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Mère à 11 ans, nouveau drame de la grossesse précoce au Paraguay

Le Vif

Mainumby, une fillette de 11 ans violée par son beau-père, a accouché jeudi à Asuncion, la capitale du Paraguay, où l’avortement demeure interdit, comme dans la majorité des pays d’Amérique latine, et où 600 filles de moins de 14 ans ont accouché l’an dernier.

Dolores Castellanos, chargée de suivre cette grossesse par le ministère paraguayen de la Santé, a précisé à l’AFP que Mainumby se remettait normalement de l’accouchement par césarienne à l’issue duquel elle a donné naissance à une fille de 3,5 kg baptisée Milagros (« Miracles » en espagnol), à l’Hôpital de la Croix-Rouge d’Asunción.

« C’est un tragique rappel du fait que le Paraguay doit d’urgence revoir sa législation draconienne sur l’avortement », a aussitôt dénoncé Amnesty International.

Lorsque la fillette était enceinte de cinq mois, elle s’était vu refuser un avortement. Le code pénal prévoit pourtant la possibilité de procéder à une telle intervention dans les 20 premières semaines en cas de danger pour la mère.

Diverses organisations ont plaidé pour un avortement, mais la justice et les autorités paraguayennes, appuyées par l’Eglise catholique et des organisations civiles, ont fermement écarté cette option, mettant en avant l’état avancé de la grossesse (23 semaines).

20.000 grossesses

« Nous allons voir comment elle réagit en tant que mère », a déclaré le directeur de l’hôpital, Mario Villalba, évoquant l’allaitement.

La fillette-mère est une frêle jeune fille d’1m40 et pesait 35 kg avant sa grossesse.

Son beau-père a été arrêté en mai et placé en détention préventive dans une prison d’Asuncion. Il risque une peine de 12 à 15 ans, s’il est reconnu coupable du viol.

Sa mère est également poursuivie par la justice, mais elle a été autorisée à rester auprès de sa fille pendant la grossesse, décelée par les médecins en avril quand elle a été admise pour un supposé kyste à l’estomac.

Dans ce même hôpital, trois autres fillettes, âgées de 12 ans, accoucheront dans les prochaines semaines, a indiqué le Dr Villalba.

« Le fait que Mainumby ne soit pas morte (en mettant l’enfant au monde) n’excuse pas les violations des droits de l’homme dont elle a été victime de la part des autorités paraguayennes, qui ont décidé de jouer avec sa santé, sa vie et son intégrité, alors que la grossesse était extrêmement risquée, qu’elle avait été violée et que c’est une enfant », considère Erika Guevara, directrice Amérique d’Amnesty International.

Selon l’Unicef, au Paraguay, 650 fillettes de 10 à 14 ans ont accouché et 20.000 jeunes filles de 15 à 19 ans sont tombées enceintes en 2014.

Dans la plupart des cas, les grossesses sont consécutives à des sévices sexuels, fait remarquer l’Unicef.

La grossesse de la jeune fille, puis l’accouchement, ont provoqué un grand débat au Paraguay, après avoir scandalisé bien au-delà des frontières de ce pays sud-américain, enclavé entre le Brésil et l’Argentine.

L’affaire a déclenché un débat au Parlement, et des partis de gauche minoritaires ont réclamé la dépénalisation de l’avortement.

La procureure Monalisa Muñoz, chargée du dossier, a regretté que la fillette ait été « à la merci » de son beau-père, « aux mains de ce monsieur parce que sa mère travaillait, employée dans une cantine scolaire. C’est lui qui s’occupait d’elle. Il allait même aux réunions de parents d’élèves ».

Désormais, souligne Amnesty, l’Etat paraguayen « doit garantir l’accès aux prestations de santé dont elle aura besoin, la poursuite de sa scolarité, et que sa famille proche reçoive tout le soutien psychologique, économique et social ».

Avec l’Afp

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