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RDC : la tension monte à 24H du résultat de la présidentielle

Forces de police plus visibles, population inquiète, expatriés et Congolais fuyant à Brazzaville : la République démocratique du Congo (RDC) et particulièrement sa capitale, Kinshasa, vivent dans la crainte de violences à 24 heures de l’annonce des résultats complets de la présidentielle du 28 novembre.

« Ce mardi, c’est la fin du monde en RDC ! « , ironise ‘L’Observateur’, quotidien proche du pouvoir, dans son édition de ce lundi. « En dépit de tous les appels au calme que le gouvernement congolais et la communauté internationale s’évertuent à lancer à la population, l’inquiétude ne baisse pas », relève le journal qui se veut rassurant en évoquant un « mardi apocalyptique (…) qui n’aura jamais lieu ».

Posté à un carrefour en face d’un grand hôtel, un vendeur de cigarettes propose à l’acheteur une cartouche à la place d’un paquet, « parce que mardi je ne serai pas là ».

Un « carnaval de la paix » sous protection policière

Dans la capitale, la police se fait de plus en plus visible. Dans le quartier de la Gombe, où se trouve le palais présidentiel, la Garde républicaine (ex-garde présidentielle), est aussi plus présente.

Dans ce dernier quartier, une association de jeunes, le « Mouvement 8993 » organisait ce lundi un « carnaval de la paix ». « Nous avons l’impression qu’il y aura des conflits post-électoraux et nous voulons éviter ça car nous les jeunes, nous en sommes les premières victimes », explique la vice-présidente de l’association, Josette Baongela, 24 ans. Autour de la caravane de voitures, plusieurs dizaines de policiers armés. « Ils sont là pour nous protéger (…) Mais nous avons l’impression que quand il y a un conflit ils tirent sur la population », s’inquiète-t-elle.

Les tensions s’étendent en dehors de la RDC

Depuis samedi, redoutant des violences, quelques milliers d’expatriés et de Congolais vivant à Kinshasa ont traversé le fleuve Congo pour rallier Brazzaville, la capitale du Congo voisin, sur l’autre rive du fleuve éponyme. « Ce n’est pas un exode », a relativisé un diplomate.

La tension déteint même dans la communauté congolaise à l’étranger. A Paris, 150 opposants ont dénoncé samedi le « soutien » occidental à Kabila, et ce lundi des heurts ont opposé à Johannesburg et Pretoria la police sud-africaine à des Congolais, à la suite d’une simple rumeur selon laquelle les résultats de l’élection seraient proclamés… en Afrique du sud.

A Bruxelles, un policier et trois manifestants ont été blessés, tandis que plusieurs véhicules ont été endommagés lors d’une manifestation de partisans du candidat d’opposition Etienne Tshisekedi.

De son côté, l’ONG International Crisis Group (ICG) a émis un bulletin d’alerte pour la RDC en la classant dans la catégorie « risque de conflit ».

Des élections chaotiques

Après avoir organisé des élections chaotiques, émaillées de violences, entachées d’irrégularités et où des soupçons de fraudes ont été dénoncés, la Commission électorale (Céni) devait livrer ce lundi de nouveaux résultats partiels de la présidentielle, qui devraient confirmer la tendance d’une avance nette du sortant Joseph Kabila sur son rival Etienne Tshisekedi, qui rejette ce décompte.

Dimanche soir, avec deux heures de retard, le président de la Céni, le pasteur Daniel Ngoy Mulunda, a livré une nouvelle série de chiffres partiels portant sur la moitié des bureaux de vote et plaçant Kabila en tête avec 49% contre 34% à Tshisekedi, avec un écart de plus de 1,5 million de voix.

M. Kabila mène dans six provinces (Bandundu, Katanga, Maniema, Province orientale, Nord et Sud Kivu), Tshisekedi dans quatre autres (Bas Congo, Kasaï occidental et oriental, et Kinshasa).

Le président du Sénat et opposant Léon Kengo wa Dondo est arrivé premier dans l’Equateur. Sur les onze provinces, il totalise 4% des voix, juste derrière l’opposant et ex-président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe (3e, 7%).

Les résultats provisoires complets du scrutin présidentiel à un tour doivent être annoncés mardi par la Céni, à une heure non précisée.

Vers des élections « nulles » pour l’opposition ?

S’ils confirment la tendance des derniers jours, l’opposition devrait les rejeter et les considérer comme « nuls », comme elle l’a fait dès la publication des premiers chiffres partiels.

« L’UDPS (Union pour la Démocratie et le Progrès social, le parti de M. Tshisekedi) met en garde M. Ngoy Mulunda et (le président) Kabila pour qu’ils respectent la volonté du peuple », indiquait le chef de l’UDPS, ajoutant qu' »en cas de besoin » il lancerait un « mot d’ordre », sans plus de précisions.

La Conférence épiscopale nationale du Congo, qui a déployé quelque 30.000 observateurs sur l’ensemble des 169 circonscriptions électorales, a pourtant jugé dimanche que les résultats publiés à ce jour sont « exacts à 97,6% », selon le journal ‘La République ».

Ce Lundi, des diplomates en poste à Kinshasa, dont l’ambassadeur de Russie, qui préside actuellement le Conseil de sécurité, ont rencontré le président Kabila. Ils devaient s’entretenir plus tard avec Etienne Tshisekedi, selon une source diplomatique.

Levif.be, avec Belga

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