Myra Hindley © DR

Myra Hindley, « la femme la plus diabolique d’Angleterre »

Le Vif

Cinquante ans après une série de crimes d’enfants commis avec son compagnon, Ian Brady, « la femme la plus diabolique d’Angleterre » continue de hanter l’imaginaire collectif. Ian Brady vient de mourir.

A quoi ressemble le mal ? Pour l’Angleterre des Beatles (pour l’éternité, peut-être, tant l’affaire reste gravée dans l’histoire criminelle du royaume), il emprunte le visage en noir et blanc de Myra Hindley, capturée par la police du comté de Cheshire, le 11 octobre 1965. Blondeur peroxydée, mèches folles à la Médusa, regard défiant et lèvres fines que l’on devine teintées d’un « lipstick » couleur sang, l’ancienne sténodactylo de la compagnie chimique Millwards, âgée de 23 ans, vient d’être arrêtée pour sa participation au meurtre d’un adolescent, Edward Evans. La région – le nord-ouest de l’Angleterre – est triste comme un jour sans « milk » ; le crime, révoltant ; l’affaire, gigantesque : car le garçon de 17 ans, massacré à coups de pelle et étranglé par le compagnon de Myra Hindley, Ian Brady, s’inscrit dans une série de cinq crimes commis par le couple entre juillet 1963 et octobre 1965.

Qui sont Mira Hindley et Ian Brady, sinon deux amoureux aimant parler de Nietzsche et de Hitler ? Des Dutroux et des Fourniret avant l’heure, ou plutôt « les meurtriers de la lande », comme les surnomme la presse en raison du lieu – Saddleworth Moor, situé au sud de la chaîne des Pennines, dans le nord du pays -, où les tombes de trois des cinq petites victimes ont été retrouvées par la police. Du jour au lendemain, ce duo infernal, adepte d’un strict partage des tâches – elle attire les jeunes proies dans une camionnette blanche avant qu’il ne les photographie, les viole et les tue -, s’invite dans toutes les conversations britanniques.

« Il est cruel et égoïste et je l’aime »

L’Ecossais Brady, un pervers sexuel passé par la case prison pour vols et cambriolages, s’impose comme l’artisan des crimes. Mais c’est sa compagne, si impassible, qui trouble le plus l’opinion. Fille d’un ancien parachutiste alcoolique et violent, Myra Hindley était très, trop amoureuse de cette brute sadique de Brady (« Il est cruel et égoïste et je l’aime », écrit-elle ainsi dans son journal intime, peu après leur rencontre, alors qu’elle n’est âgée que de 16 ans). Mais là n’était pas son seul défaut. L’absence, chez la jeune femme, de remords ou de toute forme d’empathie, sinon à l’égard de son petit chien, Puppet, sa spectaculaire aptitude au mensonge ont grandement contribué à faire d’elle la « femme la plus diabolique du Royaume-Uni ».

A l’ouverture de leur procès, en avril 1966, les amants nient d’ailleurs toute implication dans les crimes. Mais l’éprouvante diffusion d’un enregistrement retrouvé à leur domicile scelle leur destin. On y entend la petite Lesley Ann Downey, 10 ans, enlevée le 26 décembre 1964 au pied d’un manège d’une fête foraine, implorant sans succès la clémence de ses tortionnaires, dont les voix sont parfaitement identifiables. Le 6 mai 1966, après deux heures de délibéré, les jurés condamnent Ian Brady à la réclusion à perpétuité pour les meurtres de Lesley Ann Downey, d’Edward Evans et de John Kilbride, 12 ans. Mira Hyndley, reconnue coupable des meurtres de Downey et d’Evans, écope de la même peine. Les « tueurs de la lande » font dès lors périple séparé. Brady, déclaré « psychopathe » en novembre 1985, croupit dans une chambre de l’hôpital psychiatrique d’Ashworth. A 77 ans, il est aujourd’hui l’individu incarcéré depuis le plus longtemps en Angleterre. Pour Myra Hindley, le voyage carcéral, passé par Holloway, Durham, Cookham Wood et Highpoint, a trouvé son point final à l’hôpital de Suffolk, le 15 novembre 2002. Celle qui était devenue une prisonnière modèle et une fervente catholique est morte à l’âge de 60 ans, obèse, souffrant des poumons et du coeur, et résolument fumeuse. Ses 40 cigarettes quotidiennes constituaient son unique bouffée de liberté, disait-elle à ses rares amis. A l’annonce de sa mort, 20 entreprises funéraires ont refusé de prendre en charge la crémation de son corps. Les cendres de Myra Hindley ont finalement été dispersées dans un lieu tenu secret… à 16 petits kilomètres de la lande de Saddleworth.

Transféré en 1985 de la prison vers un hôpital psychiatrique carcéral, Ian Brady a tenté durant des années, sans succès, de se laisser mourir de faim. Il était nourri via une sonde. Sa demande de retourner en prison, en 2012, avait été rejetée mais avait été l’occasion d’un nouveau coup de projecteur dans les médias britanniques. Le tueur n’a jamais exprimé aucun regret.

Par Géraldine Catalano

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