Medvedev et Poutine © Reuters

Poutine peut commencer à avoir peur de la jeunesse

Muriel Lefevre

Lors des manifestations du week-end dernier, les jeunes étaient nombreux. Dans la foulée, des professeurs ont demandé à leurs étudiants de bien réfléchir à ce qu’ils étaient en train de faire. « Votre comportement pourrait entraîner une guerre civile ». Des scènes qui ont été filmées et qui sont rapidement devenues virales.

Il y aurait eu des dizaines de milliers de manifestants. C’est le chiffre de participation le plus proche de la vérité selon le Standaard pour les près de 80 manifestations qui ont eu lieu à travers la Russie le week-end dernier.

Ils exprimaient leur colère contre le Kremlin. Rien qu’à Moscou, ils étaient 20.000. Bravant l’interdiction de rassemblement, ils semblaient comme sortis de nulle part.

Ce week-end-là, la police va arrêter plus de 900 manifestants dans un effort titanesque pour endiguer la foule. Pas de quoi enlever le sourire à l’opposant et candidat aux présidentielles russes Alexeï Navalny.

Surtout qu’il y a une autre nouveauté: les jeunes, parfois nés après l’arrivée de Poutine au pouvoir, étaient présents en nombre.

L’opposant numéro un à Vladimir Poutine

Alexeï Navalny, juriste de formation, dénonce depuis des années la corruption des élites en Russie sur son blog. Ses révélations sont en général ignorées des médias grand public. M. Navalny a lui-même été visé par plusieurs poursuites et condamné pour des affaires de détournement de fonds, ce qu’il considère comme une vengeance politique du Kremlin. M. Navalny a obtenu en octobre 2013 le score honorable de 27,2% à l’élection municipale à Moscou et s’est imposé ces dernières années comme l’opposant numéro un à Vladimir Poutine.

Par le pouvoir d’une révélation, il a réussi le tour de force de sortir les masses silencieuses de sa torpeur. Une révélation de taille tout de même précise encore Le Standaard.

Dmitri Medvedev à la tête d’un empire immobilier corrompu ?

« Medvedev peut voler autant et aussi ouvertement parce que (le président) Vladimir Poutine fait la même chose à une plus grande échelle », a écrit Alexeï Navalny lorsqu’il a présenté le nouveau rapport publié par son organisation, le Fonds de lutte contre la corruption (FBK). Selon lui, Dmitri Medvedev a « presque ouvertement créé un réseau corrompu de fondations caritatives à travers lesquelles il reçoit les pots-de-vin des oligarques et se construit frénétiquement des palais et des lieux de vacances à travers tout le pays ».

Via La Fondation Dar (« Don »), dirigée par Ilya Elisseyev, un de ses anciens camarades d’université, par ailleurs membre du conseil d’administration de Gazprombank, le Premier ministre russe détient une villa de 750 mètres carrés à Roubliovka, la banlieue chic de Moscou, une autre de 4 000 mètres carrés à Sotchi et une troisième de 2 700 mètres carrés près de Koursk, sur la terre de ses ancêtres. » dit Le Point. « Trois complexes auxquels s’ajoute l’immeuble de Saint-Pétersbourg, deux vignobles, dont un Toscan, évalué à 10 millions de dollars et deux yachts d’une valeur totale de 16 millions de dollars. Au total on parle de 1,1 milliard de dollars. « Des « dons » souvent consentis par des oligarques comme Alicher Ousmanov, proche de Poutine et troisième fortune du pays. » dit encore Le Point.

Ancien avocat, Dmitri Medevedev a été propulsé au pouvoir en 2008 par Vladimir Poutine quand celui-ci ne pouvait pas se présenter pour un troisième mandat consécutif. Président de 2008 à 2012 ayant accédé ensuite au poste de Premier ministre, Dmitri Medvedev a cherché à se donner l’image d’un dirigeant moderne, adepte des nouvelles technologies et désireux d’améliorer le climat des affaires du pays. Il aurait un salaire de 150.000 euros annuels. De quoi rendre suspects ses avoirs immobiliers.

La vidéo de 50 minutes publiée par Alexeï Navalny sur YouTube, dans laquelle il décrit les tactiques qu’aurait employées le Premier ministre russe, a été vue près de 16 millions de fois depuis sa mise en ligne. Cette enquête serait « la plus importante » réalisée par le FBK. Alexeï Navalny avait déjà dénoncé en décembre 2015 la fortune qu’aurait accumulée la famille du procureur général de Russie, Iouri Tchaïka.

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Menace de guerre civile

Divers enseignants ont pris peur en voyant les images de ce week-end. Ils ont été estomaqués par les déclarations de certains jeunes, dit De Standaard. Certains ont tellement paniqué qu’ils ont annoncé qu’ils allaient réintroduire les cours de patriotisme. D’autres ont même menacé de buser les élèves qui ne savent pas contrôler leurs faits et gestes.

Un professeur ira jusqu’à dire que « la corruption est ce qu’il y a de plus normal sur terre, c’est même essentiel à notre état fort. S’il n’y a pas de corruption, cela signifie que personne n’est nécessaire. Bien sûr, ceux qui exagèrent doivent voler en prison. Mais un peu de corruption ici ou là, c’est un signe d’un pays riche et solide ».

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Malgré ces reprises en mains musclées de certains membres du corps professoral, c’était oublier un peu vite la colère réelle des étudiants qui se sont opposés aux enseignants et même pour certains aux directeurs d’écoles. Des étudiants au fait de la technologie qui ont filmé discrètement et placé le tout sur les réseaux sociaux. Des vidéos qui, comme la vidéo de Navalny, sont devenues virales. Ou comment en tentant d’étouffer les braises, on lance un incendie …

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