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Pour échapper aux horreurs de la guerre, certains enfants syriens se suicident

Le Vif

Selon un rapport de l’organisation internationale Save the Children, en Syrie, des enfants âgés d’à peine 12 ans s’automutilent, se droguent et vont même jusqu’au suicide afin d’échapper aux horreurs de la guerre qui dure depuis plus de 6 ans.

Au moins 3 millions d’enfants vivent dans des zones de guerre en Syrie et sont confrontés chaque jour aux bombardements aériens et aux tirs d’obus dans un conflit qui entame sa septième année.

Un enfant syrien sur quatre risque de développer des troubles mentaux. Au total, on parle de 2,5 millions de jeunes personnes vulnérables, selon un rapport de l’ONG Save The Children, intitulé « Invisible Wounds » (blessures invisibles) consacré à l’impact de la guerre sur la santé mentale des enfants. C’est le premier document aussi étoffé à ce sujet qui parait.

Depuis le début du conflit en 2011, près de 5 millions de Syriens ont fui le pays. 13,5 millions ont besoin d’aide urgente. Et parmi eux, la moitié sont des enfants, rapporte de son côté Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (BCAH).

Les entretiens menés auprès de plus de 450 enfants et d’adultes dans le cadre de ce rapport montrent un haut niveau de stress psychologique parmi les enfants. Quelque 84% d’entre eux ont évoqué comme première cause de leur stress les bombardements aériens et les tirs d’obus. Les enfants interviewés disent avoir trop peur que pour aller jouer dehors, ne vont plus à l’école et ont pour la plupart un proche ou un ami décédé. Les symptômes vécus par ces enfants sont variés. Ils vont de cauchemars, d’énurésie nocturne, à des explosions de colères, en passant par des envies suicidaires et de la dépression. 48% des adultes ont aussi rapporté que les enfants avaient perdu leur capacité à s’exprimer ou développé des difficultés d’élocution depuis le début de la guerre.

« Il y a de cela 5 à 6 mois, un enfant de 12 ans s’est donné la mort. Nous n’avons jamais vu cela auparavant, même pas chez les adultes », déclare un des humanitaires dans le rapport. « Son père a été tué par une bombe. Ils ont essayé de lui faire comprendre que son père était devenu un martyr parti au paradis. Le gamin a donc cru que s’il se suicidait, il le reverrait. Il s’est suicidé. »

Les enfants de la ville syrienne de Madaya sont « psychologiquement démolis et épuisés », selon un enseignant cité dans le rapport de l’ONG. « Ils dessinent des enfants qui se font massacrer, ou des chars, ou le siège et le manque de nourriture ». « Les enfants espèrent mourir pour aller au paradis et être ainsi au chaud, manger et jouer », raconte un autre enseignant de cette ville de Syrie.

La guerre en Syrie pourrait ainsi engendrer une génération « perdue » d’enfants en raison des traumatismes endurés sous les bombes, selon l’organisation humanitaire Save the Children. « Le risque d’avoir une génération brisée, perdue par les traumatismes et un stress extrême, n’a jamais été aussi grand », selon elle.

Une génération brisée

La psychologue Marcia Brophy a eu des contacts avec plus de 450 enfants syriens pour établir ce rapport. Elle déclare que les enfants vivent dans un état de stress continu, un « stress toxique » qui pourrait causer de sérieux problèmes de santé sur le long terme. « Le corps de ces enfants est dans un mode permanent de combat ou de fuite et l’augmentation constante du niveau de stress toxique aura certainement de grandes conséquences sur le long terme« , selon la psychologue.

De plus en plus d’enfants s’automutilent, se droguent et passent au suicide, raconte-t-elle. Et cela, de plus en plus jeunes. « C’est très inquiétant. Mais ce n’est pas vraiment une surprise vu que ces enfants vivent dans un environnement très stressant. C’est une manière de réagir face à une situation anormale et stressante. » La psychologue est d’avis que les communautés doivent davantage aborder les problèmes de santé mentale et que les organisations humanitaires doivent faire des soins de santé leur priorité. « C’est un sujet tabou, il est très difficile d’en parler. Quand il s’agit d’une situation conflictuelle qui perdure, nous devons prendre en compte la santé mentale et le soutien psychologique lors de chaque guerre. »

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