Nicolas Sarkozy lors d'un meeting le 14 février 2016 © Reuters

Nicolas Sarkozy est toujours suspect

Le Vif

Le parquet de Paris n’a pas l’ombre d’un doute : l’ancien chef de l’Etat a bien explosé ses comptes en 2012 et doit être renvoyé devant le tribunal correctionnel pour financement illégal de campagne.

Devant le juge d’instruction, le 16 février dernier, Nicolas Sarkozy est catégorique.  » Je maintiens qu’il n’y a pas eu d’emballement de ma campagne.  » Et, insiste-t-il un peu plus tard,  » aucun indicateur ne pouvait me permettre de déceler une fraude « . Le 5 octobre encore, devant ses partisans, il affirme audacieusement  » avoir été lavé de toute forme de soupçon  » dans l’enquête sur le financement de sa campagne présidentielle en 2012. La société de communication Bygmalion, choisie par l’équipe du candidat, avait alors facturé illégalement à l’UMP des prestations qui auraient dû être réglées par la campagne. Ce dossier empoisonne depuis de longs mois sa tentative de retour au pouvoir.

« Pas le droit » de déléguer le suivi des dépenses

Le candidat a triplé les meetings en dépit des avertissements.
Le candidat a triplé les meetings en dépit des avertissements.© REUTERS

Les dénégations de l’ex-président français n’ont pas convaincu tout le monde, et en tout cas pas le parquet de Paris. Dans son réquisitoire définitif, il considère que Nicolas Sarkozy doit être renvoyé devant le tribunal correctionnel pour  » financement illégal de campagne « , une infraction punie d’un an d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende. Le président sortant est soupçonné d’avoir dépassé le montant légal des dépenses, et d’avoir fait indûment payer à l’UMP la somme de 19 197 735 euros. A l’appui de son argumentation, le ministère public met en avant une note en date du 7 mars 2012. Le document émane d’un expert-comptable, signataire du compte de campagne, qui donne l’alerte : 642 000 euros de plus que le montant légal ont déjà été budgétisés. Il se fend également d’un avertissement sans ambiguïté :  » Il convient de souligner les conséquences extrêmement graves d’un éventuel dépassement du plafond des dépenses autorisées.  »

Pour le parquet, ce point paraît décisif. Lors de son audition, Nicolas Sarkozy a, dans un premier temps, nié avoir eu connaissance de cette note. Puis, confronté aux déclarations de son directeur de campagne, Guillaume Lambert, il finit par admettre :  » Cela me semble tout à fait plausible.  » Même s’il indique ne pas se souvenir de sa réaction et des consignes qu’il aurait pu donner. Le ministère public fait remarquer, en outre, qu’en dépit de cette claire mise en garde, le candidat a décidé alors de tripler le nombre de ses meetings. Un mail d’Eric Cesari, le directeur général de l’UMP, à Lambert, le 19 mars 2012, vient conforter la démonstration :  » Cher Guillaume, Jérôme (NDLR : Lavrilleux, directeur adjoint de la campagne) et moi avons bien pris note du souhait du Président de tenir une réunion publique chaque jour à partir de la semaine prochaine.  » Le parquet en tire une conclusion sans équivoque, estimant que Nicolas Sarkozy  » avait donné en connaissance de cause des instructions en faveur d’une augmentation des dépenses au mépris des recommandations contraires des experts-comptables dont il avait eu pleinement connaissance « .

Pour sa défense, l’ancien chef de l’Etat fait valoir que, trop occupé par sa fonction, il avait délégué le suivi des dépenses à ses collaborateurs dans la campagne. Mais le parquet soutient qu' » il n’en avait pas le droit « . Car la loi pénale attribue cette responsabilité au seul candidat. Nicolas Sarkozy ne sera fixé sur son sort définitif qu’ultérieurement. Puisque, en dernier ressort, c’est aux juges d’instruction de décider ou non de son renvoi devant le tribunal correctionnel.

Par Pascal Ceaux et François Koch.

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