© Belga

Siemens signe des contrats pour 10 milliards avec l’Égypte

Les milliards de dollars d’investissements étrangers promis à l’Égypte durant la conférence économique de Charm el-Cheikh confortent le pouvoir du président Abdel Fattah al-Sissi et l’image de son pays, fer de lance arabe dans la lutte contre les djihadistes. Le conglomérat allemand Siemens a signé avec le gouvernement égyptien des protocoles d’accord d’un montant de plusieurs milliards d’euros.

Au lendemain des 12,5 milliards de dollars d’aides apportés à l’Égypte par quatre monarchies du Golfe, le conglomérat allemand Siemens a signé samedi avec le gouvernement égyptien un contrat de 4 milliards d’euros pour la construction d’une centrale thermique au gaz et de turbines à vapeur d’une capacité de 4,4 gigawatts et des éoliennes d’une capacité totale de 2 gigawatts. Selon un porte-parole de la firme, des protocoles d’accords pour un montant total de 6 milliards d’euros ont par ailleurs été signés pour d’autres projets.

Le groupe n’a pas précisé le montant de ces contrats, mais le ministère allemand de l’Economie a évoqué « des contrats en milliards d’euros ». La signature est intervenue à Charm el-Cheikh en marge d’un important rendez-vous économique et financier organisé par les autorités égyptiennes, a précisé Siemens, en présence du ministre de l’Economie, Sigmar Gabriel et du ministre égyptien de l’Energie, Shaker el-Markabi. Siemens doit construire à Beni Suef, une ville située à une centaine de kilomètres au sud du Caire, une centrale thermique au gaz et turbines à vapeur d’une capacité de 4,4 gigawatts, selon la même source. Des éoliennes d’une capacité totale de 2 gigawatts doivent également être installées. Siemens va aussi construire une usine de fabrication de pales pour les éoliennes. Au total, 1.000 emplois devraient être créés, et Siemens va multiplier par trois le nombre de ses salariés en Égypte. Les capacités de production d’électricté de l’Égypte doivent croître « d’au moins un tiers d’ici à 2020 », a encore indiqué Siemens.

D’autres énormes contrats ont été signés

Vendredi, à l’ouverture de la conférence dans la station balnéaire du Sinaï, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Koweït, qui ont déjà largement subventionné sur l’Égypte depuis la destitution en 2013 de l’ex président islamiste Mohamed Morsi, ont frappé les esprits en promettant 12 milliards de dollars d’aides ou d’investissements cumulés. Oman a rajouté 500 millions.

Baptisé conférence sur « l’avenir » de l’Égypte, cet évènement est éminemment politique et montre les soutiens internationaux dont bénéficie M. Sissi, accusé par les organisations de défense des droits de l’Homme de réprimer dans le sang toute opposition depuis qu’il a destitué M. Morsi en tant que chef de l’armée et accédé à la présidence. Le président égyptien est l’un des principaux chefs d’Etat de la région à réclamer la création d’une force arabe commune pour combattre notamment le groupe Etat islamique (EI), une option que va étudier la Ligue arabe lors de son sommet fin mars. Le sujet est d’une importance fondamentale, car la coalition internationale se contente pour l’heure de bombarder l’EI en Irak et en Syrie, et les seules actions au sol sont le fait de l’armée irakienne et ses alliés (milices chiites, combattants kurdes, tribus sunnites) en Irak, et de forces kurdes en Syrie. L’armée égyptienne -l’une des plus puissantes du monde arabe- pourrait constituer l’épine dorsale d’une force arabe. Fin février, M. Sissi a indiqué que l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït et la Jordanie pourraient s’impliquer dans cette initiative. « Je pense que le message est clair: la plus grande partie du monde soutient le gouvernement engagé à construire la nouvelle Égypte », a commenté Ashraf el-Arabi, le ministre égyptien de la Planification. Car l’enjeu de cette conférence est pour M. Sissi de se poser en président fort qui a su rétablir la sécurité et la stabilité du pays. « Le soutien des pays du Golfe est construit sur le fait que le gouvernement égyptien s’est opposé au mouvement des Frères musulmans », dont est issu M. Morsi, analyse Moustafa Kamel al-Sayyed, professeur de Sciences politiques à l’Université du Caire, soulignant que, comme l’Égypte, la plupart des pays du Golfe considèrent la confrérie comme « terroriste ». L’expert juge également que le soutien des Etats-Unis vient du fait qu’ils « considèrent que le gouvernement égyptien fait face à la menace des mouvements terroristes ». Mais même s’il a réitéré le soutien de son pays à l’Égypte, le chef de la diplomatie américaine John Kerry est venu à Charm el-Cheikh les mains vides. Il a toutefois promis samedi une « décision très prochainement » pour le déblocage d’une dernière enveloppe d’assistance militaire de 650 millions de dollars. Les Etats-Unis allouent en principe chaque année 1,5 milliard de dollars d’aide à l’Égypte, dont 1,3 milliard dans le domaine militaire. Mais une partie avait été gelée avec la destitution de M. Morsi et la sanglante répression de ses partisans. Washington avait conditionné la reprise de cette aide à des réformes démocratiques. Depuis, des hélicoptères de guerre Apache ont été livrés pour appuyer Le Caire dans sa lutte contre les jihadistes dans le Sinaï. Mais l’ONU et de nombreuses ONG de défense des droits de l’Homme continuent d’accuser M. Sissi d’avoir mis en place un régime plus répressif encore que celui de Hosni Moubarak, renversé en 2011 par une révolte populaire. En un an et demi, plus de 1.400 manifestants pro-Morsi ont été tués, plus de 15.000 de ses partisans emprisonnés et des centaines condamnés à mort dans des procès de masse expéditifs.

Contenu partenaire