowden durant son séjour dans le territoire autonome chinois, Albert Ho, a dit sa conviction lundi que Pékin avait orchestré en toute discrétion le départ de l’Américain.

L’annonce du départ d’Edward Snowden pour Moscou, même pour un transit, a fait sensation, la Russie, dont les relations avec les Etats-Unis reprennent dernièrement des accents rappelant la Guerre froide, ayant indiqué qu’elle examinerait le cas échéant une demande d’asile politique du jeune Américain.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré ne rien savoir de la destination d’Edward Snowden.

Selon une source au sein des services secrets russes, ces derniers ont pu s’entretenir avec l’Américain pour obtenir des informations confidentielles sur les Etats-Unis. « Les services de renseignement et les services de contre-espionnage russes ont beaucoup de questions à poser à une personne si bien informée », a déclaré à l’agence Interfax cette source sous le couvert de l’anonymat.

Snowden a multiplié depuis le 5 juin les révélations sur la collecte par la NSA de données téléphoniques et internet aux Etats-Unis et à l’étranger.

Dimanche à Hong Kong, le Sunday Morning Post a assuré, en citant M. Snowden, que la NSA interceptait notamment « des millions de SMS » envoyés sur les réseaux de mobiles chinois. Pékin a réagi avec virulence à ces allégations.

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