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Secours aux migrants: la Libye interdit « tout navire étranger » près de ses côtes

Le Vif

La marine libyenne a annoncé jeudi la création au large du territoire d’une zone de recherche et de sauvetage, qu’elle interdit sauf autorisation aux navires étrangers, en particulier aux ONG patrouillant en eaux libyennes pour secourir des migrants.

La mission des ONG engagées dans les secours aux migrants au large de la Libye suscite des tensions dans la région.

L’Italie, qui a vu débarquer plus de 600.000 migrants depuis 2014, essentiellement via la Libye, tente de fermer la route et a mis en place début août un code de conduite imposant transparence et coopération maximum aux ONG de secours en mer, dont plusieurs ont refusé de signer.

La Libye a déclaré « officiellement une zone de recherche et de secours », a déclaré jeudi en conférence de presse le général Abdelhakim Bouhaliya, commandant de la base navale de Tripoli, sans préciser l’étendue de cette zone.

« Aucun navire étranger n’a le droit d’y accéder, sauf demande expresse de la part des autorités libyennes », a-t-il souligné.

Un porte-parole de la marine libyenne, le général Ayoub Kacem, a précisé que la décision visait explicitement « les ONG qui prétendent vouloir sauver les migrants clandestins et mener des actions humanitaires ».

Les gardes-côtes libyens sont souvent montrés du doigt par les navires des ONG qui patrouillent au large de la Libye afin de secourir des migrants clandestins et les tensions sont vives.

De nombreux migrants sont retenus dans des camps sordides, soumis au travail forcé, à la torture, aux abus sexuels et aux extorsions.

Des trafiquants profitent du chaos qui règne dans le pays depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011 pour faire passer chaque année des dizaines de milliers de migrants à destination de l’Italie, en échange d’importantes sommes d’argent.

Avec des capacités diminuées dans un pays divisé et affaibli, la marine libyenne n’est pas en mesure de sécuriser ses frontières maritimes et a récemment sollicité l’aide de l’Italie.

‘Respecter notre volonté’

« Par cette annonce, nous souhaitons envoyer un message clair à tous ceux qui portent atteinte à la souveraineté libyenne et manquent de respect aux gardes-côtes et à la marine », a déclaré le général Ayoub Kacem.

« Vous devez respecter notre volonté » et « obtenir l’autorisation de l’Etat libyen même pour les opérations de secours », a-t-il dit en s’adressant aux ONG.

Ces annonces ont été faites par les autorités loyales au chef du gouvernement d’union nationale (GNA) Fayez al-Sarraj, reconnu par la communauté internationale mais qui peine à asseoir son autorité en dehors de Tripoli.

Ce gouvernement avait demandé en juillet un appui naval à l’Italie pour lutter contre les départs de migrants clandestins depuis les côtes libyennes.

C’est dans ce cadre que le navire italien de transport côtier et de maintenance « Tremiti » a accosté au port de Tripoli mardi « pour compléter l’appui logistique et technique commencé par les deux navires Vaccaro et Commandante Borsini aux forces de la Marine et aux gardes-côtes (…) à la demande du gouvernement libyen », a indiqué la Direction de la communication de la marine libyenne.

La décision italienne d’envoyer des navires de la marine militaire a provoqué de vives réactions en Libye, le maréchal Khalifa Haftar, homme fort de l’est libyen et chef d’une force autoproclamée Armée nationale libyenne (ANL), ordonnant notamment à ses troupes d’empêcher l’entrée de navires étrangers dans les eaux libyennes.

Rome fournit désormais formation, équipement et soutien technique aux gardes-côtes libyens et cherche aussi à limiter l’afflux de migrants en Libye même, grâce à un meilleur contrôle de ses frontières sud et une coopération avec des pays de transit comme le Niger, le Tchad et le Mali.

Les défenseurs des droits de l’Homme estiment que la politique italienne de renforcer les garde-côtes libyens pour intercepter les migrants avant qu’ils ne gagnent les eaux internationales abandonne des milliers de personnes ayant droit à l’asile aux violences des milices.

AFP

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