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Roms: la France contre l’Europe

Les premiers Roms volontaires à leur retour dans leur pays d’origine sont arrivés en Roumanie. Bucarest et la Commission européenne s’interrogent sur la légalité de ces expulsions.

Acte 1– Mercredi 18 août, alors que les démantèlements de camps roms se poursuivent sur le sol français et que trois vols doivent reconduire, d’ici dix jours, des Roms en Roumanie, la Commission européenne monte timidement au créneau. La France doit « respecter les règles concernant la liberté de circulation et la liberté d’établissement » des citoyens européens, rappelle le porte-parole de la commissaire chargée de la Justice et des droits fondamentaux des citoyens européens. Et d’ajouter, sans trop se mouiller, que « la Commission européenne a défendu de façon constante et continue de défendre la nécessité d’une intégration sociale » des Roms dans tous les pays de l’Union.

Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, projette de raccompagner à la frontière 700 Roms en situation irrégulière d’ici à trois mois. Problème: ces Roms expulsés par le gouvernement français sont des ressortissants de l’Union européenne. En vertu d’un régime transitoire, en place depuis que la Roumanie et la Bulgarie ont rejoint l’UE en 2007, ils peuvent entrer en France sans formalité particulière et y rester durant trois mois sans avoir à justifier d’une activité. Au-delà de cette période, ils doivent avoir un emploi, suivre des études ou justifier de ressources suffisantes.

Ce qui fait dire à Daniel Cohn-Bendit comme à Alain Juppé que la réponse à la question posée par les Roms « doit être trouvée au niveau européen ».

Acte 2 – Resté discret jusqu’ici, le ministre roumain des Affaires étrangères, Teodor Baconschi, finit par manifester son inquiétude quant à la situation des Roms en France et aux « risques de dérapage populiste et de réactions xénophobes » qu’elle induit. Au micro de RFI Roumanie, il dit « espérer » que la légalité soit respectée pour chacune des expulsions.

Teodor Baconschi prône également une coopération loin de toute « fièvre électoraliste artificielle » pour résoudre les problèmes de pauvreté, d’accès aux soins et d’éducation auxquels font face les Roms dans toute l’Europe.

La réponse, sans équivoque, de son homologue français ne se fait pas attendre. Un porte-parole des Affaires étrangères réaffirme que les mesures décidées contre les Roms sont « pleinement conformes aux règles européennes ».

Acte 3 – Jeudi 19 août, le président roumain, Traian Basescu, en remet une couche sur la nécessité d’une approche européenne coordonnée. « Ce qui se passe à Paris prouve que nous devons avoir un programme d’intégration au niveau européen des citoyens d’ethnie rom. »

S’il concède comprendre « les problèmes que créent les camps de Roms dans les environs des villes » en France, le président roumain soutient « le droit de chaque citoyen de circuler librement dans l’Union européenne ».

Acte 4 – L’intervention timorée de la Commission européenne n’est cependant pas du goût de Brice Hortefeux. Sans prendre de gants, le ministre de l’Intérieur invite l’institution à « mobiliser son énergie et ses crédits dans des programmes de réinsertion durable et d’intégration effective de la communauté des Roms ».

« J’attends que la Commission européenne démontre toute sa valeur ajoutée dans l’accès des Roms à l’éducation, à l’emploi et au logement par exemple », ajoute-t-il. Comprendre: occupez-vous de vos affaires!

Pour tenter de clore le débat, le ministre réaffirme respecter « totalement les règles européennes » et veiller à ce que « ça ne porte pas atteinte à la liberté de circulation des citoyens européens ».
« Quand un ressortissant européen trouble l’ordre public, il peut être raccompagné dans son pays, y compris s’il est en France depuis moins de trois mois », a rappelé le ministre. « Quand un ressortissant européen n’a aucun moyen de subsistance en France, il n’a pas le droit d’y séjourner plus de trois mois », conclut-il.

Le Vif.be, avec L’express.fr

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