Andrzej Duda © AFP

Pologne: la loi « antidémocratique » a été approuvée

Les conservateurs polonais de Jaroslaw Kaczynski ont fait approuver dans la nuit de mercredi à jeudi par la chambre haute du parlement une loi très controversée sur le Tribunal constitutionnel, en dépit des appels à la retenue lancés notamment par la Commission européenne.

Débattue dans une précipitation extrême au Parlement, la loi a été approuvée juste avant 4H00 du matin (3H00 GMT) par 58 sénateurs du parti Droit et Justice (PiS), contre 28 et une abstention.

Une fois signée par le président issu du parti au pouvoir, cette loi dénoncée par l’opposition polonaise comme une tentative de paralyser le Tribunal et une atteinte à la démocratie, doit entrer en vigueur immédiatement.

Mercredi, dans une lettre aux autorités polonaises, le vice-président de la Commission européenne Frans Timmermans a demandé « que cette loi ne soit pas adoptée finalement, ou au moins qu’elle n’entre pas en vigueur avant que toutes les questions concernant son impact sur l’indépendance et le fonctionnement du Tribunal constitutionnel aient été pleinement et correctement évaluées ».

Le ministre polonais de la Justice Zbigniew Ziobro a rétorqué immédiatement que M. Timmermans avait « été induit en erreur » par l’opposition.

Néanmoins, le ministère polonais des Affaires étrangères a demandé jeudi à la Commission européenne pour la démocratie par le droit, dite Commission de Venise, organe consultatif du Conseil de l’Europe, son opinion sur la nouvelle loi, selon un communiqué officiel.

La Commission de Venise sert d’expertise en matière de droit constitutionnel, de fonctionnement des institutions démocratiques et de droits fondamentaux.

La nouvelle loi introduit notamment la règle de la majorité qualifiée de deux tiers pour les décisions du Tribunal, obligé désormais de réunir, pour pouvoir statuer dans les cas de grande importance, 13 des 15 juges que compte cette cour, au lieu de neuf auparavant.

Le parti de M. Kaczynski affirme qu’avec cette loi il « met de l’ordre » dans le fonctionnement du Tribunal et élimine un obstacle dans la mise en oeuvre de ses promesses électorales.

Mais la loi a donné lieu à des débats houleux lors de son passage express au Parlement et suscité de vives critiques de la Cour suprême et de plusieurs organisations non-gouvernementales dont Amnesty International.

Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH) a aussi exprimé sa « préoccupation ». Et l’ancien président polonais Lech Walesa a appelé à un référendum sur l’organisation d’élections anticipées, deux mois à peine après les législatives victorieuses pour le PiS.

Le Conseil national de justice (KRS) a lancé un appel au président Andrzej Duda à ne pas promulguer la nouvelle loi, mais de la soumettre… au Tribunal constitutionnel pour décider de sa conformité avec la loi fondamentale.

Le PiS avait déjà placé au sein de ce Tribunal cinq juges de son choix, suivant une procédure controversée, ce qui devrait lui permettre de bloquer facilement les avis défavorables du Tribunal.

Pour l’opposition polonaise toutes tendances confondues, les nouvelles autorités veulent tout simplement s’affranchir de tout contrôle indépendant.

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