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Qui va porter l’estocade à Theresa May ?

Le Vif

Le nombre d’ennemis de la Première ministre ne cesse d’augmenter, y compris dans son parti.

Au Cluedo, jeu de société créé au Royaume-Uni à la fin des années 1940, le but des joueurs est de trouver qui a tué le Dr Lenoir, dans quelle pièce du manoir, et avec quelle arme. Tôt ou tard, nul doute que les commentateurs se livreront au même exercice autour de la dépouille politique de Theresa May. Non seulement la cheffe du gouvernement britannique ne manque pas d’ennemis, mais leur nombre semble augmenter de jour en jour. Et pour cause. Ses louvoiements et ses erreurs d’analyse ne cessent d’accroître son isolement.

Reprenons. Lors du référendum sur la sortie de son pays de l’Union européenne, le 23 juin 2016, Mme May se prononce à titre personnel contre le Brexit. Moins d’un mois plus tard, elle change d’avis et interprète le résultat de la consultation de façon radicale : Brexit means Brexit, selon son expression. L’explication de ce revirement : entre-temps, Theresa May est devenue Première ministre. En soutenant un Brexit pur et dur, elle entend se mettre à l’abri d’un coup de poignard dans le dos des eurosceptiques les plus acharnés de son mouvement, le Parti conservateur. En juin 2017, pour mieux asseoir son pouvoir, elle croit bon de convoquer des élections sur ce thème. Mais elle y perd sa majorité. Et change de cap à nouveau : désormais, sa priorité est d’obtenir de Bruxelles le meilleur accès possible au marché unique, quitte à conserver le maximum des règles, normes et standards de l’UE. Mieux, alors que les Britanniques ne seront plus représentés dans les instances européennes après mars 2019, Londres pourrait  » s’aligner  » sur les décisions que les Vingt-Sept prendront à l’avenir. De quoi transformer le pays en  » Etat vassal « , persifle Jacob Rees-Mogg, député conservateur et coqueluche des partisans d’une rupture radicale avec l’UE.

Assassinat ou… suicide

La boucle est bouclée, au point que plusieurs commentateurs voient dans ce catholique qui est une incarnation caricaturale de la vieille Angleterre un successeur possible de Theresa May. Le colonel Moutarde, éternel suspect au Cluedo, serait-ce lui ? Possible, mais la partie est loin d’être terminée, car la question européenne divise le Parti conservateur, et les rivaux travaillistes grimpent dans les sondages. Pour les adversaires de Mme May, rien ne presse. Ils ont une solution plus efficace que l’assassinat politique : ils la laisseront poursuivre son suicide.

Par Marc Epstein.

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