Emmanuel Macron, le président français, et Justin Trudeau, Premier ministre canadien, renouvellent l'image du dirigeant (Ici, lors du G7, en mai dernier). © Reuters

Qui sont ces beaux gosses qui nous gouvernent ?

Le Vif

Ils sont beaux, jeunes et intelligents. Bref, agaçants au possible. Du Canadien Justin Trudeau à l’Allemand Christian Lindner, en passant par le Français Emmanuel Macron, une certitude : ils redéfinissent les codes du pouvoir.

Président de la République française à 39 ans, Emmanuel Macron a balayé le paysage politique. Et étonné le monde. Certes, dans le club très fermé des dirigeants trentenaires, il ne se place qu’en huitième position, derrière le dictateur nord-coréen Kim Jong-un, 34 ans, l’émir du Qatar, le cheikh Tamim Ben Hamad al-Thani, 37 ans, ou Leo Varadkar, fils d’immigré et homosexuel assumé, âgé de 38 ans, qui est devenu Premier ministre d’Irlande en juin dernier. Mais au hit-parade des politiciens élus démocratiquement, le Français détient un record : celui du plus jeune chef d’Etat de la planète. Lors du dernier sommet du G20, à Hambourg, il a d’ailleurs chipé la vedette au fringant Justin Trudeau, jusqu’alors considéré comme une sensation par la presse féminine et sacré, en 2015,  » homme politique le plus élégant du globe  » par le magazine masculin GQ.

Reste une question : en quoi leur physique agréable est-il une affaire politique ?

Cependant, un autre ambitieux s’apprête à faire mieux que Macron et Trudeau réunis. Son nom ? Sebastian Kurz. Signe particulier ? Etoile montante. Nationalité ? Autrichienne. En mai dernier, ce jeune ministre des Affaires étrangères a pris les commandes du parti conservateur (ÖVP), qui part favori aux législatives d’octobre 2017. En cas – probable – de victoire de son camp, il a toutes les chances de devenir le nouveau chancelier : à 31 ans, le très smart Autrichien sera alors le plus jeune chef de gouvernement au monde. Pour arriver à ce résultat, ce surdoué aux costumes slim s’est habilement positionné comme le meilleur rempart contre le parti d’extrême droite (FPÖ), lequel a failli emporter l’élection présidentielle l’année dernière. Sebastian Kurz argumente :  » Tous les réfugiés ne peuvent pas aller dans trois pays seulement (Allemagne, Suède, Autriche) ; il faut construire un système européen de l’asile.  »

Quoi qu’il en soit, un vent de fraîcheur souffle sur la scène politique internationale depuis que le Nouveau Monde a propulsé Justin Trudeau à la tête du Canada (en 2015, à 43 ans) et Enrique Peña Nieto, à la présidence du Mexique (en 2012, à 46 ans). Maintenant, le jeunisme se propage au reste du monde. Outre Emmanuel Macron, le casting de beaux gosses inclut le prince héritier de Dubaï et roi des réseaux sociaux Hamdan al-Maktoum, 34 ans ; le  » rebelle  » Alexeï Navalny, 41 ans, opposant à Poutine et organisateur de manifestations anticorruption à travers toute la Russie ; le glamoureux roi Wangchuck, 37 ans, populaire monarque du petit Bhoutan, royaume confiné entre Inde et Tibet, ou encore le président de Haïti et PDG d’Agritrans (production et exportation de bananes), Jovenel Moïse, une  » baby face  » qui, à 49 ans, en paraît dix de moins. Plus près de nous, la nouvelle star politique allemande Christian Lindner, 38 ans, a modernisé le petit Parti libéral-démocrate (FDP), qu’il dirige depuis 2013. Après avoir enrayé la chute de celui-ci, ce dirigeant aux faux airs de Daniel Craig espère faire revenir son parti au Bundestag aux législatives du 24 septembre prochain, où Angela Merkel joue sa réélection (en 2013, le FDP avait été éliminé du Parlement pour la première fois).

Le point commun entre ces jeunes premiers ? Ils sont intelligents, talentueux et diplômés. Mais aussi : minces, bien habillés, élégants. Bref – ce sont les femmes qui le disent -, sexy et attirants. Reste une question : en quoi leur physique agréable est-il une affaire politique ? Car, après tout, comme le disait naguère le très mufle Jean-Luc Mélenchon à propos de la candidature de Ségolène Royal, le suffrage universel  » n’est pas un concours de beauté « .  » Une personnalité avenante possède toujours un avantage, répond Arnaud Dupui-Castérès, président de Vae Solis, un cabinet conseil international en stratégie de communication et gestion de crise. Ce principe est valable dans tous les métiers de représentation, depuis l’hôtesse d’accueil jusqu’au directeur commercial. Il est encore plus vrai dans l’univers politico-médiatique. Certes, il ne suffit pas d’être Robert Redford pour gagner une élection. Mais une belle apparence agit comme un adjuvant, comme un principe actif. Dans la communication, poursuit-il, le non-verbal – la gestuelle, la « gueule », l’allure générale -, compte autant que le message exprimé. Tout cela peut créer un a priori favorable avant même que le candidat ait commencé à parler.  » Ces facteurs ont joué, naguère, en faveur de Tony Blair (43 ans lors de son accession au pouvoir), de Valéry Giscard d’Estaing (48 ans), mais aussi de John F. Kennedy (44 ans).  » Honnêtement, reprend notre communicant, personne ne défend l’idée que le bilan de JFK est remarquable. Son vrai succès, c’est sa jeunesse, c’est son style avenant, c’est Jackie. L’image, c’est fondamentale.  »

Le pouvoir projette désormais l’image de l’action, à travers l’élan, la tonicité

 » L’attente à l’égard des corps a changé, observe l’historien Georges Vigarello, spécialiste des représentations du corps. L’on assiste à une montée forte de l’esthétique masculine, avec l’émergence, ces dernières années, de la figure du « métrosexuel ». Le corps masculin doit exprimer la force, mais contrebalancée par une relative sensibilité et une certaine douceur. Toutefois, la beauté seule ne suffit pas. Il faut y ajouter la notion de mouvement. Le pouvoir projette désormais l’image de l’action, à travers l’élan, la tonicité, le déplacement, voire le sport, à l’image du joggeur Justin Trudeau.  » Au début de son quinquennat, Nicolas Sarkozy s’était, lui aussi, adonné au footing médiatisé, à la différence notable du  » capitaine de Pédalo  » qui lui a succédé. De son côté, le tennisman Macron renouvelle le genre en tombant la veste pour s’essayer au tennis-fauteuil en compagnie de champions handisport pour promouvoir, en juin dernier, la candidature de Paris aux JO 2024. Mais en matière d’exploits sportifs, nul n’égale le judoka Vladimir Poutine et encore moins le cavalier émérite Hamdan al-Maktoum, qui fait chavirer les coeurs dans le Golfe : le prince héritier de Dubaï a en effet remporté l’épreuve d’endurance en individuel aux Jeux équestres mondiaux de 2014 en Normandie après huit heures et huit minutes de course sans mettre pied à terre.

La recette  » beauté + sport  » ne bénéficie malheureusement pas aux deux sexes.  » Pour les femmes, avoir une « belle gueule », ou plutôt un ravissant visage, peut même représenter un désavantage, reprend le PDG de Vae Solis, Arnaud Dupui-Castérès. Non seulement le machisme ordinaire joue en leur défaveur, mais, de surcroît, certaines femmes n’aiment pas voter pour une candidate au physique avantageux.  » On le sait : quelle que soit sa compétence, une politique à la fois jeune et jolie s’expose à coup sûr aux réflexions désapprobatrices de tous ceux (et de toutes celles) qui l’assignent a priori au rôle de  » belle idiote « .

Selon Georges Vigarello, la difficulté d’être une femme en politique tient à ce que  » cette activité professionnelle induit des comportements contre-féminins, empreints de fermeté, de verticalité, de virilité « . D’après l’historien, le positionnement vestimentaire, plutôt strict, d’Angela Merkel, de Theresa May ou de Christine Lagarde  » renvoie à cette idée, même si ces dirigeantes projettent l’image d’un certain dynamisme « .

Par Axel Gyldén, avec Bogdan Bodnar et Alicia Tisserand.

Le casting des jeunes premiers

Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron.© AFP

Emmanuel Macron, 39 ans, le kid président

• Président de la République.

• Marié à une prof de français.

• Facebook : 2 millions d’abonnés.

• Plus jeune chef d’Etat français.

Justin Trudeau, 45 ans, le Kennedy canadien

• Premier ministre depuis 2015.

• Marié à une journaliste télé.

• Facebook : 5,3 millions d’abonnés.

• Deuxième plus jeune Premier ministre de l’histoire du pays.

• Féministe, multiculturaliste, défenseur du climat, favorable à la dépénalisation du cannabis.

Jigme Khesar Namgyel Wangchuck
Jigme Khesar Namgyel Wangchuck© AFP

Jigme Khesar Namgyel Wangchuck, 37 ans, le roi du bonheur

• Roi du Bhoutan.

• Marié à une diplômée en relations internationales.

• Facebook : 400 000 abonnés.

• A la tête du pays qui a inventé le concept de « bonheur intérieur brut » (BIP), ce très populaire diplômé d’Oxford forme avec son épouse le couple le plus glamour d’Asie.

Cheikh Hamdan al-Maktoum, 34 ans, le prince d’Instagram

• Prince héritier et président du Conseil exécutif de Dubaï.

• Célibataire.

• Instagram : 5,6 millions d’abonnés.

• Poète sous le nom de plume « Fazza », le futur émir est le coeur le plus convoité du Golfe. Sa vie trépidante est suivie par des millions de fans sur Instagram.

Sebastian Kurz.
Sebastian Kurz.© Reuters

Sebastian Kurz, 30 ans, le prodige autrichien

• Président du Parti populaire autrichien (ÖVP).

• En couple avec une fonctionnaire.

• Facebook : 610 000 abonnés.

• Secrétaire d’Etat à l’Intégration à 24 ans et ministre des Affaires étrangères à 27, il pourrait devenir chancelier à 31 ans en octobre prochain.

Christian Linder, 38 ans, l’Allemand qui monte

• Président du Parti libéral-démocrate (FDP).

• Marié à une journaliste télé.

• Facebook : 160 000 abonnés.

• Après avoir modernisé le FDP, il devrait lui permettre de revenir au Bundestag aux législatives du 24 septembre prochain, où il est candidat.

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