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Pourquoi tant d’hésitation à aider le peuple libyen ?

Qualifiées de succès, les attaques sur le sol libyen ne font pourtant pas l’unanimité. Qu’est-ce qui freine la communauté internationale ? Est-ce le pétrole ou le sort des Libyens qui motive les forces de la coalition à agir contre Kadhafi ?

C’est le 17 mars dernier qu’un recours à la force pour protéger les civils libyens a été autorisé par l’adoption au Conseil de Sécurité des Nations unies de la « résolution 1973 ».

Alors que l’armée américaine qualifie les premiers raids au-dessus de la Libye de réels succès, certains membres de la communauté internationale restent sceptiques face à une telle intervention militaire.

Ainsi ,la Russie a demandé à la coalition internationale de cesser de recourir à la force de façon « non-sélective ». Le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères reste « convaincu que pour régler de manière stable le conflit interne en Libye (…) il faut rapidement arrêter les effusions de sang et que les Libyens entament le dialogue ».

La Chine, quant à elle, s’oppose fermement à l’usage de la force dans les relations internationales. Elle a ainsi regretté les attaques militaires de la coalition internationale. « Nous espérons que la Libye peut rétablir la stabilité aussi vite que possible et éviter de nouvelles victimes civiles liées à l’escalade d’un conflit armé », a déclaré Pékin.

L’Allemagne a refusé de prendre part à l’intervention armée. Tout en soutenant l’initiative de la coalition, les Allemands approuvent le refus d’Angela Merkel de participer aux opérations. Le pays redoute de voir l’Occident être plongé dans une longue mission, voire une guerre qui s’installerait dans la durée, en Afrique du Nord.

Du côté du Venezuela, Hugo Chavez a déclaré que cette intervention armée relevait de l’irresponsabilité et que cela constituait une ingérence dans les affaires intérieures d’un pays. « Nous exigeons un cessez-le-feu effectif et que l’on reprenne le chemin de la paix en Afrique du Nord », a déclaré le président vénézuélien. « L’action militaire des alliés contre la Libye a commencé. C’est profondément regrettable. Quelle irresponsabilité! Et derrière cela, la main des Etats-Unis et de leurs alliés européens », a-t-il encore commenté. « Il est lamentable que l’ONU se prête à avaliser cette guerre », mais « la main de l’Empire s’est imposée », a-t-il déclaré, faisant ainsi référence aux Etats-Unis. « Ils veulent s’emparer du pétrole de Libye », a-t-il dit.

Où se situe la Ligue arabe dans toute cette discussion ?

Dimanche, le secrétaire général de la Ligue arabe Amr Moussa a pour sa part critiqué les bombardements de la coalition internationale contre la Libye. Il a en effet déclaré que ces derniers s’écartaient de la mission principale de la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU. Des paroles qui surviennent alors que la Ligue arabe s’était pourtant rangée du côté de la coalition. « Ce qui s’est passé en Libye diffère du but qui est d’imposer une zone d’exclusion aérienne, et ce que nous voulons c’est la protection des civils et pas le bombardement d’autres civils », a-t-il déclaré à des journalistes.

Amr Moussa a cependant changé de discours ce lundi puisqu’il a affirmé que ses propos avaient été mal interprétés et qu’ils se voulaient avant tout inquiets face à une situation où des civils pourraient se retrouver pris dans les frappes de la coalition. « Nous sommes engagés envers la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU, nous n’avons pas d’objection à cette décision, surtout qu’elle n’appelle pas à une invasion du territoire libyen », a-t-il déclaré. « Nous travaillons en coordination avec les Nations unies pour protéger les civils en Libye », a-t-il ajouté.

Le pétrole encore et toujours au coeur des débats…

Lorsque les pays occidentaux ont tardé à prendre position lors des révoltes du monde arabe, on les a accusés de soutenir les régimes dictatoriaux. Maintenant qu’ils prennent les devants dans la crise libyenne, on les soupçonne de vouloir s’emparer de l’or noir. La Libye est le deuxième producteur de pétrole en Afrique, ses réserves sont estimées à 46,4 milliards de barils en 2011, ce qui en fait un des acteurs majeurs de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). A titre de comparaison, en 2008, l’estimation des réserves en Arabie saoudite était de 265 milliards de barils. La Libye dispose également de réserves importantes de gaz naturel qui sont, jusqu’à présent, peu exploitées.

« Nous intervenons pour permettre au peuple libyen de choisir lui-même son destin », a déclaré le président français Nicolas Sarkozy, le jour des premières frappes aériennes. Face à quoi les mauvaises langues murmurent déjà tout bas que sa principale motivation n’est qu’une aspiration à une bonne place pour les prochaines élections présidentielles.

Kadhafi dont on pourrait peut-être bientôt voir le portrait sur des pancartes « wanted » ne cesse de menacer la communauté internationale de violentes répressions. Le « guide » n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà commandité des attentats dans le passé. Un retour au terrorisme pointe-t-il déjà le bout de son nez ? Cette intervention de la coalition risque-t-elle de s’installer dans la durée ? Baptisée « L’aube de l’Odyssée », l’opération rappelle l’épopée grecque d’Homère, où Ulysse a tout de même mis dix bonnes années à retourner sur son ile d’Ithaque…

Ghizlaine Chérif (stg)

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