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Paris: entre échauffourées et hommages

Des centaines de milliers de manifestants ont réclamé dimanche, de Sydney à Londres, une action forte contre le réchauffement climatique, à la veille d’un sommet historique avec plus de 150 chefs d’Etat et de gouvernement à Paris, meurtrie par les attentats du 13 novembre. La capitale française, elle, se partageait entre heurts et hommage.

Des heurts se sont produits dans la capitale française dimanche. Près de 300 personnes ont été interpellées après des échauffourées qui ont eu lieu dans l’après-midi entre des manifestants et la police, après une chaîne humaine qui a réuni pacifiquement des milliers de participants.

En hommage aux victimes des attentats jihadistes du 13 novembre (130 morts et quelque 350 blessés), une minute de silence a été observée par les chefs des délégations des 195 pays à l’ouverture des travaux de la conférence mondiale de l’ONU sur le climat qui se tient au Bourget (nord de Paris). Dimanche soir, juste après son arrivée en France, le président américain Barack Obama a retrouvé son homologue français François Hollande devant le Bataclan, salle de spectacle parisienne où 90 personnes ont été tuées par des jihadistes le 13 novembre. Ils y ont déposé des fleurs avant de se recueillir.

Le Premier ministre du Canada, Justin Trudeau, et la présidente chilienne Michelle Bachelet avaient fait de même plus tôt dans la journée. Avant son arrivée à Paris, M. Obama s’était dit « optimiste sur ce que nous pouvons accomplir » lors de la conférence climat. Le chef de la diplomatie française et président de cette 21e Conférence des parties (COP21), Laurent Fabius, a appelé à trouver la voie du compromis. « Je me permets de compter sur vous pour négocier et bâtir des compromis dès les prochaines heures », a-t-il lancé lors d’une courte séance de travail en prélude au sommet.

Dans la capitale française placée sous haute surveillance, où les rassemblements sont interdits en raison de l’état d’urgence instauré après les attentats, des milliers de manifestants ont formé une chaîne humaine le long d’un boulevard de l’Est parisien, où se trouve le Bataclan. Après la chaîne humaine, des incidents ont éclaté non loin de là, place de la République, entre des manifestants cagoulés et masqués qui ont jeté des projectiles et les forces de l’ordre qui ont répliqué par des jets de gaz lacrymogène. Selon la police, 289 personnes ont été interpellées, dont 174 placées en garde à vue. Les autorités n’ont toutefois fait état d’aucun blessé.

Le président Hollande a fustigé l’action « scandaleuse » d' »éléments perturbateurs », qui « n’ont rien à voir avec les défenseurs de l’environnement ».

Depuis vendredi, plus de 570.000 personnes ont participé à quelque 2.300 marches pour le climat organisées dans 175 pays, selon des estimations de l’un des organisateurs, l’ONG Avaaz, pour faire pression sur les représentants des pays qui vont négocier jusqu’au 11 décembre pour sceller un accord mondial visant à limiter le réchauffement climatique. Lundi, plus de 150 chefs d’Etat et de gouvernement seront présents à l’ouverture officielle de la conférence à 10H00 (09H00 GMT), une participation inédite symbolisant l’urgence à agir. Ils observeront également une minute de silence à la mémoire des victimes des attentats.

‘Etat d’urgence climatique’

« Les mots ne suffisent plus », ont scandé les manifestants dans le monde, des stars d’Hollywood à des anonymes déguisés en ours polaires.

« Ce sommet historique est d’une importance vitale », a déclaré à Londres l’actrice oscarisée Emma Thompson. « Il n’y a pas de planète B », « Etat d’urgence climatique », rappelaient les pancartes des manifestants. Des mobilisations ont eu lieu notamment à Sydney (Australie), Berlin, Madrid, New Delhi, Ouagadougou, Katmandou ou Rio de Janeiro (Brésil). La mobilisation a toutefois été faible dans plusieurs villes des Etats-Unis et d’Amérique latine, avec des centaines de personnes dans des manifestations organisées à New York (Etats-Unis), Washington, Bogota, Mexico ou Lima. Ils étaient néanmoins 25.000 à défiler à Ottawa.

François Hollande a de nouveau plaidé dimanche pour un accord « ambitieux  » et « contraignant », insistant sur une révision régulière des engagements des pays sur la limitation des émissions de gaz à effet de serre. La ministre canadienne de l’Environnement Catherine McKenna a indiqué de son côté que l’accord espéré « sera juridiquement contraignant », mais pas dans toutes ses dispositions. Vingt pays, dont les Etats-Unis et la France, vont s’engager lundi à doubler leurs investissements dans les énergies dites « propres », ont annoncé la Maison Blanche et la présidence française.

Le président français accueillera lundi les chefs d’Etat au Bourget, notamment l’Américain Barack Obama, le Chinois Xi Jinping, l’Indien Narendra Modi, le Russe Vladimir Poutine et le Turc Recep Tayyip Erdogan, qui se succéderont à la tribune.

Sur fond de guerre déclarée au groupe jihadiste Etat Islamique, qui a revendiqué les attentats de Paris, et de tensions entre Ankara et Moscou, des rencontres bilatérales auront lieu pendant le sommet.

Environ 40.000 personnes, dont 10.000 délégués, sont attendues chaque jour, un défi sécuritaire. Quelque 2.800 policiers et gendarmes seront chargés de sécuriser le site de la conférence au Bourget, outre 6.300 policiers et militaires mobilisés à Paris. La communauté internationale s’est fixé comme objectif de limiter le réchauffement à 2°C par rapport à l’ère pré-industrielle, faute de quoi les phénomènes déjà visibles, comme la fonte des glaciers, la disparition d’espèces et l’intensification des épisodes météorologiques extrêmes, vont dramatiquement s’aggraver.

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