Gérald Papy

« Pour Macron, il faudra éviter le piège Obama »

Gérald Papy Rédacteur en chef adjoint

Dans l’adhésion que suscite un dirigeant politique, il ne faut pas négliger – ni surestimer – la force des symboles. La solennité qui a présidé à la célébration au Louvre de la victoire d’Emmanuel Macron et la sobriété qui a marqué ses très studieuses premières journées d’après-élection ont démontré une grande maîtrise de la part du jeune président élu.

Dans la même veine positive, la vidéo de soutien de Barack Obama a, à coup sûr, crédibilisé la  » présidentialité  » du candidat d’En marche ! à la veille du second tour. A contrario, on se rappellera combien la soirée au très chic Fouquet’s et la villégiature sur le yacht du milliardaire Vincent Bolloré avaient pu empoisonner une bonne partie de la présidence de Nicolas Sarkozy. Le parrainage du 44e président des Etats-Unis recèle pourtant pour Emmanuel Macron une dimension piégeuse. Des deux mandats d’Obama, l’histoire, pour certains, ne retiendra que l’accession à la tête de la plus grande puissance mondiale d’un premier président noir, qui plus est après l’abrogation par son successeur de son principal fait d’armes, l’Obamacare. Emmanuel Macron est-il promis au même destin : ne rester dans l’histoire de France que comme le plus jeune président de la République ?

Après huit années de politique néo-conservatrice de George W. Bush, le jeune démocrate Barack Obama avait soulevé énormément d’espoirs dans une bonne partie de la population américaine. Emmanuel Macron – autre époque, autre contexte, autre héritage – ne provoque pas nécessairement d’aussi hautes attentes. On a même peiné, pendant la campagne électorale, à trouver dans le programme d’En marche ! la mesure phare qui marquerait le quinquennat ; ce qui a failli entraver sa candidature et ce qui explique en partie la relative faiblesse du vote d’adhésion dont il a in fine bénéficié.

u0022Avoir été élu sans avoir dû promettre monts et merveilles est un atout pour Macron. Les citoyens désespèrent des promesses non tenuesu0022

Mais aujourd’hui, avoir été élu sans avoir dû promettre monts et merveilles se révèle un atout. Emmanuel Macron a pris le parti de la révolution douce en avançant des propositions concrètes, réalisables et de nature à produire des effets à court terme. La démarche s’inscrit dans l’air du temps des déçus de la politique et des prafistes (les tenants du  » plus rien à faire « ). Une grande partie des citoyens européens désespèrent des promesses non tenues et des chantiers projetés qui ne trouvent pas d’issues. Du concret, du palpable, du tangible, c’est ce à quoi ils aspirent bien plus qu’à la promesse d’un grand soir.

L’ambition vaut aussi pour l’Union européenne à laquelle l’élection d’Emmanuel Macron pourrait donner un nouveau souffle si ses dirigeants leaders, concomitamment, décidaient de cibler quelques dossiers précis et cruciaux (sur la lutte antiterroriste, la croissance et l’emploi, l’immigration…) pour les faire véritablement progresser. Avec la même préoccupation pédagogique dont semble faire montre le président français élu. D’aucuns prétendent que l’Europe continentale, à la faveur des scrutins en Autriche, aux Pays-Bas et en France, a fait barrage à la vague populiste venue du monde anglo-saxon. Les progressions électorales du Parti de la liberté néerlandais et du Front national français doivent nous convaincre que le jugement est hâtif et trop optimiste. Il reste que la tendance contemporaine au déclinisme trouve de plus en plus d’adversaires. Justin Trudeau, Angela Merkel et Emmanuel Macron aujourd’hui, Martin Schulz (s’il détrône la chancelière allemande aux élections de septembre) et Matteo Renzi demain ? Aux sommets du G7 en 2018, face aux Donald Trump, Theresa May et autres Shinzo Abe, le camp des réformistes pourrait en imposer.

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