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Risque d’escalade entre l’Inde et le Pakistan

Le Vif

L’Inde évacuait vendredi des villages frontaliers du Pakistan par crainte de représailles, au lendemain d’opérations militaires indiennes dans la région contestée du Cachemire exacerbant les tensions entre les deux puissances nucléaires.

New Delhi dit avoir mené jeudi de spectaculaires raids dans cette région himalayenne à majorité musulmane. Une version minimisée par Islamabad qui parle de simples « échanges de feu » de part et d’autre de la frontière de facto divisant le Cachemire.

Dans la foulée, le Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif a présidé vendredi un Conseil des ministres consacré à la question du Cachemire, revendiqué par les deux pays depuis la Partition de 1947.

M. Sharif a affirmé être prêt à prendre « toutes les mesures nécessaires » en cas « d’agression ou de violation » indienne de la ligne de cessez-le-feu au Cachemire.

La même fébrilité régnait dans les couloirs de New Delhi. Le Premier ministre indien Narendra Modi a réuni dans la matinée son comité de sécurité pour discuter de la situation.

L’Inde a annoncé jeudi avoir conduit des raids commandos au milieu de la nuit contre des caches « terroristes » situées près de la ligne de démarcation entre les deux pays, reconnaissant à demi-mot que celles-ci se trouvaient du côté contrôlé par le Pakistan.

Selon sa version, les abris visés étaient la dernière halte de petites cellules rebelles qui s’apprêtaient à pénétrer clandestinement dans la partie contrôlée par New Delhi de cette région à majorité musulmane.

Evacuations

Cette opération militaire intervient une dizaine de jours après l’attaque de la base indienne d’Uri au Cachemire où 19 soldats avaient trouvé la mort, la plus meurtrière dans la région depuis plus d’une décennie.

Par crainte de représailles aux raids au Cachemire, des milliers de villageois du Pendjab indien (nord-ouest) ont reçu l’injonction de quitter leur foyer.

Les autorités supervisaient l’évacuation de villages situés dans une bande de dix kilomètres parallèle à la frontière pakistanaise.

Un millier de localités, réparties sur six districts pendjabis le long de la barrière barbelée, pourraient être concernées.

En tracteur, en camion ou à moto, des familles entières s’acheminaient vers des camps temporaires mis en place par les autorités.

Pour Jaswant Kaur, un fermier de 55 ans, cette évacuation était la quatrième de ces dernières années.

« Ce n’est jamais agréable de laisser votre maison, votre champ, votre bétail et tout le reste. Vivre ici signifie être toujours sur le fil du rasoir », confie-t-il.

Un soldat indien a été fait prisonnier jeudi du côté pakistanais de la ligne de démarcation, a indiqué vendredi le ministre indien de l’Intérieur confirmant des informations de presse.

Les circonstances de son arrestation restaient vagues. Il n’était pas connu en l’état si cet incident était lié aux raids commandos indiens quelques heures auparavant.

– Brouille –

Des deux côtés de la frontière, un virulent nationalisme s’exprimait dans les médias vendredi matin.

Le quotidien économique indien The Economic Times saluait la « nouvelle ligne rouge » du gouvernement nationaliste hindou. Côté pakistanais, on raillait la « farce » des « frappes chirurgicales ».

En moins d’un an, la relation entre l’Inde et le Pakistan s’est envenimé et repris des accents trop familiers depuis la Partition des deux pays en 1947, qui se sont affrontés dans trois guerres depuis.

A Noël dernier, Narendra Modi rendait une visite surprise à son homologue pakistanais, laissant espérer le début d’une ère plus apaisée pour le sous-continent.

Mais l’attaque par des rebelles des bases militaires indiennes de Pathankot en janvier (7 soldats tués), d’Uri en septembre, et une flambée de violence dans la vallée du Cachemire cet été ont eu raison de cet éphémère réchauffement.

La partie du Cachemire contrôlée par l’Inde, où sévissent des groupes rebelles indépendantistes ou pro-pakistanais, s’est embrasée en juillet après la mort d’un jeune rebelle charismatique.

Depuis une dizaine de jours, New Delhi est aussi à l’offensive sur le plan diplomatique pour tenter d’isoler Islamabad sur la scène internationale.

L’Inde s’est ainsi retirée d’un sommet régional qui doit se tenir le mois prochain dans la capitale pakistanaise, entraînant à sa suite le Bangladesh, l’Afghanistan et le Bhoutan.

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