© Stijn Felix

Pourquoi Donald a rompu avec Angela : la politique de confrontation des États-Unis et de l’Allemagne

Qu’il s’agisse de commerce ou de l’OTAN, les États-Unis et l’Allemagne, alliés fidèles depuis des décennies, se volent dans les plumes de manière inédite. Il est frappant également que Donald Trump ne soit pas le seul à critiquer Angela Merkel.

Donald Trump possède un talent diplomatique: il est capable de dire la même chose que ses prédécesseurs, mais en ouvrant les yeux au monde entier. Et surtout il l’exaspère. Pour ce qui est du commerce et de la sécurité, le président républicain poursuit en grande partie la politique de son prédécesseur démocratique. « Au fond, il dit la même chose que Barack Obama, mais en nettement plus grossier », déclare Sven Biscop, spécialiste en Défense européenne à l’Institut Egmont à Bruxelles. Ferdi De Ville, expert en politique commerciale européenne à l’Université de Gand, partage son avis : « Obama se plaignait déjà du grand excédent commercial de l’Allemagne. C’est surtout le ton de Trump qui est différent. »

Aujourd’hui, le rapport sur les relations germano-américaines publié sur le site web du ministère américain du ministère de l’Intérieur indique : « Les États-Unis reconnaissent que la sécurité et la prospérité des États-Unis et de l’Allemagne dépendent significativement l’une de l’autre. « Mais pour combien de temps encore ? S’il n’en tient qu’à Donald Trump, on pourra bientôt jeter ce rapport à la poubelle. « Les Allemands sont mauvais. Très mauvais », a-t-il fait consigner lors de son passage à Bruxelles. « Regardez les millions de voitures qu’ils vendent aux États-Unis ! C’est terrible. Nous allons leur mettre des bâtons dans les roues. »

La réponse d’Angela Merkel ne s’est pas fait attendre. Une bière à la main, elle s’est adressée aux membres du CDU/CSU avec une certaine inquiétude. L’époque où nous pouvions faire confiance à d’autres est « en partie » révolue, a déclaré la chancelière allemande. « Nous Européens, nous devons prendre notre sort en main. »

Avant que l’odeur de bière n’ait eu le temps de s’évaporer, Trump a rétorqué sur son compte Twitter : « Nous avons un excédent commercial GIGANTESQUE avec les Allemands, et ils paient BEAUCOUP MOINS que ce qu’ils devraient pour l’OTAN et les forces armées. C’est très mauvais pour les États-Unis. Cela va changer. »

La façon dont Trump et Merkel s’engueulent en public est inédite, d’autant que leurs pays sont alliés depuis des décennies, qu’ils font beaucoup de commerce ensemble et qu’ils font tous deux partie de l’OTAN. L’origine allemande du grand-père de Trump – en 1885 Frederick Trump est parti de Kallstadt pour s’installer à New York City – ne peut apaiser les esprits. Les millions de dettes privées de Trump à la Deutsche Bank ne le peuvent pas davantage.

Que Sean Spicer, le porte-parole de la Maison-Blanche prétend mordicus que les deux chefs d’État entretiennent une relation « assez fantastique » fait penser le contraire. Le principal pays du continent américain mène une politique de confrontation avec le principal pays du continent européen. Il y a deux champs de bataille : le commerce et la géopolitique. Jusqu’où iront les effusions de sang ?

1. Commerce: Trumponomics

Lors de sa campagne électorale, Donald Trump a été très clair : « America First ! » Les États-Unis doivent surtout penser à eux. Pour Trump, ces choses-là avaient mal tourné ces dernières années. Les États-Unis dépensaient des milliards de dollars dans d’autres pays, alors qu’aux États-Unis l’industrie, les emplois et la prospérité s’effritaient. Pour inverser la vapeur, Trump souhaite relancer l’industrie américaine. Lors de la campagne, il a promis une croissance économique annuelle de 5%. Depuis son entrée en fonctions, celle-ci est retombée à 3%, mais pour la majorité des économistes même ce chiffre-là est presque impossible à atteindre.

La croissance doit se faire en baissant les impôts, en supprimant toutes sortes de règles qui « étranglent » les entreprises, par les travaux d’infrastructure et le protectionnisme. Quand l’hebdomadaire britannique The Economist a interrogé Trump sur sa politique économique et l’a interrogé sur l’existence des « Trumponomics », il a hoché la tête : « C’est vraiment lié à notre dignité en tant que nation. Et aux accords commerciaux justes. »

Comment faut-il financer les Trumponomics ? Ce n’est pas clair. On craint qu’ils fassent un gros trou dans le budget américain. Aujourd’hui, les finances publiques y sont un mauvais état : les États-Unis ploient sous une dette publique de près de 23 billions de dollars. Cela revient à 73 000 dollars ou à 65 000 euros par habitant. À titre de comparaison : en Belgique, c’est 40 000 dollars par habitant. Larry Summers, un ancien ministre des Finances américain, avait déjà qualifié les perspectives de croissance et le budget de Trump de ‘simply ludicrous’ – tout simplement absurde.

La protection du marché constitue une partie importante des Trumponomics. Le président souhaite que ses compatriotes achètent des produits américains et non des produits importés, ou au moins des produits fabriqués sur le sol américain. Sa colère vise surtout le Mexique et la Chine qui « submergent » son pays de produits bon marché. Comme l’Allemagne est troisième, Trump dénonce continuellement l’excédent commercial américain par rapport à l’Allemagne : l’année dernière, les États-Unis ont importé pour 114 milliards de dollars depuis l’Allemagne, mais ils n’ont exporté que 49 milliards de dollars vers l’Allemagne, ce qui revient à un excédent commercial de 65 milliards de dollars ou 58 milliards d’euros .

C’est impossible à nier: ces dernières années l’Allemagne a fourni une prestation économique brillante. La différence avec l’économie américaine en déclin est importante. En outre, l’Allemagne s’est transformée en ‘Exportweltmeister’ ou primus de l’exportation. L’exportation y représente un quart de tous les emplois, et près de la moitié du produit intérieur brut (pib). L’excédent commercial allemand s’élève à 253 milliards d’euros, soit 8% du PIB. Cela fait de l’Allemagne le deuxième pays en matière d’excédent commercial, juste après la Chine qui est beaucoup plus grande. Les États-Unis sont en queue de peloton, avec un excédent commercial de plus de 500 milliards de dollars (450 milliards d’euros).

« L’excédent commercial avec l’Allemagne est énorme », déclare Ferdi De Ville. « Les critiques émises par Trump ne sont pas nouvelles. Le président Obama, le Fonds monétaire international, d’autres pays européens : tous se sont déjà plaints. »

« Ce n’est tout de même pas de notre faute s’il y a une telle demande mondiale pour nos produits « , dit-on en Allemagne. « Personne n’oblige les Américains à acheter une Porsche. » L’Allemagne exporte toutes sortes de produits vers les États-Unis : machines, appareil télécom, médicaments et fûts de bière. Les voitures, qui représentent un quart de l’exportation, sont insupportables à Trump. Il n’aime pas voir les Américains en BMW, il souhaite qu’ils paradent sur l’autoroute en en Cadillac ou en Lincoln. Il menace d’instaurer un prélèvement à l’importation de 35% sur les marques de voiture allemande, ce qui rendrait un achat nettement moins attrayant.

Cependant, ces marques ont également des filiales aux États-Unis. La plus grande usine de BMW du monde, qui emploie 8800 personnes, est située à Spartanburg, en Caroline du Sud. Pour l’instant, Daimler investit 1,3 milliard de dollars dans l’extension de l’usine Mercedes à Tuscaloosa en Alabama. Volkswagen assemble 70 000 voitures aux États-Unis. BMW et Mercedes font même partie du top 5 des exportateurs de voitures américains. Cela n’empêche pas les États-Unis d’importer beaucoup de voitures allemandes : souvent depuis l’Allemagne, mais aussi du Mexique.

Les critiques du Trump sont plus fondamentales: il estime que l’Allemagne manipule sa monnaie. Peter Navarro, qui dirige le Conseil commercial national des États-Unis, a déclaré au Financial Times que l’Allemagne gardait le cours de l’euro artificiellement bas. Il est vrai que ces dernières années l’euro a baissé de valeur. Début 2014, il était encore à presque 1,40 dollar, aujourd’hui il oscille autour des 1,10 dollar. En d’autres termes : aux États-Unis, une BMW ou une Mercedes produite en Europe coûte presque un quart de moins qu’il y a trois ans.

Tous les spécialistes s’accordent à dire qu’aujourd’hui l’euro vaut beaucoup moins que ce qu’aurait valu le mark allemand. D’après un rapport du FMI, l’euro est sous-évalué de 10 à 20% pour l’Allemagne parce qu’il est utilisé dans 19 pays et que l’Allemagne possède de loin l’économie la plus forte. Si le mark allemand existait encore, il augmenterait à ce point de valeur que les voitures allemandes deviendraient plus chères et donc plus difficile à exporter.

Cela signifie-t-il que l’Allemagne manipule le cours du change ? Angela Merkel rejette résolument cette accusation : le cours bas de l’euro découle plutôt de la politique de la Banque centrale européenne (BCE) qui est indépendante et qui regarde toute la zone euro. Depuis quelque temps, la BCE achète des effets publics de sorte que les intérêts baissent. Elle espère booster l’économie dans la zone euro, et surtout dans les états membres du sud de l’Europe. Du coup, le cours de l’euro est bas. « L’Allemagne ne manipule pas ce cours, mais en profite », résume Ferdi De Ville.

L’exportation allemande tire également profit des salaires bas du pays. Le spécialiste européen Wolfgang Münchau en avait déjà parlé au Financial Times : après l’éclatement de la crise financière, l’Allemagne a rendu ses exportations compétitives en baissant les salaires. Du coup, les produits allemands bon marché trouvaient facilement un marché. De Ville: « Les États-Unis trouvent que de cette façon l’Allemagne maintient politiquement son excédent commercial. Si les Allemands laissent leurs salaires augmenter, leurs entreprises deviennent moins compétitives.

Que l’Allemagne importe peu, contribue à expliquer le grand excédent commercial de l’Allemagne. C’est pourquoi Trump suggère aussi de commander plus de matériel militaire aux États-Unis. Ce serait bénéfique pour l’économie américaine et cela diminuerait l’excédent commercial allemand.

Sur ce plan-là non plus, Trump n’est pas seul. Ces dernières années, l’état allemand a fait peu d’investissements, en routes et en ponts, en infrastructure numérique et en écoles, notamment. « S’il investissait plus, une partie pourrait aller aux entreprises étrangères », déclare De Ville. « L’excédent allemand pourrait diminuer, et l’Allemagne pourrait stimuler l’économie européenne et mondiale.  » Mais jusqu’à nouvel ordre, les Allemands ne sont guère enclins à augmenter les dépenses publiques. Ils accordent davantage d’importance à un excédent budgétaire.

Trump a déjà fait comprendre plusieurs fois qu’il voulait parler de l’excédent commercial allemand avec Merkel. Chaque fois, Merkel lui répond que l’Allemagne ne peut négocier seule avec les États-Unis, parce que le commerce est une affaire européenne. Selon certains, Trump se servirait de cette tactique pour essayer de monter les pays de l’Union européenne les uns contre les autres.

De Ville: « Trump a déjà fait savoir plusieurs fois qu’il n’était pas un défenseur de l’UE. En accusant explicitement l’Allemagne de manipuler le taux de change, il essaie de semer la zizanie. Quelle que soit la vigueur du ton utilisé, d’autres états membres de l’UE partagent une grande partie de leurs contrariétés au sujet de la compétitivité et de la politique économique de l’Allemagne. L’Allemagne affiche également un excédent commercial par rapport à beaucoup de pays européens.

À tout cela s’ajoute que l’UE dans sa globalité possède un grand excédent commercial par rapport aux États-Unis : l’année passée, elle a exporté pour 131 milliards d’euros de plus vers les États-Unis qu’elle y a importé. Ce que Trump reproche à l’Allemagne vaut dans une certaine mesure pour toute l’UE et pour la plupart des pays de la zone euro. La Belgique est un des rares pays européens par rapport auquel les États-Unis ont un excédent commercial : les Américains exportent pour 29 milliards d’euros chez nous et importent pour 15,3 milliards d’euros depuis la Belgique. Résultat : un excédent commercial de 13,7 milliards d’euros.

Les États-Unis sont notre principal partenaire commercial en dehors de l’UE. La Belgique compte 1000 entreprises américaines, ce qui revient à 130 000 emplois, ce qui en fait le deuxième employeur étranger. À son tour, la Belgique compte 160 000 emplois aux États-Unis, ce qui est plus que de grands pays économiquement importants tels que l’Inde, le Mexique, la Chine, l’Arabie saoudite et Israël.

Le Secrétaire d’État au Commerce extérieur Pieter De Crem (Cd&V) espère que Donald Trump tiendra compte de ces chiffres. La semaine dernière, De Crem a discuté de la stratégie économique avec tous les diplomates belges aux États-Unis à Washington et tous les représentants des régions. « Depuis des années, les Belges sont un excellent partenaire des Américains », a déclaré le secrétaire d’État. « Cela doit nous aider à contribuer leur agenda économique extérieur. »

Ce rôle sera-t-il également dévolu à l’Allemagne et par extension à toute l’UE ? Ou assisterons-nous tout de même à une guerre commerciale entre les États-Unis et l’Allemagne ? Ou même entre les États-Unis et l’Union européenne ? Une telle guerre commerciale ferait du tort à tout le monde, mais encore davantage aux pays qui exportent le plus, tel que l’Allemagne. Personne n’ose prédire l’issue : le président américain est trop imprévisible pour ça.

2. Géopolitique: le tournant de l’Amérique vers l’Asie

L’Allemagne et l’Amérique sont non seulement économiquement indépendantes, elles sont également d’incontestables partenaires de sécurité. Hormis le Royaume-Uni, peu de pays entretiennent une relation aussi privilégiée avec les États-Unis que l’Allemagne. Cette relation provient surtout de l’Allemagne de l’Ouest d’après-guerre, redressée grâce au plan Marshall américain. Après les attentats du 11 septembre 2011, le chancelier de l’époque Gerhard Schröder a été l’un des premiers à promettre une « solidarité inconditionnelle » aux Américains. L’armée allemande a participé à l’invasion américaine en Afghanistan : c’est une grande étape pour le pays pacifique, qui évite les opérations militaires depuis la Seconde Guerre mondiale.

Depuis, les relations se sont troublées. Ainsi, Schröder a refusé de participer à la coalition of the willing qui a renversé le régime de Saddam Hossein en Irak. En 2008, le candidat présidentiel Barack Obama a encore été acclamé par 200 000 Allemands au Tiergarten allemand, mais les révélations sur la surveillance de masse américaine, où le service de renseignements NSA a même mis le GSM d’Angela Merkel sur écoute, n’ont pas fait de bien aux relations diplomatiques.

D’autre part, tant Obama que son ancien ministre des Affaires étrangères Hillary Clinton ont exprimé publiquement leur agacement vis-à-vis des « paresseux » de l’OTAN : des pays qui contribuent peu à l’alliance, mais qui bénéficient de sa protection. L’Allemagne peut se sentir concernée : elle ne consacre que 1,2% du PIB à la Défense, alors que l’OTAN aspire à un minimum de 2%. La Belgique prouve qu’on peut faire pire : nous ne prévoyons même pas 1% de notre PIB pour la Défense.

Pendant sa campagne présidentielle, Trump a qualifié l’OTAN de « superflue et plus de notre époque ». Il est revenu sur cette position, mais il exige que tous les états membres allongent de l’argent. Quand il a accueilli Angela Merkel à la Maison-Blanche en mars, il a même prétendu que l’Allemagne devait de l’argent à l’OTAN. Cette déclaration suscite des doutes sur ses connaissances : les 2% auxquels il aspire ne concerne pas le pot collectif de l’OTAN, il concerne la quantité d’argent prévue pour la Défense. Il ne peut donc être question de retards de paiement.

D’après Sven Biscop, connaisseur de l’OTAN, les déclarations de Trump cadrent dans une évolution en cours depuis longtemps: les intérêts américains et européens ne coïncident plus automatiquement. En 2012, Obama a déjà initié le ‘pivot to Asia’, où l’Amérique déplace progressivement ses priorités de sécurité vers l’Asie et surtout la Chine. Biscop estime que Trump tient le même discours. « Cela nous force à regarder la réalité en face. Il est urgent que l’Europe ait un plan B en matière de défense. »

Aujourd’hui, l’Allemagne et par extension l’Europe, n’est pas prête à voler de ses propres ailes. Au sein de l’OTAN, l’Allemagne est plutôt un partenaire passif, rarement enclin aux interventions militaires, même si la situation semble changer. En février, la ministre de la Défense Ursula von der Leyen a annoncé qu’elle révélerait son budget à environ 65 milliards d’euros, à peu près l’équivalent du budget russe. En chiffres absolues, seuls les États-Unis consacrent plus d’argent au sein de l’OTAN.

« Pourtant, il ne s’agit pas que d’argent », met Biscop en garde. « Il ne suffit pas que les pays européens dépensent plus pour la défense. Ils doivent aussi collaborer plus étroitement. C’est possible uniquement si l’Allemagne et la France tirent la charrette. « Malgré le second souffle dont bénéficient les relations germano-françaises depuis l’élection du président Emmanuel Macron, c’est tout sauf évident. « Merkel et Macron doivent concilier deux préoccupations fondamentales », estime Biscop. « L’Allemagne a toujours eu peur d’une intégration plus profonde, parce qu’elle craint de devoir participer à des actions militaires contre son gré. Et la France a peur de l’inverse : qu’il n’y ait plus d’opérations. »

Même si les Allemands et les Français se regardent dans les yeux, la question reste: qu’est-ce qui sera défendu? En théorie, l’UE mène une politique étrangère, portée par Federica Mogherini, la chef de la diplomatie de l’Union européenne. En pratique, les intérêts nationaux contrecarrent encore souvent cette politique. « Si nous voulons réprimander la Chine de rouler des mécaniques en Mer de Chine du Sud, il y a toujours un état membre qui a un petit dossier d’investissement en cours et qui n’ose donc pas soussigner de propos trop forts. Comme ce genre de décisions se prend unanimement, l’UE ne réussit jamais à taper du poing sur la table. » Du coup, Biscop ne voit qu’une seule possibilité : abolir le principe d’unanimité. Aujourd’hui, cela semble de la fiction.

Reste à voir aussi si le reste de l’Europe attend un leadership militaire allemand. Les Pays-Bas, qui se montrent toujours critiques contre une intégration politique plus poussée, considèrent le rapprochement franco-allemand avec défiance. Les pays du sud, où en cas de critique contre l’Allemagne les médias n’hésitent pas à dessiner une moustache d’Hitler sur les photos, semblent peu enclins à accepter un leadership allemand plus assertif. Et pour beaucoup pays de l’Est, traditionnellement plus attachés à l’adhésion de l’OTAN, les perturbations germano-américaines risquent de tourner au choix déchirant entre économie et sécurité.

Toute l’affaire risque de devenir encore plus difficile pour l’Europe maintenant que Trump a annoncé qu’il sortait de l’accord climatique de Paris. C’est évidemment une mauvaise nouvelle pour la lutte contre le réchauffement de la planète. À présent, le président a les mains libres pour se remettre à promouvoir le charbon. Et grâce à la révolution de schiste, les États-Unis n’étaient déjà plus dépendants de l’importation pour leur approvisionnement en énergie. L’Europe ne peut que rêver d’une telle position de luxe. « Pour son énergie, l’Europe restera toujours dépendante de fournisseurs externes », déclare Thijs van de Graaf, professeur en politique énergétique internationale à l’Université de Gand. « Même pour l’énergie renouvelable, il faut des matériaux et des matières premières, et nous n’en avons pas assez en Europe. » En outre, l’Europe dépend de la Russie pour le pétrole et le gaz, qui n’hésite pas à utiliser ses matières premières comme moyen de pression.

En se retirant de l’accord climatique, Trump s’est mis presque le monde entier à dos. Il défie tout le monde: il souhaite un nouveau – ou que lui importe? – pas d’accord du tout. Le reste du monde – les Allemands, les Français et les Italiens en tête suivis de pays comme la Chine et l’Inde – a déjà déclaré que de nouvelles négociations étaient exclues. La décision de Trump fait pression sur les relations : le reste du monde reste-t-il unanime contre lui, ou sa décision provoquera-t-elle un effet domino où les autres pays privilégient leurs intérêts personnel. ‘My country first!’ sera-t-il la norme ?

Même si Donald Trump déclare souvent la même chose que Barack Obama, bien que de façon trumpienne peu diplomatique, de plus en plus d’observateurs voient un changement fondamental dans les relations entre les États-Unis et l’Europe. Dans le Financial Times, l’observateur Martin Wolf indique que Trump préfère les régimes autocratiques que sont la Russie, la Turquie ou l’Arabie saoudite. Avec Poutine, Erdogan ou Salmane ben Abdelaziz Al Saoud, pas de sermon sur les droits de l’homme tel que rabâché par les leaders occidentaux. Même si l’Occident libre n’est pas encore mort, il semble mourant en tant qu’alliance de pays aux intérêts et valeurs parallèles. Pour cela, il ne faut même pas de guerre.

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