© Reuters

Pourquoi l’affaire des emails d’Hillary Clinton est loin d’être anodine

Le Vif

L’affaire des emails d’Hillary Clinton est bien plus complexe qu’une simple histoire de serveur privé utilisé par une Secrétaire d’Etat. Cela montre également la volonté de la démocrate de cacher une partie de ses activités.

Lors de l’enquête du Congrès sur l’affaire de Benghazi, où il était demandé à Hillary Clinton de justifier certaines de ses actions, ses échanges de mails ont été réclamés. Mais ces derniers étaient inaccessibles. En voici l’explication : lorsqu’elle était Secrétaire d’Etat, pendant 4 ans, la candidate démocrate à la présidentielle a échangé des dizaines de milliers d’emails sur un serveur privé. Or, utiliser une messagerie personnelle plutôt que la boîte officielle de l’administration va à l’encontre de la loi fédérale, qui instaure que les correspondances officielles doivent d’être conservées dans leur intégralité.

C’est cette révélation qui amène le FBI à commencer une enquête. Sous la pression, Clinton transmet tout de même une partie de ces emails au Département d’Etat, ayant au préalable supprimé des emails considérés comme strictement personnels, étant donné l’usage double de sa messagerie. Mais ces emails, délibérément effacés par la démocrate, ne contiennent-ils vraiment que des éléments personnels ? Le doute subsiste.

Hillary Clinton continue de se défendre, notamment dans la presse : elle affirme n’avoir jamais utilisé son serveur privé pour transmettre des données « classées. Pourquoi alors utiliser une boîte privée ? Pour la démocrate, c’est une question de commodité : « je pensais que ça serait plus facile pour moi d’avoir un seul outil pour mes mails personnels et professionnels », se défend-elle en mars 2015.

Défense et tentatives de dissimulation

Pour certains, la suppression délibérée d’emails faisant l’objet de plusieurs enquêtes (Benghazi par exemple) est plus que discutable. L’ex-Secrétaire d’Etat se rend-elle dès lors coupable d’obstruction à la justice ? Si certains le pensent, Clinton, une fois de plus, se défend. Selon elle, la commission en question ne l’a jamais convoquée officiellement sur le sujet.

Lors du lancement de sa campagne pour la présidentielle, elle reconnait cependant sur sa page Facebook officielle avoir commis « une erreur », dont elle compte « assumer la pleine responsabilité ». Elle reconnait également qu’elle « aurait dû avoir deux comptes, l’un personnel l’autre professionnel ». Mais l’utilisation d’un serveur privé n’est plus le coeur du problème. Ce qui l’est, ce sont ses tentatives répétées de dissimuler une partie de ses activités ou ses intentions de départ.

En juillet dernier, le directeur du FBI, James Comey, conclut l’enquête en qualifiant les agissements de la démocrate « d’extrême négligence », non passible d’une inculpation, car sans « intention claire de violer la loi ». Cette conclusion devait mettre un point final à l’enquête. Mais James Comey revient à la charge, dix jours avant l’élection du 8 novembre, pour apporter « des compléments d’informations », des « éléments neufs » à cette enquête qui remue une fois de plus la course à la Maison-Blanche. « J’ai donné mon accord pour que le FBI prenne les mesures d’enquête appropriées afin de permettre aux enquêteurs d’examiner ces emails et de déterminer s’ils contiennent des informations classifiées, et pour déterminer leur importance dans notre enquête », a-t-il ajouté.

Une affaire d’Etat ?

Mais le scandale des emails peut-il pour autant être considéré comme une affaire d’Etat ? Pour certains, oui. C’est le cas de Gérald Olivier, journaliste et titulaire d’un Master en Histoire américaine de l’université de Californie. Dans un article pour Atlantico, il explique que le point important de ce scandale n’est pas uniquement le contenu des emails, mais plutôt la volonté, délibérée, de l’administration de cacher certaines activités aux citoyens américains. Pour lui, Hillary Clinton s’estime « au-dessus des règles administratives » et « a pris des libertés inconsidérées avec les responsabilités de sa fonction ».

Et la candidate démocrate n’a cessé de poursuivre ce chemin en niant les accusations et en donnant des explications très laconiques à la presse et devant le Congrès. Risque-t-elle de faire de même si elle devient Présidente des Etats-Unis ? C’est cette question précise qui rend l’affaire d’autant plus importante.

Pour Hillary Clinton, ce rebondissement de dernière minute du FBI n’aura aucune portée, si ce n’est de la faire chuter dans les sondages. Selon elle, « le dossier est vide » et la nouvelle enquête aboutira sur les mêmes conclusions qu’au mois de juillet. Clinton a jugé « profondément inquiétant » l’envoi par le patron du FBI d’un courrier à des responsables du Congrès annonçant la découverte d’une potentielle ramification dans l’enquête. Les enquêteurs du FBI doivent à présent déterminer si ces messages contenaient des informations confidentielles.

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Contenu partenaire