Pour Cynthia Fleury, il faut se départir des pratiques politiques détestables d'un autre âge. © LIONEL BONAVENTURE/AFP © LIONEL BONAVENTURE/AFP

« On a trop voulu dissocier éthique et politique »

Le Vif

La philosophe Cynthia Fleury estime que les électeurs sont en demande d’un vrai renouveau, pas d’un énième affrontement entre personnalités datées.

 » Le processus électoral est gravement perturbé, mais la manière dont il a été, ces dernières années, si désubstantialisé, depuis le référendum de 2005, et plus généralement à cause de la crise de la représentation politique, l’avait perturbé depuis bien plus longtemps encore. Le score considérable de l’abstention vient régulièrement ratifier ce phénomène. Il faut rappeler que l’accès à l’éligibilité, à la candidature, est encore trop discriminant. La seule possibilité parlementaire d’obtenir des parrainages pour se présenter à l’élection présidentielle, par exemple, rend extrêmement difficile, de fait, la présence de candidats non issus de la sphère politicienne. Si les Français plébiscitent à ce point les primaires ouvertes, c’est parce qu’ils se sentent à l’étroit face aux propositions et aux candidats présentés par les partis traditionnels. Ils sont en demande de vrai renouveau, de vrai débat, de vraie explicitation des enjeux contemporains, et non d’un énième affrontement entre personnalités historiquement datées. Peut-être était-ce là le prix à payer pour pratiquer une tabula rasa plus radicale qu’à l’accoutumée, même si personne n’anticipe réellement les conséquences de tels bouleversements. Comment, néanmoins, ne pas se satisfaire d’une justice plus prompte à investiguer, de révélations médiatiques plus performatives ? Il est vrai qu’il y a là un manque criant d’équité, au sens où les affaires n’atteignent pas de la même façon les candidats, certains semblant indemnes alors que les révélations sont terribles pour d’autres. Sans parler du fait que les médias protègent certains candidats par leur  » acharnement  » ciblé. Mais le caractère détestable des pratiques d’un autre âge dans la vie politique est un fait dont il est temps de se départir. Il serait souhaitable de voir la régulation démocratique avancer avec plus de rigueur et de sérénité, mais, hélas, ce n’est pas le cas. Ce sont souvent les  » scandales  » qui sont instrumentés pour passer un seuil, et mettre en place de nouveaux fonctionnements au service de meilleures probité et transparence publiques. On a voulu dissocier éthique et politique, Etat de droit et Etat social. La démocratie rappelle cette vieille leçon de l’indivisibilité des principes. C’est là son exigence, pour certains, son utopie, mais en réalité son seul socle d’opérativité.  »

Propos recueillis par Alexis Lacroix .

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