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Massacre d’étudiants au Mexique

Muriel Lefevre

Dix jours après l’enlèvement mystérieux de 43 étudiants, l’armée mexicaine a pris le contrôle de la ville d’Iguala. Mais que s’est-il passé dans cette bourgade de l’Ouest mexicain ?

Ce week-end, 28 cadavres calcinés et démembrés ont été découverts dans 6 fosses communes découvertes près de la ville d’Iguala. Si les analyses ADN prendront de 15 jours à deux mois, il semble qu’il s’agisse des corps de certains des 43 étudiants qui ont mystérieusement disparu dans la nuit du 26 au 27 septembre. Ces derniers étaient venus à Iguala en bus de l’école d’Atzoyinapa, située à 100 kilomètres de là, pour demander plus de subventions.

Cette manifestation n’était visiblement pas au goût de la police locale qui a attaqué les bus, avec l’aide d’hommes armés non identifiés. L’intervention est sanglante : six morts et 25 blessés. Très rapidement l’inquiétude monte quant au sort des autres étudiants. Postée sur internet, une vidéo montre que ceux-ci sont embarqués par la police. Puis plus rien, jusqu’à l’arrestation de deux membres présumés d’un cartel qui avouent avoir assassiné 17 étudiants.

Dimanche 5 octobre, Iñaky Blanco, le procureur de l’État, annonce que cette attaque répressive aurait été ordonnée par Felipe Florez, le directeur de la sécurité publique d’Iguala, une ville de 140.000 habitants, épaulé en cela par le cartel des Guerreros Unidos. L’exécution des étudiants aurait, elle, été commanditée par El Chucky, le leader du gang Guerreros Unidos, les Guerriers unis.

Le Mexique est régulièrement confronté à des règlements de compte sanglants entre cartels et ils sont nombreux à dénoncer l’infiltration des autorités municipale par les cartels. Cette affaire est néanmoins symptomatique du fait qu’il existe encore des poches de pouvoirs dans un pays où 22 300 personnes ont été portées disparues en 7 ans. Fin août le gouvernement lance une gendarmerie nationale sensée pallier les « faiblesses » de la police locale. Elle vient d’ailleurs d’intervenir à Iguala avec l’appui de l’armée pour reprendre le contrôle de la ville. « Les policiers municipaux encore actifs ont été désarmés par le Secrétariat de la défense nationale », a expliqué aux médias le commissaire à la sécurité, Monte Alejandro Rubido. Ils seront transférés vers une base militaire dans le centre du pays, pendant que leurs armes seront examinées pour vérifier si elles ont servi à commettre des délits, a-t-il précisé. Au total, 22 policiers de Iguala ont été arrêtés, accusés de travailler pour un gang du crime organisé. Le directeur de la sécurité publique et le maire d’Iguala, Jose Luis Albarca, ont pris la fuite.

Cette affaire provoque un émoi sans précédent au Mexique. Ils sont de plus en plus nombreux à exprimer leur colère devant cette spirale de violence et de corruption. Au point que le gouverneur de Guerrero, Angel Aguirre, a lancé un appel au calme. S’il se confirme que ce sont bien les corps des étudiants, il s’agirait de l’un des pires massacres depuis 2006, date à laquelle a débuté la guerre contre les narcotrafiquants et qui a déjà fait depuis près de 80.000 morts.

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