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Pour contrer le Nobel, la Chine lance son prix Confucius

Le prix Nobel de la paix a été décerné à un opposant chinois… Ulcéré, Pékin réplique et crée son propre « prix de la paix », décerné ce jeudi.

La Chine n’a pas du tout apprécié que le prix Nobel de la paix 2010 soit attribué à Liu Xiaobo, bête noire de Pékin. Elle l’a largement fait savoir depuis l’annonce, début octobre. Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a enfoncé le clou en qualifiant cette semaine de « clowns » les membres du comité Nobel qui remettront symboliquement le prix de la paix, ce vendredi.

Pékin a d’ailleurs fait pression sur de nombreuses représentations étrangères à Oslo, avec plus ou moins de succès selon les pays, pour qu’elles boudent la cérémonie. Cérémonie maintenue en l’absence du dissident chinois qui purge une peine de 11 ans de réclusion en Chine pour ses convictions démocratiques.

Mais la réplique chinoise va un peu plus loin…L’idée lancée par un tabloïd pro-gouvernemental flottait depuis trois semaines en Chine, et ce mercredi, une association chinoise jusqu’ici inconnue a annoncé la création d’un « prix de la paix Confucius » qui doit traduire « e point de vue du peuple chinois sur la paix ». Et afin de bien montrer qu’il s’agit d’un anti-Nobel, la remise du prix aura lieu dans la foulée, ce jeudi, soit la veille de la cérémonie à Oslo!

Des précédents en URSS et sous l’Allemagne nazie La Chine n’est pas la première à « inventer » un anti-Nobel. L’URSS avait lancé en 1949 sa propre distinction, le prix Staline pour la paix rebaptisé prix Lénine pour la paix. Parmi les lauréats, le poète chilien Pablo Neruda, le dramaturge allemand Bertold Brecht, le peintre espagnol Pablo Picasso, l’architecte brésilien Oscar Niemeyer ou la militante américaine Angela Davis.

Un autre précédent existe, en 1936, sous l’Allemagne nazie. Pour protester contre l’attribution du prix Nobel de la paix au pacifiste Carl von Ossietzky, enfermé dans un camp de concentration, Adolf Hitler annonçait la création du prix national pour l’art et la science, après avoir interdit à tout autre citoyen allemand de recevoir le prix Nobel. Parmi les récipiendaires, aucun ne semble avoir été opposé aux positions nazies… L’un d’entre eux a même été jugé au tribunal de Nuremberg et exécuté.

Et comme sous l’Allemagne nazie de 1936, comme Carl von Ossietzky, Liu Xiaobo ne pourra assister à la cérémonie de remise du prix Nobel de la paix à Oslo, ni ne pourra être représenté par l’un de ses proches. Le parallèle entre les deux cas avait conduit mardi des élus américains à comparer la Chine à l’Allemagne nazie. « La Chine devrait avoir honte et devrait éprouver de la gêne de se retrouver en compagnie de l’Allemagne nazie », a lancé le représentant républicain Frank Wolf.

Et le lauréat est… Retour en Chine donc. Parmi les candidats figuraient Nelson Mandela, Nobel de la paix et icône de la lutte anti-apartheid, le milliardaire américain Bill Gates, l’ancien président américain Jimmy Carter, le leader palestinien Mahmoud Abbas, ou encore le panchen-lama – deuxième leader du bouddhisme tibétain qui a l’avantage d’être désigné par Pékin, contrairement au dalai-lama.

C’est finalement l’ancien vice-président taïwanais Lien Chan qui a été choisi. Ce haut responsable politique est connu pour avoir favorisé le rapprochement entre la Chine communiste et Taïwan, séparés depuis plus de 60 ans. On ignore encore si Lien Chan viendra recevoir le prix et la récompense de 100 000 yuans (11 400 euros). En tout cas, Tan Changliu, l’un des organisateurs de l’événement, a refusé de préciser qui finançait ce prix et assure que son association n’était pas liée au gouvernement chinois.

Marie Simon

Un prix Confucius existe déjà…

… mais c’est l’Unesco qui le remet chaque année depuis 2005 et qui distingue ceux qui luttent pour l’alphabétisation dans le monde. Rien à voir, donc.

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