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Marseille: le règlement de comptes au « barbecue », une spécialité locale

Le Vif

Un homme a été retrouvé carbonisé dans sa voiture, lundi, dans le nord de Marseille. Un mode opératoire baptisé « barbecue », né dans la région, qui ralentit l’identification des victimes. Explications.

Dans le dictionnaire, la définition en langage criminel de « barbecue » n’existe pas. S’il fallait l’inventer, elle stipulerait: n.m. Homicide par balle suivi de l’incendie du corps de la victime dans un véhicule.

Lundi soir, peu avant minuit, le corps carbonisé d’un jeune homme a été découvert aux Pennes-Mirabeau, au nord de Marseille. Le cadavre de la victime, âgée d’une vingtaine d’années, avait été aspergé d’un liquide inflammable. Même si aucune trace de balle n’a été retrouvée à cette heure, les enquêteurs ont exclu la thèse d’un suicide. Selon une source proche de l’enquête, la victime portait une plaie à la tempe.

En mai dernier, c’est Sabri, 24 ans, originaire de Marignane, qui avait fait les frais de ce mode opératoire. Son cadavre carbonisé avait été découvert dans la nuit du 15 au 16 dans une voiture, elle aussi brûlée, à Septèmes-les-Vallons, au Nord de Marseille.
Un scénario toujours identique, selon David-Olivier Reverdy, secrétaire adjoint du syndicat de police Alliance pour la zone méditerranée.

« Dans un premier temps, on tue la victime d’une balle logée dans la tête. Soit l’individu a été exécuté dans sa voiture, soit on déplace son corps dans un véhicule que l’on brûle avec de l’essence. Le plastique et le nylon s’enflammant très vite. Lorsque les pompiers arrivent sur place, le corps est entièrement calciné. »

Berrhama, le « rôtisseur »

Si quelques cas ont été recensés à Grenoble, Lyon et Paris, ils restent anecdotiques par rapport à ceux répertoriés dans la cité phocéenne, et notamment dans ses quartiers Nord. « Cette méthode est née à Marseille dans les années 90 », rappelle Thierry Colombié, spécialiste du grand banditisme et de la criminalité organisée.

C’est en effet Farid Berrhama, voyou notoire de la région, surnommé le « rôtisseur », qui, le premier brûla l’un de ses concurrents sur le marché des machines à sous, autour de l’étang de Berre. Depuis, le malfrat a été lui aussi assassiné mais sa méthode est restée.

Méthode efficace et dissuasive

« On brûle parce que malheureusement c’est efficace, commente à son tour le sociologue Laurent Mucchielli directeur de l’Observatoire Régional de la délinquance pour la région PACA. Avant on jetait les corps dans des ravins ou dans des points d’eau, aujourd’hui, face à l’amélioration des techniques de la police judiciaire, on les fait brûler pour faire disparaître les preuves. »

Cette méthode ralentit en effet l’identification et rend plus difficile les investigations. « La mise à nue de la victime nécessite, dans ces cas là, un relevé dentaire, ce qui est complexe et prend du temps », souligne Thierry Colombié. Le « barbecue » sert également de « méthode de dissuasion », analyse David-Olivier Reverdy. « Le voyou montre ainsi au clan adverse sa cruauté et sa puissance. »
Reste à identifier la victime et les « rôtisseurs ». Le parquet d’Aix-en-Provence a confié les investigations à la brigade criminelle de la police judiciaire déjà en charge de plusieurs réglements de comptes à Marseille et dans sa région.

Par Julie Saulnier

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