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Quand Trump se heurte à l’exercice du pouvoir

Marie Gathon
Marie Gathon Journaliste Levif.be

De PDG à président des États unis, la transition est rude pour Donald Trump. Le milliardaire anti-système avait promis de réformer le pays à la hussarde, mais Justice et Congrès brident ses pouvoirs, conformément à la Constitution. Il se lance donc à la conquête du monde, contrairement à ce que promettait son slogan : « America first ».

Le nouveau locataire de la Maison Blanche a essuyé deux revers retentissants sur ses deux grandes mesures de début de mandat, le décret anti-immigration et sa réforme du système de santé.

Aux États-Unis, le gouvernement ne peut pas faire passer des textes en force. Le Congrès est maître de son ordre du jour. Et les droits de l’opposition sont par coutume très importants à la chambre haute, le Sénat, où une majorité qualifiée est requise. Quant à la justice, elle est systématiquement saisie par des opposants politiques sur les décisions présidentielles, dont elle bloque parfois l’application.

A ces facteurs structurels, auxquels sont confrontés tous les présidents américains, s’ajoutent les particularités de Donald Trump. Il est le président le plus impopulaire de l’histoire récente pour un début de mandat, avec moins de 40% d’opinions favorables.

Même les élus de la majorité le défient. Une faction de frondeurs a torpillé son projet d’abrogation d' »Obamacare », créant un début de guerre civile au parti républicain. Puis, les méthodes de gestion expéditives et peu orthodoxes de l’ex-homme d’affaires ont créé de la confusion.

Le 45e président américain garde cependant des prérogatives qui, si elles sont utilisées judicieusement, peuvent lui permettre de reprendre la main, par exemple lors de l’épreuve imminente du budget.

Côté justice, le dirigeant républicain sera bientôt aidé par une Cour suprême à majorité conservatrice.

Le va-t’en guerre

Alors que Trump avait promis d’être le président de l’Amérique et pas du monde, les actions entreprises ces derniers jours prouvent qu’il n’est pas à un retournement de veste près.

Après une attaque chimique contre des civils syriens, Trump change radicalement de ton vis-à-vis d’Assad. « Le rôle d’Assad à l’avenir est incertain et avec les actes qu’il a perpétrés, il semblerait qu’il n’ait aucun rôle pour gouverner le peuple syrien », a déclaré Rex Tillerson, le chef de la diplomatie américaine. Une semaine auparavant, le même Tillerson avait pourtant indiqué que le départ de Bachar al-Assad n’était pas la priorité de Washington.

Deux jours plus tard, deux navires américains tirent 59 missiles vers la base aérienne syrienne d’al-Chaayrate, dans le centre du pays. Depuis sa résidence de Floride, visage grave, Donald Trump appelle toutes les « nations civilisées » à oeuvrer pour faire cesser le bain de sang en Syrie.

Depuis, les relations sont au plus bas avec Moscou alors que Trump avait prôné tout au long de sa campagne et au début de sa présidence un rapprochement avec son homologue russe, Vladimir Poutine. Il plaide cependant toujours pour une entente entre les États-Unis et la Russie, malgré une rencontre glaciale à Moscou entre les chefs des diplomaties des deux puissances nucléaires. La guerre en Syrie demeure le contentieux le plus lourd entre Washington et Moscou.

« Ce serait merveilleux (…) si l’OTAN et notre pays pouvaient s’entendre avec la Russie », a-t-il lancé lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche avec le secrétaire général de l’Alliance atlantique Jens Stoltenberg.

Mais « à l’heure actuelle, nous ne nous entendons pas du tout avec la Russie », a reconnu Donald Trump, parlant même d’une « relation peut-être au plus bas (niveau) de tous les temps ».

Au même moment à New York, la Russie opposait son veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité présenté par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni et réclamant une enquête sur l’attaque.

La tension monte entre Washington et Pyongyang

Trump ne s’est pas contenté d’agir en Syrie, il a menacé de « résoudre le problème » nord-coréen seul, sans la Chine, tandis que la Corée du Nord se disait prête à la « guerre ». « La Corée du Nord cherche des ennuis. Si la Chine décide d’aider, ça serait formidable. Sinon, nous résoudrons le problème sans eux! « , a écrit mardi Donald Trump sur Twitter, en référence aux programmes nucléaire et balistique nord-coréens bannis par l’ONU.

Donald Trump avait accueilli Xi Jinping dans sa résidence privée en Floride pour une première rencontre placée sous le signe de la cordialité. Il avait avant ce sommet déjà annoncé être prêt à « régler » seul le problème nord-coréen si Pékin tergiversait trop longtemps.

Peu après le départ du président chinois, Washington a annoncé que le porte-avions USS Carl Vinson et son escorte faisaient route vers la péninsule coréenne, alors qu’ils devaient initialement faire escale en Australie.

Annoncé dans la foulée de la frappe punitive américaine en Syrie, l’envoi d’un porte-avions américain près des côtes nord-coréennes a été largement interprété comme une démonstration de force de l’administration Trump.

Certains experts ont en tout cas vu dans la frappe américaine en Syrie un message à Pékin et Pyongyang.

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