Le secrétaire général de l'OTAN, General Stoltenberg © REUTERS

Otan: coup d’envoi du « plus important renforcement de la défense collective » depuis la fin de la Guerre froide

Les ministres de la Défense des 28 pays de l’Otan ont donné jeudi le coup d’envoi du « plus important renforcement de la défense collective » des alliés entrepris depuis la fin de la Guerre froide, une mesure justifiée par l’attitude « agressive » de la Russie depuis l’annexion de la Crimée en mars dernier, la crise ukrainienne et les nouvelles menaces apparues sur le flanc sud.

Ils ont décidé de porter à 30.000 hommes – contre 13.000 jusqu’ici – les effectifs de la force de réaction rapide alliée, la « NATO Response Force » (NRF), de mettre sur pied en son sein un « fer de lance » de quelque 5.000 hommes et d’installer six « centres de commandement » dans autant de pays d’Europe de l’est pour préparer l’arrivée d’éventuels renforts, a annoncé le secrétaire de l’Otan, Jens Stoltenberg, à l’issue d’une réunion d’une journée à Bruxelles.

Les chefs d’Etat et de gouvernement alliés avaient approuvé lors de leur dernier sommet, en septembre 2014 au Pays de Galles, un plan d’actions pour muscler leur défense collective, en décidant notamment d’accroître la réactivité de leurs forces armées alliées et de maintenir une « présence permanente » – mais limitée – en Europe de l’est.

Lors de leur première réunion depuis ce sommet, les ministres de la Défense des 28 ont approuvé les premières mesures concrètes de cet ambitieux « Readiness Action Plan » (RAP).

Il s’agit de « s’assurer que nous avons les bonnes forces au bon endroit au bon moment », a souligné M. Stoltenberg, qualifiant ces mesures de « défensives ».

Les ministres ont ainsi décidé d’augmenter les effectifs de la NRF – qui existe déjà depuis une décennie, mais dont la taille avait été rabotée en raison de l’importance de l’engagement des armées alliées en Afghanistan – pour les porter à quelque 30.000, soit trois brigades terrestres ainsi que des éléments aériens, navals et des forces spéciales.

Les ministres ont aussi fixé les contours d’une nouvelle force, plus réduite, intégrée à la NRF, dont elle doit devenir d’ici l’an prochain le « fer de lance ». D’où son surnom de « spearhead force » donnée à ce que les responsables de l’Otan appellent en jargon la VJTF (pour « Very High Readiness Joint Task Force »).

L’objectif est que ce « fer de lance » soit opérationnel d’ici le prochain sommet de l’Otan, prévu au début 2016 – sans doute en juin – à Varsovie, ont expliqué des responsables de l’Otan.

Un déploiement dans les 48 heures

Les premiers éléments de cette force à haut niveau de préparation devront pourvoir se déployer dans les 48 heures, dans toute zone du territoire de l’Otan faisant l’objet d’une menace, les autres troupes devant les rejoindre dans les sept jours.

Dans l’intervalle, une VJTF « intérimaire » devrait être mise sur pied, avec des forces fournies principalement par l’Allemagne, la Norvège et les Pays-Bas, comme l’ont confirmé jeudi les ministres de la Défense des trois pays – trois femmes, Ursula von der Leyen, Jeanine Hennis-Plasschaert et Ine Marie Eriksen Søreide.

Six pays européens (la France, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne, l’Espagne et le Royaume-Uni) se sont portés volontaires pour en assurer le commandement à tour de rôle, a indiqué M. Stoltenberg.

Selon lui, les ministres ont encore décidé la mise sur pied « immédiate » de six petits états-majors dans six pays d’Europe de l’est (Bulgarie, Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne et Roumanie) pour préparer l’arrivée d’éventuels renforts. Ces « NATO Forces Integration Units » (NFIU) accueilleront chacun une quarantaine de militaires, dont une moitié de personnels des pays hôtes.

De source belge, on estime que les moyens prévus pour défendre le territoire de l’Otan – principalement les nouveaux membres d’Europe de l’est, inquiets de l’expansionnisme russe – devront aussi servir à la défense du flanc sud face à l’instabilité croissante s’étendant de l’Afrique du nord au Moyen-Orient, comme en Syrie et en Irak.

Le secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, dont c’était la dernière réunion ministérielle à l’Otan avant son remplacement par Ashton Carter, a exprimé sa préoccupation face aux possibles divisions entre alliés, entre ceux qui craignent l’expansionnisme russe et ceux qui s’inquiètent de l’afflux de combattants étrangers en provenance d’Afrique du nord.

« Je suis très inquiet de la suggestion que cette alliance puisse choisir de se concentrer sur une seule de ces régions comme étant notre première priorité », a-t-il dit devant la presse, appelant les alliés à fournir suffisamment de moyens pour faire face sur deux fronts.

« Je suis d’accord avec M. Hagel (…), l’Otan doit pouvoir faire face aux deux » et « n’a pas le choix », a déclaré M. Stoltenberg.

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